Affaire Karachi : Qu'est-ce que la Cour de justice de la République à Paris où est jugé Edouard Balladur ?

Edouard Balladur et François Léotard font face, ce mardi, à cette Cour de justice. Ils sont soupçonnés d’avoir participé à un système de financement occulte qui pourrait être à l’origine de l’attentat de Karachi qui a tué 11 ouvriers de la société navale de Cherbourg en 2002.

C’est un premier jour de procès très attendu par les familles des victimes tuées ou blessées lors de l’attentat de Karachi (Pakistan) perpétré en mai 2002. Cet attentat avait coûté la vie à 14 personnes dont 11 salariés de la direction des constructions navales (DCN) de Cherbourg (Manche). Ce mardi 19 janvier 2021, l’ancien Premier ministre, Edouard Balladur et son ministre de la Défense, François Léotard, font face à la justice. Ils sont soupçonnés d’avoir participé à un système de financement occulte pour la campagne présidentielle de 1995. Un système qui pourrait être à l’origine de l’attentat et donc de la mort des 11 ouvriers de la société navale.

Ils comparaissent, tous deux, pour "complicité d'abus de biens sociaux" et, pour l'ancien chef de gouvernement, pour "recel" de ce délit face à la Cour de justice de la République. Le procès se clôturera le 11 février prochain.

Pourquoi Balladur et Léotard sont-ils jugés par cette Cour ?

"Il veut faire face à ses juges et répondre à leurs questions", a assuré à l’AFP Félix de Belloy, avocat de Balladur. L’ancien premier ministre s’est présenté à son procès ce mardi. François Léotard, 78 ans, qui a un temps fait savoir qu'il était malade, est finalement venu "se défendre lui-même", ont indiqué des sources judiciaires.

Ces deux anciens ministres font face à une juridiction particulière : la Cour de justice de la République (CJR), seule instance judiciaire habilitée à juger les membres du gouvernement pour des infractions commises pendant leur mandat. Créée en 1993, cette juridiction mi-judiciaire, mi-politique est composée de trois magistrats et de douze parlementaires. Cette Cour est toutefois très critiquée pour la lenteur de ses procédures et la clémence de ses arrêts. En 2012, François Hollande s’était même engagé à la faire disparaître, en vain.

Ce mardi, la Cour se réunit pour la huitième fois seulement en vingt-huit ans d'existence. Au total, elle a prononcé trois relaxes, deux dispenses de peine et trois condamnations à du sursis. Sur les 1.732 plaintes reçues par la CJR depuis 1993, 48 d'entre elles ont abouti à une saisine de la commission d'instruction.

Que peut-on en attendre de ce procès mené par la CJR ?

Aujourd’hui et jusqu’au 11 février, les deux anciens ministres sont jugés sur le volet financier de l’affaire Karachi, pour des soupçons de financement occulte de la campagne présidentielle de 1995 à laquelle se présentait Edouard Balladur. La justice va devoir trancher si oui ou non il y a eu financement occulte et malversation il y 25 ans.

En juin dernier, le tribunal correctionnel de Paris avait sanctionné les anciens proches du premier ministre - qui ont fait appel - pour leur rôle dans ce système de commissions occultes sur des contrats d'armement avec l'Arabie saoudite et le Pakistan.

Cet éclatement des procédures fait également partie des critiques faites à la CJR : ses décisions, rendues par vote à bulletins secrets, ne sont ainsi pas susceptibles d'appel et les plaignants ne peuvent se constituer partie civile.

La cour de justice de la république ne nous autorise pas à participer au débat. C’est une juridiction fermée et cloisonnée

Gilles Sanson, mécanicien de la DCN Cherbourg, présent lors de l’attentat de Karachi

"On voit Edouard Balladur qui à 91 ans, François Léotard, qui en a 80 ans et on se demande si ces gens-là ne partiront pas sans que la justice ne passe. Il y a cette volonté de tuer les affaires en les laissant à cette Cour de justice", déplore Gilles Sanson. Même son de cloche du côté d'Olivier Morice, avocat de familles de victimes de l’attentat de Karachi : "Ce qui est surprenant c’est que malgré les promessses, cette CJR existe toujours aujurd’hui. On est légitimement en droit de se demander si ce n’est pas pour rendre des décisions qui soient clémentes et plus favorables pour les ministres quand ils sont renvoyés". L’issue du procès est attendue le 11 février prochain.

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