En ce samedi 26 février 2023, jour d'ouverture du Salon international de l'agriculture, tour d'horizon de l'agriculture raisonnée et biologique en Normandie. Alors que le modèle dit durable (à base d'intrants chimiques contrôlés) reste dominant, le bio a du mal à s'imposer.
Agriculture raisonnée : un équilibre entre productivité et environnement
Le terme d'agriculture raisonnée se définit sur le papier comme un équilibre entre la production et le respect de l'environnement. Elle cherche à définir un point de médiation entre la volonté de productivité liée à la modernisation agricole et les contraintes, pourtant nécessaires, d'une agriculture respectueuse des normes environnementales et sanitaires. Attention cependant : il ne s'agit pas d'une agriculture biologique, puisqu'elle s'affranchit librement de certaines contraintes. C'est pourquoi les produits dits "raisonnés" ne peuvent pas prétendre au sigle et à l’adjectif "biologiques".
Après les différentes révolutions agricoles modernes, l’agriculture durable se présente comme l’agriculture de l’avenir.
L’agriculture durable pour préserver la ressource
L’agriculture intensive, tel qu’elle est pratiquée depuis les années 60, a certes des rendements extraordinaires, mais elle épuise les sols et pollue l’environnement. Pour maintenir le même rendement, il faut toujours augmenter les quantités d’intrants (eau, matériel, pesticides et fertilisants). La prise de conscience récente des limites des ressources naturelles et de la pollution des sols, de l'air et de l'eau, pousse vers une nouvelle agriculture, l’agriculture durable, qui continue d'utiliser des intrants chimiques, mais de manière plus contrôlée.
Le développement durable a pour objectif le développement économique actuel, sans compromettre les ressources et la qualité de l’environnement des générations futures. L’agriculture raisonnée est basée sur les trois piliers du développement durable : écologique, social et économique.
Le bio: des contraintes à surmonter
Aujourd'hui, l'agriculture repose sur ces trois piliers. L'essentiel des exposants du salon international de l'agriculture qui se tient chaque année à Paris affiche ce mode de production.
Néanmoins, de plus en plus d'exploitants tentent de se reconvertir dans l'agriculture biologique.
C'est le cas de David Léger, exploitant en Seine Maritime. Ancien agent commercial dans le secteur bancaire, il reprend l'exploitation familiale en 2011 et la converti progressivement au bio. Aujourd'hui, il fait un peu de céréales, de la luzerne mais aussi du lin et depuis peu du chanvre pour diversifier sa production. Néanmoins, son coeur de production est la vache allaitante pour de la vente directe à la ferme.
"Il y a de moins en moins de cheptel, de moins en moins de viande sur le marché mais la demande reste forte. La viande se vend donc à bon prix, c'est ce qui me permet de faire vivre mon exploitation. J'ai mes clients, je maîtrise mes prix, ma commercialisation" explique David Léger qui fait aussi des oeufs bio. Cela représente un tiers de sa production, cela l'aide aussi à faire face à son endettement. Mais il s'interroge sur le renouvellement de son poulailler qui doit intervenir au printemps.
L'oeuf est en crise à cause du non respect de la loi "Egalim 2" qui oblige la grande distribution à s'adapter aux coûts de production qui ont flambé à cause de l'augmentation des charges. A cela s'ajoute la difficulté de trouver des poulettes pour renouveler tous les ans le poulailler à cause de la grippe aviaire. En 2022, aucun poulailler bio en France n'a été rentable.
David Léger, producteur et éleveur bio en Seine-Maritime
En appui, le réseau des Chambres d’agriculture, acteur régional, départemental et national de la bio, s’implique dans le développement d’une agriculture biologique rentable et créatrice d’emplois.
Elles participent activement à l’amélioration de la performance des exploitations en AB, accompagnent la structuration des filières bio et le développement de la recherche dans le but de produire des solutions techniques et des repères technico-économiques aux agriculteurs.
La Normandie: 9e région de France en matière de production biologique
La Normandie compte bientôt 2 200 fermes bio pour 53 255 en France.
