EDF a promis vendredi un "sursaut" de la filière industrielle nucléaire, avec un plan d'amélioration qui doit tirer les leçons des déboires de l'EPR de Flamanville
et mettre le secteur en ordre de bataille pour lancer de nouveaux chantiers.
L'annonce de ce plan de 100 millions d'euros pour 2020-2021 n'est pas une surprise. C'était une demande de l'Etat.
Mais alors que l'EPR de Flamanville peine toujours à entrer en service, EDF montre clairement là qu'il ne compte pas faire marche arrière dans le processus.
La mise en oeuvre de ce plan, baptisé "excell", sera supervisée par un "délégué général à la qualité industrielle et aux compétences", qui rendra directement compte au PDG d'EDF, Jean-Bernard Lévy.
"Cette personne sera recrutée dans l'industrie française mais pas dans le nucléaire, car nous devons nous remettre en cause en tirant profit des meilleures pratiques d'autres industries", a indiqué Jean-Bernard Lévy lors d'une conférence de presse.
Le plan d'amélioration a pour vocation de renforcer la qualité industrielle, les compétences et la gouvernance des grands projets nucléaires.
"C'est un plan qui cherche à mettre en oeuvre tous les moyens pour corriger les dysfonctionnements que nous avons constatés, notamment sur le chantier de Flamanville, et pour retrouver le niveau de qualité, de rigueur et d'excellence que nous avons connu au moment de la construction du parc", a souligné Jean-Bernard Lévy.
La filière nucléaire française connait des temps difficiles
"La filière nucléaire française connaît des temps difficiles", a-t-il admis. "Aujourd'hui il nous faut lancer le sursaut".
La présentation du plan fait suite à un rapport d'audit de l'ex-patron du constructeur automobile PSA Jean-Martin Folz sur le chantier du réacteur EPR de Flamanville dans la Manche.
Remis fin octobre au gouvernement, il dressait un tableau sans concession de cet "échec pour EDF".
Lancée en 2006 et devant initialement entrer en service en 2012 pour un coût de 3,3 milliards d'euros, la construction du premier réacteur français de troisième génération a multiplié les déboires.
Son démarrage est désormais prévu fin 2022et son coût a été réévalué à 12,4 milliards d'euros.
"Redonner confiance"
Le gouvernement avait dans la foulée exigé un plan d'action pour remettre la filière d'aplomb, alors que la France envisage la construction de nouveaux EPR à l'avenir.Il a demandé à EDF tous les éléments pour avoir les cartes en main à la mi-2021 afin de se décider, tout en prévenant qu'aucun nouvel EPR ne serait construit avant la mise en route de celui de Flamanville.
"Nous avons à créer les conditions d'un renouveau du nucléaire français, nous avons à redonner confiance à l'Etat pour le jour où il aura à décider de relancer la construction de nouvelles centrales nucléaires", a ainsi reconnu M. Lévy.
Le plan doit s'appliquer non seulement au chantier de Flamanville mais aussi à celui en cours pour deux EPR à Hinkley Point C en Angleterre, à d'éventuelles nouvelles constructions comme au parc existant.
Qualification des procédés de fabrication (de certaines pièces) et des outils de traçabilité renforcés
Pour améliorer la qualité industrielle, EDF veut notamment mieux associer, sélectionner et contrôler ses fournisseurs. Une "qualification des procédés de fabrication (de certaines pièces) et des outils de traçabilité renforcés" seront aussi mis en oeuvre pour les opérations les plus sensibles.
EDF, qui a récupéré avec sa filiale Framatome les activités réacteurs issues de l'ancien Areva, veut ainsi jouer son rôle de "chef de file" de l'ensemble de la filière française.
Un effort sur le recrutement et la formation
Du côté des compétences, il y aura par exemple un effort pour le recrutement et la formation de soudeurs, alors que les derniers problèmes de Flamanville proviennent justement de soudures défectueuses.
Enfin, concernant la gouvernance des grands projets, le PDG d'EDF "présidera un comité stratégique chargé de valider les données initiales du projet, de définir ses objectifs, ses coûts et ses délais, d'en valider les engagements financiers et d'approuver les principaux contrats".