Sylvains-lès-Moulins dans l’Eure, 1350 habitants et un espace santé qui héberge neuf praticiens… Un modèle de réussite qui s'impose dans la lutte contre les déserts médicaux grâce à la complémentarité des disciplines exercées.
L’espace santé Bersim a ouvert il y a quatorze ans à l'initiative de deux orthophonistes. Aujourd’hui l’une d’elle est partie, mais ce sont désormais neuf praticiens qui y exercent onze disciplines. Psychologie, diététique, psychomotricité ou encore ostéopathie au sein de la même structure, une force pour les praticiens.
Des pratiques complémentaires
« On a réalisé que la prise en charge orthophonique n’était pas suffisante pour aider un enfant et on avait l’expérience de travailler en équipe avec des psychologues, psychomotriciens, ergothérapeutes, etc, donc on a eu envie d’élargir nos possibilités de travail », explique Valérie Simon, orthophoniste, co-fondatrice de l’espace santé privé.
Dans le cas d’un enfant souffrant de dyslexie dysorthographique par exemple, au-delà d’une prise en charge orthophonique, des consultations avec un ergothérapeute et un psychologue sont préconisées. Et si le premier rendez-vous peut être difficile à obtenir, une fois le premier bilan établi, les séances s’enchaînent. « Mon fils Timéo a été sur liste d’attente pendant deux ans. Mais une fois le diagnostic posé, on a pu avoir rapidement des rendez-vous avec les autres spécialistes », confie Géraldine, maman d’un enfant souffrant d’un trouble du langage. « Il n’y a qu’un lieu de consultation et Timéo le dit lui-même « c’est comme une famille ». Ça l’a beaucoup aidé », se réjouit la maman.
Un tremplin pour les praticiens qui débutent en libéral
Les patients s’y retrouvent, et les praticiens qui débutent également. Originaire d’Évreux, Guillaume Radigue démarre son activité de massothérapeute à l’espace santé cette semaine et a eu le coup de cœur pour le cadre atypique. « C’est suffisamment calme pour permettre au patient d’être détendu dans un environnement assez paisible », s’enthousiasme-t-il. Et la proximité avec les autres spécialistes est bien sûr un atout majeur. « Si un psychologue ou un sophrologue juge que son patient souffre de tensions musculaires que je pourrais soulager, il peut alors l’orienter vers moi ».
Stéphane Labautière est sophrologue et habite à cinq kilomètres du centre de santé. Il dispose d’un cabinet à deux pas de chez lui, qu’il loue à la journée, une opportunité rare. « J’exerce mon activité de manière digitale en proposant des offres de contenus à travers mon site internet : des séances téléchargeables, des accompagnements à distance mais j’ai aussi une activité sur le terrain au cabinet », explique le jeune thérapeute.
Des patients qui n’auraient probablement pas consulté
Un service de proximité pour les habitants de Sylvains-Lès-Moulins et les villages voisins, qui n’auraient probablement pas consulté sans la présence de ce centre de santé à quelques kilomètres de leur domicile. Joy, médecin urgentiste, habite Grossœuvre et a découvert le cabinet grâce au bouche à oreille. « C’est plus proche qu’Évreux et il y a moins de circulation. Rien que pour se garer c’est un peu plus pratique » observe la jeune maman.
Selon elle, la présence d’une consultante en lactation à proximité de chez elle a été salvateur après la naissance de Charlotte il y a quatre mois. « Quand on sort de la maternité avec un premier enfant, c’est dur, on perd ses repères et il faut un peu s’accrocher », confie la jeune maman, « du coup c’est bien d’avoir quelqu’un qui soutient, qui aide pour continuer l’allaitement à la maison ».
D’après l’association des consultants en lactation, quatre consultantes certifiées IBCLC exercent dans l’Eure pour un département qui compte un peu plus de 600 000 habitants. A titre de comparaison, la ville de Paris dispose de vingt-neuf consultantes certifiées pour un peu plus de deux millions d’habitants.
Afin de compléter son offre de soins, la structure ambitionne d’accueillir un médecin généraliste. Le cabinet le plus proche se trouve à Damville, à six kilomètres de Sylvains-Lès-Moulins. D’un cabinet de quatre médecins à l’origine, il n’en reste aujourd’hui qu’un seul en activité… Avec deux semaines d’attente pour obtenir un rendez-vous.