Tout comme à l’échelle nationale, le développement de l’agriculture biologique se poursuit en Normandie. Fin 2020, la région comptait 2 188 exploitations agricoles bio (+ 9 % / 2019) pour une surface totale engagée en bio (certifiée bio et en conversion) de 123 387 ha dont 26 527 ha en conversion.
Dans l'ex Basse-Normandie, le fourrage représente 60 à 70 % de la surface bio, cela concerne essentiellement les vaches laitières et à viande indique Etienne Legrand, producteur laitier dans la Manche et président de la commission bio de la Chambre régional d'agriculture de Normandie.
La Normandie est la 9e région française, sur 13 régions métropolitaines, par le nombre d’exploitations conduites selon le mode de production biologique. La taille moyenne de ces exploitations est de 56 hectares.
Entre 2019 et 2020, les surfaces totales engagées en bio progressent de 12 % dans la région, tout comme les surfaces certifiées bio. Les surfaces en conversion (toutes années de conversion confondues) progressent de 9 %. Fin 2020, la part de SAU consacrée à l’AB atteint 6,3 % de la SAU normande (contre 5,6 % fin 2019), ce qui place la Normandie à la 10e place sur 13 régions métropolitaines.
Il y a quelques années, le développement de la bio était à deux chiffres. Aujourd'hui, on subi le contre-coup de l'inflation avec un arrêt net de la consommation des produits alimentaires bio. L'impact est immédiat sur les producteurs, en particulier ceux installés depuis peu dont les investissements ne sont pas encore rentabilisés. Certains pensent même à se reconvertir dans la production conventionnelle.
Etienne Legrand, éleveur laitier bio et président de la commission bio de la chambre régionale d'agriculture de Normandie
Salon international de l'agriculture: un espace Bio
Pour tenter d'apporter des réponses dans un contexte défavorable, les Chambres d'agriculture, en tant que membre fondateur de l'Agence Bio, seront présentes sur l'Espace Bio tout au long du salon. Elles présenteront ainsi les actions de développement proposées par 250 conseillers intervenants sur l'AB.
seront ainsi abordés:
- l'accompagnement des agriculteurs conventionnels vers une diversification bio,
- la diffusion de pratiques bio et alternatives performantes,
- l'appui technique aux producteurs bio,
- l'élaboration de références technico-économiques sur les productions bio
- la formation, l'expérimentation pour une production toujours plus respectueuse de l'environnement et un élevage plus soucieux du traitement réservé aux animaux
L'opinion contre la souffrance animale des élevages intensifs
Selon l'association 30 millions d'amis, le système actuel, centré sur l’élevage intensif, est une grande source de souffrance animale. C’est pourquoi, la prise en compte du bien-être des animaux de ferme, en tant qu’être vivants et sensibles, suppose des changements radicaux.
Un souhait partagé par une très grande majorité de Français, comme en témoignent les résultats sans appel du dernier baromètre « Les Français et le bien-être des animaux », mené par la Fondation 30 Millions d’Amis et l’Ifop*. Et pour cause, 83 % des sondés sont favorables à l’interdiction pure et simple de l’élevage intensif.
S’il est un domaine où les animaux d’élevage souffrent particulièrement, c’est durant les transports interminables et stressants qu’ils subissent. Plus de 9 Français sur 10 (91 %) l’ont compris et demandent l’interdiction des transports d’animaux d’élevage vivants.
Dans cette lignée, 83 % des personnes interrogées estiment que les animaux de boucherie devraient être abattus par des professionnels, sur leur lieu d’élevage plutôt que dans les abattoirs, synonymes de douleurs et de cadences infernales.
9 Français sur 10 se disent également favorables à la généralisation de la vidéosurveillance dans les abattoirs. Enfin, 84 % des sondés adhèrent à l’idée selon laquelle « la pratique consistant à abattre des animaux en pleine conscience est inacceptable, quelles que soient les circonstances ». Autrement dit, nos concitoyens sont très clairement opposés aux dérogations liées à l’abattage dit « rituel ».
La Fondation 30 Millions d’Amis demande donc aux décideurs publics de prendre en compte l’avis de nos concitoyens et de repenser le modèle industrialisé actuel, au profit d’un système plus éthique, respectueux du bien-être animal.