La CGT pose la question de la sous-traitance

Une pratique de plus en plus développée et devenue à risque selon le syndicat.

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C'est pourquoi la CGT réclame un "statut social de haut niveau" pour les 35 000 salariés de la sous-traitance du nucléaire.

Demande réitérée ce jeudi 22 septembre lors d'une journée nationale d'action avec pétition à l'appui remise à Eric Besson, ministre de l’Industrie.

"Environ 80% de la maintenance des centrales nucléaires est sous-traitée. A la fin des années 80, on était à 20%. La sûreté n'est plus entre les mains" des grands industriels du nucléaire, regrette Michel Lailler, membre CGT du Haut comité pour l'information sur la sécurité nucléaire.

En juin une mission parlementaire avait prôné "une limitation de la sous-traitance en cascade (...) potentiellement dommageable à la sûreté des installations".

EDF qui affiche 60% de sous-traitance a promis depuis de "réaffirmer" sa volonté de la limiter à trois niveaux.

Areva qui vient de faire appel d'une décision de justice lui interdisant d'externaliser la production d'énergie de son usine de la Hague, a aussi promis de "mieux encadrer" la sous-traitance.

En attendant, "on se retrouve avec des agents EDF sans connaissance du terrain qui envoient les sous-traitants sur une intervention sans savoir qu'il faut éviter telle ou telle vanne", affirme Philippe Page, délégué CGT à la centrale de Flamanville.


Dans cette centrale, selon lui "il n'y a plus qu'une vingtaine d'ouvriers, contre 150 il y a 10 ans" et les proportions sont les mêmes ailleurs, loin des temps où "les ouvriers pouvaient progresser petit à petit et devenaient des cadres qui connaissaient bien les circuits".

Les parlementaires ont relevé "dans certains cas extrêmes jusqu'à huit niveaux de sous-traitance" ce qui conduit à "une dilution extrême des responsabilités". En 1999, un ouvrier prestataire est mort à la centrale de Flamanville. Le sous-traitant s'est retrouvé au tribunal en 2010 et a été relaxé.

Pour le député PS Christian Bataille, rapporteur de la mission parlementaire, "les appels d'offre conduisent les donneurs d'ordre à choisir les entreprises les moins chères qui n'ont pas forcément une expérience antérieure satisfaisante".

Le rapport prône de modifier la réglementation européenne qui permet la "prééminence" du "mieux disant" dans les appels d'offre pour le nucléaire.


La CGT de son côté demande à EDF l'embauche de 10 à 12.000 personnes.

En face, le groupe assure avoir gardé la maîtrise de la sûreté. "Tous nos prestataires sont qualifiés par nous-mêmes. Après, on fait des contrôles. On leur demande avec quels prestataires ils travaillent, quelles qualifications ils ont",a déclaré Alain Morvan, le directeur de la centrale de Flamanville.

Le président UMP de l'Opecst (Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques) Claude Birraux rappelle que le recours croissant à la sous-traitance au début des années 90 avait été induit par des erreurs d'agents EDF "affectant gravement la sûreté".

Une main d'oeuvre invisible

Ces 30 000 hommes travaillent pour des sous-traitants de l'atome dans des conditions souvent précaires et subissent 80% de l'irradiation reçue en centrales nucléaires en assurant leur maintenance, selon une enquête menée par l'AFP.

"C'est abominable. Il faut toujours aller vite, prendre des doses infernales.Si vous n'êtes pas content, c'est la porte", raconte Christian Verronneau, 57 ansatteint d'un cancer reconnu - fait rare - d'origine professionnelle par la Sécurité sociale après 30 ans de sous-traitance dans le nucléaire.

Ce salarié en arrêt maladie depuis 2009 après avoir parcouru selon lui 70 000 km par an pour décontaminer les centrales, a lancé en octobre 2010 une procédure en faute inexcusable contre son employeur Endel. 

Robinetiers, électriciens ou décontamineurs, ils sont entre 27 000 et 32 000, à travailler comme lui dans la sous-traitance nucléaire, selon l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).

Parmi eux 10 000 sont "nomades", selon la CGT, et parcourent les 19 centrales de France au gré des arrêts de réacteur pour maintenance.

Si les salariés de la sous-traitance reçoivent 80% de l'irradiation reçue dans les 19 centrales, ils subissent également 70% des accidents du travail, selon la CGT.

Mais les contaminations ne sont pas reconnues comme telles par les employeurs, selon le syndicat.


 "Quand j'ai dit à mon employeur que je voulais déclarer ma contamination comme accident du travail, il m'a rigolé au nez", raconte Dominique Sanson, un soudeur de 53 ans, lui aussi employé chez Endel et contaminé en 2007.

Le tribunal de Rouen dira cependant la semaine prochaine s'il s'agit ou non d'un accident du travail. Le parquet avait requis une condamnation en juin, une première selon la CGT.


Les "doses" ne donnent pas droit au départ anticipé à la retraite. Et selon l'Inserm, les salariés de sous-traitants sont mal suivis médicalement.


Car non seulement beaucoup passent de centrales en centrales mais, même en contrat à durée indéterminée, changent souvent d'employeurs au gré des appels d'offres pour opérations de maintenance.

Avant même toute question de santé, la main d'oeuvre employée par les sous-traitants vit souvent dans des conditions précaires, qui pèsent aussi sur la sûreté des centrales, estime la CGT.

"Chez les sous-traitants, les conditions de travail sont telles qu'il y a un turnover en contradiction avec le temps long de formation nécessaire dans le nucléaire", argumente Philippe Page, délégué CGT à la centrale de Flamanville. Pour lui, "sûreté rime avec sérénité : on travaille pas bien quand on sait pas où on va dormir le soir".


Au fil des employeurs, les salaires peinent à monter. Et beaucoup de "ces travailleurs aussi invisibles que leurs doses" semblent plus préoccupés par la nécessité de "gratter" sur les frais de déplacement, que par leur "dose".


"Nous on est quatre dans la voiture et trois dans le mobil-home pour deux", explique Valentin, 31 ans, installé dans un site peu attrayant de Siouville pour une mission à Flamanville. Selon plusieurs témoignages, certains dorment dans leur voiture.

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