Au lendemain des incidents survenus dans le quartier de Perseigne, la candidate du Rassemblement national à l'élection présidentielle a fait un crochet par Alençon pour apporter son soutien aux policiers.
On dit souvent qu'une campagne présidentielle est une course de fond. Elle peut parfois aussi être une course de vitesse. Distancée dans les sondages par un ancien journaliste du Figaro chassant sur ses terres, la candidate du Rassemblement national a, dans l'urgence, organisé ce jeudi un déplacement éclair à Alençon, au lendemain des événements violents survenus dans le quartier de Perseigne.
L'occasion pour Marine Le Pen de décliner devant la presse ses thèmes de prédilection : insécurité et immigration, deux éléments intimement liés pour celle qui brigue la plus haute fonction de l'Etat. "L'immigration est un des éléments essentiels du développement de l'insécurité dans notre pays", assure-t-elle, "L'intégralité des émeutes sont le fait de banlieues immigrées."
Pas de visite de Perseigne à l'agenda
Au programme de ce déplacement, une visite du commissariat d'Alençon pour "apporter mon soutien aux policiers" et une conférence de presse. Pas de visite du quartier de Perseigne en revanche dans l'agenda de la candidate. "Mais je sais ce que disent les habitants", se défend Marine Le Pen, racontant un récent déplacement dans un quartier du Vaucluse, à plusieurs centaines de kilomètres du département de l'Orne.
Attirés par l'attroupement des journalistes, quelques passants viennent prendre une photo ou tendre l'oreille. Ufuk, un habitant de Perseigne, ne peut s'empêcher de l'interpeller. "Moi quand je me réveille le matin, il n'y a pas que des tirs de mortier. Quand ma grand-mère revient des courses, tout le monde vient l'aider", déclare le jeune homme, dépité par l'image renvoyée de son quartier.
Opportunisme ?
Marine Le Pen reste droite dans se bottes et dénonce "un ensauvagement qui est en train de toucher l'ensemble des campagnes et de la ruralité". Aux policiers, elle promet la mise en place d'une "présomption de légitime défense qui leur permettra d'œuvrer sans crainte de la réprobation de leur hiérarchie et de la classe politique." Fustigeant les peines alternatives (bracelet électronique ou travaux d'intérêt général), elle estime que "la prison n'est pas un problème mais la solution". Et balaie d'un revers de la main toute accusation d'opportunisme dans ce déplacement à Alençon : "Ceux qui pensent cela sont psychologiquement des complices de ces délinquants."
Selon notre équipe sur place, la visite du commissariat de police aura duré un quart d'heure. "Ça ne peut ni nous aider, ni nous nuire. Ils (les politiques) sont là. Ils font leur job", estime Stéphane Tristant, secrétaire départemental du syndicat Alliance, "comme nous on doit faire notre job. Et pour ce job, il faut des moyens, des effectifs et un soutien de la justice." Une allusion à peine voilée à l'interview accordée la veille par le procureur de la République d'Alençon au quotidien Ouest-France. Le magistrat s'y montre très critique à l'égard du travail des policiers alençonnais. "Le contrat de confiance est cassé", s'insurge le syndicaliste, "tout ce qu'on demande c'est de ne pas se faire tirer à boulets rouges par un procureur de la République qui est lui même directeur des enquêtes de son parquet."
Ils vont penser quoi à Perseigne ? Ils vont dire que les policiers sont racistes, qu'ils n'aiment pas les jeunes de banlieue ? On se bat contre les amalgames et elle, elle vient tout instrumentaliser.
A quelques mètres du commissariat, une jeune femme peine à cacher son émotion. "On essaye de dire que la police nous protège et là, Marine Le Pen a tout instrumentalisé. Voilà ce qu'on va dire : les flics la reçoivent, les flics sont racistes, les flics n'aiment pas les banlieues. C'est ça que les gens vont retenir. Qu'est ce que vous pensez qu'ils vont croire à Perseigne ? Ils l'ont reçue et ça me fait mal. Je ne voulais pas y croire. Messieurs dames, si ce soir votre voiture brûle, vous pourrez remercier cette dame. Elle souffle sur les braises", se désole-t-elle, au bord des larmes.