Les rumeurs des derniers jours se sont donc confirmées, le conseiller regional de Normandie Nicolas Bay a choisi de rallier le parti d’Eric Zemmour. Il a multiplié les déclarations pour expliquer son choix.
Il était le porte-parole de la campagne présidentielle de Marine Le Pen, il sera désormais aux côtés du candidat Eric Zemmour. Le cap est franchi pour l’eurodéputé et désormais ex-membre dirigeant du Rassemblement national. Nicolas Bay a annoncé mercredi 16 février son ralliement à Eric Zemmour en fustigeant les "revirements et reculades" de Marine Le Pen et son "refus de toute forme de débat interne" au parti.
"J'ai décidé de m'engager pleinement aux côtés d'Éric Zemmour dans la campagne présidentielle car je crois profondément dans sa candidature, son projet et sa stratégie", affirme dans Le Figaro l'eurodéputé.
La séparation couvait depuis des semaines. Alors que Nicolas Bay accompagnait la candidate à Madrid fin janvier, il avait refusé de dire s'il serait encore à ses côtés au premier tour, provoquant la colère de Marine Le Pen. Que "ceux qui veulent partir (du RN) partent, mais ils partent maintenant", avait-elle lancé. Ses relations avec Marine Le Pen se sont détériorées depuis l'échec de la présidentielle de 2017, après laquelle il avait tenté d'incarner la relève de Marion Maréchal. Sans le nommer, Marine Le Pen avait mardi "demandé à ceux qui opèrent la stratégie de la limace de bien vouloir accélérer leurs départs (...) parce que la limace est lente mais aussi poisseuse".
Laurent Jacobelli, porte-parole de sa campagne, s'était réjoui mercredi matin que les "fruits pourris tombent" du RN.
Trois autres eurodéputé, Jérôme Rivière, Gilbert Collard et Maxette Pirbakas, ont déjà rejoint le candidat Reconquête!, suivis dimanche par l'unique sénateur RN Stéphane Ravier, ainsi que par plusieurs conseillers régionaux.
Accueilli à bras ouverts
Interrogé mercredi soir dans "C à vous" sur France 5 sur ce possible ralliement, Eric Zemmour indiqué dit qu'il l'accueillerait "les bras ouverts". Le candidat d'extrême droite doit effectuer samedi 19 février 2022 un déplacement à Ardevon face au Mont-Saint-Michel (Manche), terre d'élection de M. Bay où il est conseiller régional.
Les militants du parti Reconquete se réjouissent de l’arrivée de ce visage emblématique du RN :
"Nicolas Bay, c’est moi qui lui ai fait sa carrière"
De son côté Marine Le Pen n’a pas été surprise de cette annonce. Elle était l’invitée de Ruth Elkrief sur LCI. Elle a déclaré au cours de cet entretien : « Nicolas Bay, c’est moi qui lui ai fait sa carrière (…) J’ai appris qu’il préparait son départ depuis 3 semaines. »
De leurs côtés, les militants du Rassemblement National rassemblés à Rouen ce jeudi matin semblaient ne pas regretter le départ de Nicolas Bay : "Je suis déçu mais pas surpris c’était couru d’avance ! Mais je pense que les Français s’en fichent en réalité. Les petites guerres d’égo ça n’intéresse personne. Ce qui intéresse les gens c’est notre programme c’est ce qu’on propose : on a le programme le plus construit, le plus concret et le plus intéressant aussi ! Il n’y a pas de guerre fratricide au sein du parti, cette petite guerre d’égos n’intéresse en réalité que ceux qui en sont responsables !" analysait Bastien HOLINGUE responsable des Jeunes avec Marine pour la région Normandie.
Le RN avait suspendu mardi de ses fonctions l'eurodéputé, le poussant au départ, alors qu'il envisageait de rallier le rival de Marine Le Pen, en l'accusant de "sabotage" pour avoir transmis des "éléments stratégiques" à Eric Zemmour, ce que l'intéressé dément. Nicolas Bay a porté plainte pour diffamation après les accusations d'espionnage. Nicolas Bay avait jugé "grossière" l'accusation de sabotage, en expliquant qu'il ne participait "à aucune instance de la direction de campagne". Juste avant d'être démis de ses fonctions, il avait réclamé une "explication" du parti sur les récents départs.
Nicolas Bay, membre jusqu'à mardi du bureau national (direction) du mouvement, estime dans Le Figaro que "ces dernières années (au RN) ont été rythmées par des mises à l'écart et des ruptures souvent organisées". Il a notamment cité la nièce de Marine Le Pen, Marion Maréchal, qui avait quitté le parti en mai 2017, juste après la présidentielle, et dont il est proche idéologiquement, tenant d'une ligne plus identitaire, plus conservatrice et plus libérale sur le plan économique que Marine le Pen.
"Bûchers"
"Cela traduit un problème de fonctionnement: le refus de toute forme de débat interne (...) l'imperméabilité à la moindre remise en cause, et, in fine, les procès en sorcellerie et les bûchers dressés", développe l'élu conservateur. "Ce mode de fonctionnement stérilise l'action politique, neutralise les énergies, obère nos chances de victoire et est un repoussoir pour d'éventuels partenaires ou alliés", assène-t-il, autant de critiques qui avaient surgi au sein du mouvement après l'échec du RN aux élections régionales en juin 2021. L'ancien secrétaire général du parti (2014-2017) et ancien vice-président (2017-2018) rapporte aussi que "l'appareil s'est délité" avec "à peine plus de 20.000 adhérents" et "deux fois moins d'élus qu'auparavant". Alors que Marine Le Pen l'accuse de "déloyauté", Nicolas Bay explique que la "vraie infidélité" à l'égard des électeurs c'est "renoncer à dénoncer le carcan de la Cour européenne des droits de l'homme, à la sortie de Schengen, à la fin de la binationalité, accepter la PMA sans père". "Ces multiples revirements et reculades ont contribué à démobiliser nos électeurs", estime-t-il. Il critique encore une candidate qui "fait une confusion entre extrémisme et radicalité. Quand notre pays est au bord du gouffre, les mesures à mettre en oeuvre sont forcément radicales".