Déchéance de nationalité : la gauche plus divisée que jamais, la droite refuse de s'engager

La gauche est divisée sur la question de la déchéance de nationalité quelques jours après l’annonce mercredi par François Hollande du maintien de cette mesure dans le projet de révision constitutionnelle. La droite, dans l’embarras, évite de se prononcer.

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La déchéance de nationalité pour les binationaux condamnés pour terrorisme divise la gauche plus que jamais. "Une partie de la gauche s'égare au nom de grandes valeurs en oubliant le contexte, notre état de guerre, et le discours du président devant le Congrès", a affirmé dimanche 27 décembre le Premier ministre Manuel Valls au JDD.

Le président François Hollande avait annoncé cette réforme devant le Congrès le 16 novembre, trois jours après les attentats de Paris. En dépit de signaux contradictoires de l'exécutif, le maintien de cette mesure controversée dans le projet de révision constitutionnelle a été annoncé mercredi à l'issue du conseil des ministres.

Tout un pan de la gauche a aussitôt exprimé son sentiment de trahison face à cette possibilité de déchoir de leur nationalité française les binationaux condamnés pour des actes de terrorisme.

Dimanche, c'est l'ex-ministre et député PS Benoît Hamon, porte-voix de l'aile gauche du parti, qui a annoncé son intention de voter contre cette proposition "Cela va bien au-delà du débat droite-gauche", a-t-il estimé. "C'est une question de valeur et de conscience. Ma conscience m'indique que nous cédons sur l'essentiel".



Il s'est aussi attaqué aux "mots toujours extrêmement agressifs de Manuel Valls", "qui s'égare quand on reprend les propositions du Front national pour les inscrire dans la Constitution".

"Cette décision va provoquer un schisme dans le peuple de gauche mais aussi dans la communauté nationale", a-t-il prédit. Une analyse partagée par le conseiller régional socialiste d'Ile  de France Julien Dray, considéré comme proche de François Hollande, qui a également souligné "le risque d'une rupture avec la gauche militante".



"La France a mieux à faire que de se quereller sur une mesure dont tout le monde sait qu'elle n'est d'aucune efficacité, même symbolique, contre le terrorisme", a ajouté le fondateur de SOS-Racisme.

Valls déterminé à aller "jusqu'au bout"

Le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis a pour sa part brillé par son silence. Selon un de ses proches, "il s'est opposé à la déchéance de nationalité jusqu'au bout" mais n'a pas pris publiquement position "pour ne pas affaiblir le président".

L'ex-patronne du parti Martine Aubry a elle tonné contre "une remise en cause du droit du sol" qui jette "la suspicion sur un grand nombre de Français" et s'inspire d'"une idée portée depuis longtemps par le Front national".



Malgré cette levée de boucliers dans son propre camp, le chef du gouvernement a affirmé sa "détermination totale" à aller "jusqu'au bout".

La droite pour sa part reste dans l'embarras. Le chef de file des députés Les Républicains, Christian Jacob, a ainsi refusé dimanche de dire s'il voterait le texte, même s'il est d'accord "sur le principe".

"Au début de l'année, nous allons faire le point avec nos deux groupes de travail, à l'Assemblée et au Sénat, regarder de près cette réforme constitutionnelle et regarder comment les débats vont évoluer [...] C'est à l'arrivée que nous dirons si nous votons ou pas", a-t-il dit.

La réforme, qui sera présentée le 3 février à l'Assemblée nationale, doit être adoptée par les deux chambres séparément, puis par une majorité des trois cinquièmes au parlement réuni en Congrès à Versailles.

François Hollande semble parier sur le soutien de l'opposition pour la faire adopter. Les Républicains et l'UDI représentent 415 parlementaires sur un total de 925. Sans eux, impossible d'atteindre la majorité des 3/5e (555 voix, si tous les votes sont exprimés). En revanche, avec le renfort de la droite, sa réforme passerait même si l'ensemble des écologistes, des communistes et apparentés et près de 80 socialistes sur 397 votaient contre.
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