A Nonancourt (Eure), Marius Simon tient une boutique d'antiquités familiale. Un métier qu'il exerce avec passion et minutie, et qui lui a valu de recevoir le Prix Marcus du Jeune marchand, acteur du patrimoine, des mains de Stéphane Bern. Découverte.
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Aujourd'hui, direction Nonancourt (Eure). Située à l'extrême sud du département, la commune de 2 200 habitants n'est qu'à quelques kilomètres de Dreux. Marius Simon, 28 ans, y tient depuis quatre ans un magasin d'antiquités. Intimement liée à l'histoire de sa famille, la boutique regorge de trésors.
Après un peu plus d'une heure de route, me voilà à Nonancourt. Devant la façade des Antiquités Simon, une boutique tenue par Marius, son frère Gilles et leur père, lui aussi antiquaire.
Une fois la porte ouverte, je me trouve face à une véritable caverne d'Ali Baba. Au rez-de-chaussée, des cartes postales anciennes, de la vaisselle d'exception, de grands miroirs et un nombre incalculable de bibelots. Le coin du père, qui tient la structure depuis 35 ans. Gilles, lui, a opté pour des tapisseries monumentales, des meubles imposants, ambiance château. Il faut avoir de la place, mais les collectionneurs s'en donnent à cœur joie.
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Chasse aux trésors
C'est au premier étage que Marius m'emmène. Il avoue préférer les petits objets d'époque, les sculptures et les meubles plus délicats. J'ai envie de tout regarder, de tout toucher, passionnée de brocante oblige. Les vieux objets racontent une histoire.
Marius me montre un petit meuble art nouveau signé Louis Majorelle, l'ébéniste de l'École de Nancy. Il y a quelques grands noms. Mais aussi des vases purement décoratifs, non signés. Des chinoiseries en pagaille, dans leur définition la plus pure. Des chryséléphantines, ces petites sculptures en bronze "avec des détails sculptés en ivoire".
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Et puis, et je serais bien incapable de resituer les objets dans leur époque, des chaises sculptées, une boîte à cigares, une représentation de Napoléon Ier juste avant la bataille d'Austerlitz ou encore des buffets du 19e siècle avec de remarquables marqueteries, des "marqueteries Boulle", héritées de Louis XIV et pérennisées à travers les siècles, précise Marius.
Mêler sens du commerce et connaissances artistiques pointues
Cette passion, Marius l'a héritée de sa famille. Mais il aurait pu caresser une toute autre carrière en parallèle de ses études d'histoire de l'art, m'explique-t-il. "Quand j'étais plus jeune, le métier de commissaire-priseur m'intéressait. Mais finalement, ce qui me plaît le plus, c'est d'acheter et de revendre... Donc de faire le métier d'antiquaire à proprement parler".
On met en jeu nos connaissances en essayant de trouver la valeur la plus juste d'un objet selon son époque, ses matériaux, les signatures - certaines peuvent être difficiles à déchiffrer, d'autres sont des logos ou des monogrammes. Il faut réussir à valoriser l'objet, l'expliquer, être dans un prix cohérent. C'est ça qui fait notre métier.
Marius Simonà France 3 Normandie
Pour se fournir, Marius passe par les rassemblements entre antiquaires, mais aussi par les collections de particuliers ou les successions. Tout l'enjeu est de se constituer un stock suffisant pour se lancer. Et le sien est impressionnant !
"Je pense qu'il faut être curieux, on peut apprendre de nouvelles choses quotidiennement. Il faut être courageux, parce que ça demande de chiner énormément", relève le commerçant. "Il faut oser parce que chaque achat qu'on fait, c'est un investissement ; ça peut être un mauvais ou un bon achat. Il faut se lancer et acheter ce qui nous plaît pour pouvoir se constituer un beau stock."
De la place pour la jeunesse
Mais quid de la demande, quand certains trésors chiffrent parfois à plusieurs milliers d'euros ? "Il y a des collectionneurs", m'affirme-t-il. "Quand je parle à des collègues plus âgés, c'est vrai qu'ils ont connu des périodes beaucoup plus prospères il y a 20 ou 30 ans. Le marché a changé, il a fallu s'adapter, des choses ont pris de la valeur, d'autres en ont perdu, mais c'est tout à fait jouable si on fait ça quotidiennement avec la même passion."
Quand on voit quelque chose, on n'a jamais vraiment compris dans ce métier. Il faut essayer de chercher les petites subtilités.
Marius Simonà France 3 Normandie
La passion, c'est donc la clé pour parvenir à s'insérer dans un métier où chaque jour diffère du précédent. Un métier où les jeunes, s'ils sont moins nombreux, ont encore leur place : "C'est assez rare d'être jeune et antiquaire, mais on a une opportunité, parce qu’on maîtrise peut-être mieux des nouvelles technologies, des nouveaux marchés", analyse-t-il.
"Ça peut sembler difficile parce qu’il faut se constituer un bon stock de départ, avec une mise de départ parfois assez importante, il faut une structure, des locaux, c'est un peu long pour se lancer. Mais c'est possible. Il faut être passionné, courageux et curieux !"
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Preuve en est que les jeunes ont toute leur place dans le métier : après une participation à l'émission Affaire conclue sur France 2, Marius Simon peut désormais ajouter un beau prix à son palmarès : le prix Marcus du Jeune marchand, acteur du patrimoine, "parce qu’un antiquaire est ancré dans le patrimoine, il le manipule chaque jour et le valorise".
Celui-ci lui a été remis il y a deux mois par Stéphane Bern, parrain de l'opération. Carton plein !