Passé le 30 septembre, Bretons et Normands devront disposer d'une licence pour pêcher dans les eaux de l'île anglo-normande. Le bras de fer se durcit entre la France et le Royaume-Uni. Mais localement, certains plaident pour un dialogue.
A l'approche de la date butoir, le bras de fer se durcit. Le weekend dernier, une centaine de pêcheurs s'étaient réunis sur la plage de Pirou dans la Manche, d'où part le cable de 90 000 volts alimentant Jersey en électricité. Les licences provisoires accordées à deux reprises aux pêcheurs normands et bretons par l'île anglo-normande arrivent à leur terme le 30 septembre et nul ne sait s'il pourra poursuivre son activité au-delà.
Ce jeudi, le ministère de la mer a annoncé officiellement avoir demandé 169 licences de pêche définitives et avoir envoyé aux autorités d'Outre-Manche "tous les justificatifs" nécessaires pour prouver l'historique de 169 bateaux dans les eaux de Jersey. Et attendre désormais que le Royaume-Uni "respecte ses engagements".
Si la France n'obtient pas gain de cause, le ministère de la Mer "demandera à l'Union européenne d'activer les mesures de restrictions" prévues dans l'accord, qui pourraient donner lieu à de nouveaux droits de douanes, ou à des mesures de rétorsion sur des marchés en dehors de la pêche. "Notre riposte sera proportionnée à leur offre", précise l'entourage de la ministre.
Trop de bureaucratie ?
"Entre Jersey et la France, ce sont des échanges depuis 1000 ans. Se chamailler pour des histoires de pêche.... C'était déjà bien géré, bien cadré ! A vouloir tout foutre par terre, on en arrive là", regrettait samedi sernier un pêcheur normand lors de la manifestation sur la plage de Pirou. Un point de vue qui semble partagé par certains acteurs Outre-Manche. Dans les colonnes de nos confrères du Jersey Evening Post, Brian Murphy, du TransManche Development Group, lance un appel à un dialogue direct entre Jersey et les autorités normandes et bretonnes, sans passer par Paris, l'Union Européenne et Londres : "Nombre de pêcheurs ont le plus grand respect pour leurs homologues étrangers et nous détruisons ces relations par un excès de bureaucratie et c'est une grande honte."
Chris Le Masurier, de la Jersey Oyster Company, estime quant à lui que l'île anglo-normande peut tirer parti de la délivrance de ces licences de pêche en demandant des contreparties au ministère de la mer français : accès des bateaux de pêche et de fret jersiais aux ports français pour débarquer, mise en place d'un poste de contrôle frontalier des marchandises à Granville et non pas à Saint-Malo comme aujourd'hui, mais aussi que l'Union européenne reconnaisse la même qualité aux produits pêchés par les Jersiais et Français dans un même secteur. Ce producteur d'huitres, qui exporte chaque année 1000 tonnes vers le continent, plaide même pour un rétablissement du traité de la Baie de Granville en attendant de trouver un nouvel accord.
Si cette perspective semble hautement improbable compte tenu du Brexit, les autorités jersiaises semblent de nouveau prêtes à faire un geste d'apaisement. Selon le Jersesy Evening Post, le ministre de l'Environnement John Young a laissé entendre la semaine dernière que les licences provisoires accordées aux pêcheurs français pourraient de nouveau être prolongées.