Depuis le 17 mars, la France est confinée. Les enfants font école à la maison et certains parents, seuls, doivent associer le quotidien, la continuité pédagogique et le télétravail. Comment gèrent-ils cette situation ? Témoignages de parents dans le Calvados et la Manche.
Troisième jours de confinement obligatoire en France pour tenter de freiner la propagation du Covid-19. Depuis le 17 mars dernier, il est interdit de sortir de chez soi, sauf exceptions. La veille, l’ensemble des établissements scolaires était fermés, "jusqu’à nouvel ordre". Les cours sont assurés à distance.
Des parents, parfois seuls, additionnent travail à la maison et gestion des cours et devoirs, combiné à la vie quotidienne. Le rythme change, les tâches, nouvelles, s’ajoutent à un quotidien qui se réinvente à domicile. Entre quiétude du foyer, multiplication des tâches et spectre d’une situation inédite et anormale, récit de deux parents.
(Ces témoignages ne sont pas les reflets de toutes le situations familiales en cette période difficile. Le but est de partager des expériences à un instant T, d’autres suivront)
"Je vis au jour le jour"
"L’organisation c’est un bien grand mot, on vit au jour le jour", s’exclame Virginie domicilée à Bretteville-sur-Odon (Calvados). Cette maman de deux enfants, de 11 et 8 ans, est en télétravail depuis lundi. Son conjoint, avocat, doit continuer de travailler, malgré les mesures de confinement en vigueur depuis le 17 mars dernier.Désormais, à chacun de s’organiser entre travail, enfants, devoirs et tâches quotidiennes, en particulier quand le conjoint est absent. "Mon épouse n’est pas là, donc je me lève très tôt. Je me lève à 6h30 comme si j’allais au travail. Je prends mon petit déjeuner. Les filles se réveillent un peu plus tard entre 7h30 et 8 heures", témoigne Fabien, ingénieur dans le nucléaire. Sa compagne travaille dans une boulangerie. La journée, il est aux commandes de ce quotidien où enfants et parents travaillent ensemble à la maison. "Je commence à distribuer le travail le matin. La grande c’est facile elle est autonome." Père de filles de 11 et 6 ans, ce Cherbourgeois a décidé de s’adapter au rythme de ses enfants. "C’est trois heures de cours le matin. Trois heures où je profite pour faire du télétravail. J’essaie de leur faire comprendre qu’il ne faut pas me déranger. La petite à ce moment-là elle joue, elle regarde la télé, elle me sollicite un peu. Et puis en fin de matinée je dédie du temps à la petite pour faire les leçons. De la lecture et des mathématiques."
"On nous demande de faire quand même un travail d’enseignant, il faut vraiment être présent. C’est un vrai travail de continuité pédagogique. Il faut donner du temps. On grappille un peu sur le temps du travail." "C’est impossible de télétravailler et de gérer les enfants en même temps. Lundi j’ai du travailler deux heures et hier une heure !" déclare Virginie.
Si travail et cours ne font pas bon ménage, ils s’additionnent aussi aux tâches du quotidien et les banalités deviennent une organisation. "Il faut préparer le repas, il n'y a pas la cantine, il faut anticiper", explique Virginie qui alterne entre repas préparés la veille ou des plats à manger sur plusieurs jours. Une organisation similaire du côté de Fabien qui prépare "la veille ou sur le moment".Hier, j’étais en réunion en vidéo mais ma fille prenait sa douche elle manquait de savon, j’ai du mettre en pause pour gérer ça… après, tout le monde à bien compris
"Pour les courses je ne suis pas encore sortie (…) j’ai une boulangerie à côté et un boucher, une superette et quand j’aurais besoin j’irai", explique cette Brettevillaise. Fabien, lui, a décidé de laisser cette tâche à son épouse :
Vu que c’est elle qui sort pour travailler, alors elle passe faire les courses si besoin
"On essaie de blaguer, de faire les choses avec humour"
"Les journées sont tellement rythmées, avec la continuité pédagogique, le travail, les filles... On se met une "charge mentale" et on n’a pas le temps de penser à ça. (le coronavirus ndlr) Je vis au jour le jour, j’espère que tout se passe bien. Mais d’ici dimanche j’essaierai de plus y réfléchir", confie Fabien. "La toute petit n’a pas la conscience de ce qu’il se passe. Elle sait qu’il y a une maladie à l’extérieur, qu’il ne faut pas rencontrer des personnes. La plus grande a accès aux médias. Elle a compris le virus, ce que c’était et qu’il y a un risque, qu’il y a des décès. Cela l’inquiète un peu plus mais elle a compris qu’il faut qu’on respecte les règles définies", détaille-t-il.Du côté de Virginie, les enfants en ont discuté avec leurs professeurs. Et passé la déception de ne pas voir les grands-parents, cette maman tente d’adoucir l’ambiance :
On essaie de blaguer, de faire les choses avec humour. De voir le côté positif : papa rentre un peu plus tôt on mange tous ensemble le soir. On fait des Facetime avec les grands-parents et les copains (…) Pour l’instant ca va je sais pas après, on verra au jour le jour, sinon ca déprime
Ce midi, on a prévu une boom dans le jardin
Après les cours, dans la journée, place aussi aux divertissements. "Dès que la météo le permet on essaie de faire des récrés. Les filles font un peu de trampoline, je prends un café. On joue avec elles. On fait des coloriages, des jeux de société. On évite les écrans. On fait des soirées pyjamas", raconte Fabien.
Et la suite ? "On verra on garde le sourire et l’humour. On essaie de rigoler avec les enfants. Ce midi, on a prévu une boom dans le jardin pour danser car ils ont un manque d’exercice. Il faut trouver des idées, des projets", explique Virginie. "C’est ça qu’on doit intégrer, on ne peut pas tout faire alors on fait ce que l’on peut. Et on appelle les gens, pour éviter l’isolement."