Cédric Garnier, un normand à l'assaut de la Fédération Française de Football

Président du club de football de Bretteville-sur-Odon depuis trois saisons, Cédric Garnier a rejoint la liste de Michel Moulin, candidat à la présidence de la Fédération Française de Football pour l'élection du 13 mars prochain. Un challenge aussi inattendu qu'excitant pour le Calvadosien.

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C'est l'histoire d'un président de club amateur local propulsé sur le devant de la scène nationale. L'histoire d'un dirigeant lassé des absurdes contraintes pesant sur les petits clubs qui n'a pas voulu garder sa langue dans sa poche, et qui bénéficie aujourd'hui d'un large auditoire pour s'exprimer. Retour sur une histoire hors du commun. 

Tout commence en avril 2020. Cédric Garnier se retrouve, comme beaucoup, confiné chez lui. Il a du temps. Du temps pour penser, pour ruminer. Il est président du club de Bretteville-sur-Odon depuis un peu plus de deux ans. C'est court, mais en même temps suffisament long pour remarquer que les règlementations et les obligations pesant sur les clubs tuent à petit feu le football amateur. Deux ans et demi, c'est suffisament long pour être ulcéré de la situation.

Remarqué sur les réseaux sociaux

Une nuit, alors que ses pensées l'empêchent de trouver le sommeil, il écrit son courroux. Sur six pages, il couche une lettre ouverte, un "coup de gueule" vis-à-vis des instances nationales. La bouteille à la mer d'un dirigeant qui a mal à son football. Déjà auteur d'un email à la Ligue de Normandie et au district du Calvados, il choisit cette fois le canal de Twitter. Son message trouve écho dans la presse locale.

Neuf mois plus tard, sollicité par Liberté-Le Bonhomme Libre, il réitère ses propos pour un retour du "foot à papa", plus humain, local et amateur, moins parisien et régulé. Sauf que cette fois, le message ne passe pas inaperçu. Il tape dans l'oeil de l'équipe de campagne de Michel Moulin, candidat à la présidence de la Fédération française de football. L'entrepreneur de 60 ans se veut le candidat du "foot d'en bas" et cherche à monter une liste avec des présidents de clubs qui le représentent.

Au départ, il appelle Cédric Garnier à titre consultatif, mais moins de 72 heures plus tard, le téléphone du calvadosien sonne à nouveau. "Je suis de nature sereine et pas facilement destabilisé, mais lorsque Michel Moulin m'a appelé pour me proposer d'intégrer sa liste alors que je roulais sur le périphérique sud de Caen, mes mains tremblaient sur le volant", décrit-il.

Avec David Douillet et Bernard Squarcini

Le président normand prend le temps de consulter ses amis dirigeants à Bretteville, puis sa famille. Devant l'enthousiasme non dissimulé des réponses, il décide de se lancer dans l'aventure et accepte la proposition. Le voilà embarqué dans "une formidable aventure", dans un cercle infiniment restreint de 36 concurrents dans la course pour diriger la plus grande fédération de France. 

Le weekend de la Saint-Valentin, il se rend à Paris. Non pas pour célébrer l'amour mais pour rencontrer ses co-listiers. Un savant mélange de personnalités de divers horizons. David Douillet, l'ancien champion de judo, veut réformer la gouvernance de la FFF, pronant une décentralisation en redonnant davantage de pouvoir aux clubs, aux Ligues et districts. Christine Kelly, journaliste de CNews, se place très en pointe sur l'aspect social. Elle avance notamment l'idée de la double licence pour qu'un enfant de parents séparés puisse jouer dans deux clubs différents si ses parents vivent loin l'un de l'autre.

Dans la liste de Michel Moulin, il y a aussi d'autres présidents de club, comme François Jacob (Blois), Benjamin Erisoglou (Cholet) ou encore Mourade Tahri (Viry-Châtillon). La volonté étant que les figures du monde amateur puissent remonter les problématiques du terrain. Mais la liste est également composé de gros poissons : le patron d'hôtels Jean-Bernard Falco, Jennifer Madiot, femme de Marc et directrice de communication du PMU, ou encore Bernard Squarcini, ancien patron des renseignements intérieurs.

"On promeut une rupture profonde et utile, sans hypocrisie, pour redonner du pouvoir aux ligues et aux districts et en finir avec le jacobinisme. Il y a une volonté forte de décentralisation, de retour à la proximité". 

Cédric Garnier, co-listier de Michel Moulin, candidat à la présidence de la FFF

Là où certains pointent de l'opportunisme dans la candidature de Michel Moulin, Cédric Garnier préfère avancer l'aspect solidaire de son chef de file, qui se veut le Robin des Bois de cette compagne présidentielle. "On nous vante depuis des années que l'on prone un football pour tous, c'est faux ! La FFF prone un football de sanctions et de contraintes pour avoir de l'argent. Il faut en finir avec le jacobinisme et changer ce système où les Ligues et Districts sont aféodés à la Fédération". 

Et le président calvadosien de partir en guerre contre les sanctions financières et sportives pour ce qu'il nomme des "absurdité règlementaires". "On passe notre temps à être réprimandés. On nous reproche de ne pas mettre en place une équipe féminine, mais on ne nous valorise pas pour notre équipe de sport partagé". Cédric Garnier poursuit sa liste longue comme le bras. Nous sommes un petit club de 7ème division et pour que nos installations soient aux normes, on nous demande d'avoir un tunnel de protection de sortie de joueurs, une main courante obstruée, un vestiaire de 20m² minimum avec au moins six douches. un filet de protection d'au moins 2,40m tout autour du terrain, etc. Si on n'a pas tout ça, on paie et on ne peut pas prétendre à des promotions sportives.

Vers un mouvement des Gilets jaunes du football ?

Avant d'être à la tête du club de l'agglomération caennaise, Cédric Garnier a occupé quasiment tous les postes imaginables dans une association sportive. Joueur, éducateur, dirigeant, bénévole à la buvette et aux stands de frites lors des tournois, membres du bureau... Il a touché à toutes les composantes de la vie du club, en connait donc parfaitement les rouages, et entend aussi les plaintes des licenciés. 

Il y a vraiment un sentiment d'injustice. On va vers un mouvement des Gilets jaunes du foot. C'est peut-être un peu fort mais il y a déjà des signes. Avec cette saison tronquée par le Covid, certains clubs dans l'Est ne veulent pas payer leur licence, sur le principe de "on ne joue pas, on ne paie pas".

Cédric Garnier, président de Bretteville-sur-Odon

La liste de Michel Moulin exige une transparence totale en matière financière. "La France a gagné la coupe du monde, on nous a promis des millions pour le foot amateur. Moi, j'ai eu cinq ballons", se désole le Normand, revigoré et fier d'avoir l'opportunité de participer à cette nouvelle "sacrée aventure", à l'échelon national. La campagne présidentielle lui permet permet de "s'enrichir personnellement" mais aussi de donner un beau coup de projecteur sur son club. "Pour l'image de Bretteville, pour les partenaires, c'est aussi une belle récompense".

Même s'il se trouve sur une liste considérée comme l'outsider de l'élection, il espère au moins que ses idées trouveront un écho et permettront une prise de conscience des haut-dirigeants et une réelle considération du bas de l'échelon. Soutenu par de nombreux présidents de clubs et amis dans le monde amateur régional,Cédric Garnier saura samedi prochain si sa mobilisation et son cri du coeur auront réussi à trouver les filets. 

Election à la présidence de la Fédération Française de Football, samedi 13 mars. 

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