Les parents d'élèves d'une école d'Argentan viennent d'apprendre qu'un enfant a été intoxiqué au plomb en mars 2022. La peinture au plomb, présente sur des éléments métalliques de l'établissement, pourrait être en cause. Après enquête, l'ARS ne préconise pas de dépistage collectif des enfants.
"Nous sommes un peu inquiets quand même car ce n’est pas courant. Ma fille a de l’asthme, elle est anémiée, elle a plein de petits soucis qui viennent et je me demande si ce n’est pas lié à ça. Je suis allée voir mon médecin car je l’ai vu se dégrader cette année alors je suis un peu inquiète", raconte une mère dont la fille est scolarisée à l'école maternelle Anne Frank d'Argentan (Orne). "Dommage qu'on ait été prévenu qu'hier", regrette une autre maman dont les deux enfants sont élèves dans cet établissement. Ces questionnements de parents interviennent alors qu'une lettre d'information leur a été adressée par la mairie, lundi 20 juin 2022. Un élève de leur établissement, a été intoxiqué au plomb en mars 2022. Or, après enquête, l'ARS de Normandie a indiqué que du plomb était présent dans des éléments métalliques de l'école tels que les grilles ou des tuyaux tout en indiquant que rien n'assurait que l’enfant n’ait pas été contaminé ailleurs.
Les éléments métalliques concernés ont été protégés, indique Frédéric Leveillé, maire d'Argentan ce mardi matin, afin de les rendre inaccessible aux enfants. "Une entreprise va venir pendant l’été pour intervenir sur ces lieux identifiés, sur les poteaux et tuyaux, pour assurer une sécurisation, poursuit-il. En 2024, ce local n’a plus vocation à être une école. Demain, il y aura une école neuve."
Nous, on souhaite en toute transparence donner l’information aux parents en leur expliquant que s’ils avaient des craintes, ils pouvaient légitimement consulter leur médecin traitant. Mais l’ARS ne nous a pas demandé de mettre en place une systématisation de dépistages éventuels.
Frédéric Leveillé, maire d'ArgentanFrance 3 Normandie.
Qu'est-ce que l'intoxication au plomb et le saturnisme ?
L'intoxication au plomb est le fait d'avoir un taux anormal de plomb dans l’organisme. Le seuil de vigilance est fixé à 25 microgrammes par litre de sang. Le taux de déclaration est, lui, situé à 50 microgrammes par litres de sang. "En Normandie on a décidé d’agir dès le seuil de vigilance. L'enfant, lui, était situé entre 25 et 50 microgrammes", explique le Docteur Benoît Cottrelle, responsable de la veille et de la sécurité sanitaire à l'ARS. C'est ce qui explique le déclenchement de l'enquête environnemental de l'ARS en avril dernier.
Le saturnisme est la pathologie liée à l’intoxication au plomb. Il est mesuré par la plombémie (ou taux de plomb dans le sang). Chez un enfant ou adolescent de moins de 18 ans, on parle de saturnisme lorsque la plombémie est égale ou supérieure à 50 microgrammes par litre de sang. Il faut, pour cela, une exposition prolongée au plomb, précise le Dr. Benoît Cottrelle. L'enfant était dans une situation où il n'avait pas encore atteint ce stade de la pathologie mais dans "une situation qui nécessitait une intervention", précise le Docteur.
Le saturnisme peut avoir des conséquences sur l'organisme, au niveau du système nerveux, de la moëlle osseuse et des reins. Chez le jeune élève de l'école de Anne Franck, "pas de conséquences à ce stade directement visible chez l’enfant. Le risque le plus important est un trouble du développement de l’apprentissage, d’un petit retard de développement. C’est à partir de taux beaucoup plus élevés autour de 250 qu’il faut instaurer un traitement qui vise à éliminer le plomb de cet enfant", estime le Dr. Benoît Cottrelle, qui indique qu'aucun traitement à part une bonne hygiène de vie et une surveillance est nécessaire.
Pourquoi du plomb était-il présent dans l'école ?
Dans le cas de l'établissement scolaire d'Argentan, une interrogation demeure : pourquoi de la peinture au plomb, interdite depuis 1949, était présente dans cette école construite dans les années 1950 ? "Difficile à comprendre, répond le responsable de la veille et de la sécurité sanitaire à l'ARS. Dans le cas d’une autre école c’est la même situation (...) Je pense qu’on a perdu un peu la mémoire des couches successives de peinture qui se sont accumulées sur certains éléments." Le maire d'Argentan non plus ne se l'explique pas. "Peut-être fallait-il écouler les stocks à l'époque?", se demande-t-il.
Estimant qu'il n'y avait pas "lieu de penser que d’autres enfants aient pu se contaminer", l'ARS ne fait pas de préconisation de dépistages pour les autres enfants de l'école.
Après sollicitation d'un certain nombre de parents, la mairie et l’ARS vont organiser une visite de l’école pour notamment répondre à leurs questions.