Environnement. La Cour des comptes préconise de réduire le nombre de bovins dans les cheptels : un coup dur pour les agriculteurs

Trois jours après les recommandations de la Cour des comptes de réduire les cheptels bovins pour respecter les engagements climatiques de la France, les éleveurs normands réagissent. Cette annonce est un coup dur pour eux. Ils s'inquiètent des retombées pour leur activité.

"Elles seraient beaucoup moins polluantes si elles étaient enfermées en permanence toute l’année, si on pouvait récupérer tous les effluents d’élevage", explique Anne-Jeanne, agricultrice à Nehou (Manche). "Pour nous, ça n’a aucun intérêt. Qu’est-ce qu’on ferait de nos parcelles en herbe ?".

Cette exploitante possède un cheptel de 90 vaches. Son exploitation est classée "bas-carbone", pourtant c’est un fait, ces ruminants émettent du méthane quand ils digèrent. En France, l’élevage bovin - environ 17 millions de têtes aujourd'hui - pèse pour 11,8% des émissions de gaz à effet de serre du pays, premier producteur européen de viande bovine et deuxième troupeau laitier derrière l'Allemagne. Car les vaches, en digérant, produisent et rotent du méthane, un gaz au pouvoir très réchauffant.

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Les éleveurs de la Manche s'inquiètent après la recommandation de la Cour des comptes de réduire les cheptels de bovins afin de diminuer les émissions de gaz à effet de serre. ©Marie Lebrun et Pauline Comte - France Télévisions

Face à cette réalité, lundi 22 mai dernier, la Cour des comptes a préconisé dans un rapport de réduire le nombre de vaches dans les cheptels. Une nouvelle recommandation difficile à entendre pour les agriculteurs. "Je veux bien me conformer à ce qu’on me demandera (...). Je n’oublie pas en premier lieu que je suis entrepreneure. Quand on est une exploitante agricole, aujourd’hui, on est soumis à tellement de règlementation, on a tellement d’obligations et on est des entreprises à part entière, il faut qu’économiquement ce soit viable", souligne Anne-Jeanne.

En Normandie, déjà moins de bovins et d'éleveurs

En Normandie, le nombre de bovins diminue déjà. En raison du manque d'attractivité économique de l'élevage, la Manche a perdu en quatre ans près de 200 000 bêtes. "On ne s’attendait à ce types d’annonces alors que déjà en Normandie on a une baisse du nombre de bovins", réagit Anne-Marie Denis, éleveuse à Flers (61) et présidente de la Fédération régionale des syndicats d’exploitation de (FRSEA) en Normandie.

La consommation, c’est vrai, baisse mais on a quand même une baisse de 9% de bovins pour une baisse de la consommation de 4 ou 5% donc ça n’est pas en équivalence et il y a d’autres méthodes.

Anne-Marie Denis

France 3 Normandie

"Déjà, naturellement, le nombre d’agriculteurs diminuent, la profession est relativement difficile, plus particulièrement l’élevage. Donc ça peut décourager certains futurs jeunes agriculteurs.(...) Il ne faudrait pas qu’on leur casse cette envie de travailler, d’être passionné", poursuit la présidente de la FRSEA en Normandie.

L'annonce de la Cour des comptes est incompréhensible pour certains. Selon les agriculteurs, les vaches qui passent plus de la moitié de l’année dans les pâtures ont des vertus écologiques  "Les vaches ont un rôle important dans l’écosystème et le maintien de cette biodiversité. Si on supprime les prairies on aura des conséquences sur la qualité de l’eau, sur la baisse de la biodiversité. Donc les bovins ont une fonction essentielle économique mais aussi écologique", souligne Marc Lecoustey¸ secrétaire général de la Chambre d'Agriculture de la Manche.

La Cour des comptes "loin de la réalité"

Pour Anne-Marie Denis, "la cour des comptes dans son orientation est une instance qui est très loin de la réalité du territoire."

Elle ne s’est pas rendue compte que déjà au niveau de l’évolution des GES, les agriculteurs ont commencé à travailler, dans leur mode de production, tant sur les cultures que sur l’élevage. On propose une évolution sur les modes d’alimentation de nos bovins. Il y a déjà des recherches de faites.

Anne-Marie Denis, éleveuse à Flers

France 3 Normandie

Les professionnels de l'élevage comptent beaucoup sur l'innovation (notamment des additifs alimentaires qui limitent la production de méthane par les vaches) pour alléger le bilan carbone de la viande rouge et du lait. Mais selon les experts, cela ne dispensera pas d'une baisse de la taille du cheptel.

Pour le moment, le gouvernement n’a fixé aucun objectif de baisse de cheptel. Mais si la France veut respecter ses engagements en matière d’émissions de méthane d’ici 2030, des changements vont devoir s’opérer, reste à savoir lequels. 

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