Le tribunal de Caen a lourdement condamné, ce jeudi 25 janvier 2018, un trio de proxénètes. Une Brésilienne et deux Portugais, un père son fils, qui avaient prostitué pendant près d’un an plusieurs jeunes femmes.
« Nous sommes bien au 21ème siècle et la prostitution ne se déroule plus sur le trottoir mais bien sur internet ». Voilà comment le président du tribunal de Caen décrivait hier soir cette affaire de proxénétisme. En effet, les quatre prévenus présents hier étaient soupçonnés d’avoir monté un réseau de proxénétisme, via internet et des sites de petites annonces, très organisé.
Rappel des faits
Une double enquête a débuté l’été dernier:
- En juillet 2017, police secours est appelé sur les lieux d’un incendie à Saint-Lô (Manche). En arrivant dans l’appartement, les agents découvrent dans une pièce quatre lits séparés par des rideaux, les poubelles de l’appartement sont remplies de préservatifs usagés. Le propriétaire dépose une main courante et une première enquête débute.
- Un mois plus tard, le 4 août 2017, une deuxième procédure est enclenchée suite à un signalement donné par un citoyen caennais. Ce dernier a envoyé une lettre à la police décrivant les allées et venues de plusieurs clients et prostitués.
- Pendant un an, la police a surveillé les activités des quatre suspects sur internet. Elle a également procédé à des surveillances physique ainsi qu'à des enregistrements téléphoniques. L’enquête permet d’identifier clairement les rôles de chacun des quatre protagonistes...
Les quatre suspects
Dans son réquisitoire, la procureure de la République, Emilie Abrantes, a souligné la gravité des faits face à des prévenus « de mauvaise foi » qui ne racontent que des « mensonges » et « nient l’évidence ». Puisqu'elle décrit une traite humaine et un réseau de proxénétisme avec une logistique très travaillée.
50 000 euros dépensés pour des annonces et appâter les clients
C’est une Brésilienne, surnommée Fernanda, et deux Portugais - un père et son fils- surnommés Joachim et Paulo, qui, selon la procureure, étaient bien à l’origine et aux commandes de ce réseau.
Pendant un an, ils ont tour à tour posté près de 95 annonces sur des sites de rencontres pour un coût total de 50 000 euros dans le but d’appâter des clients. Ils préféraient jouer la carte de la discrétion en évitant les hôtels et ont donc loué plusieurs appartements à Caen, Lisieux, Saint-Lô et Cherbourg.
Le réseau de proxénétisme ne fait aucun doute pour la procureure puisque l’enquête démontre que le trio gérait toute « la chaîne » de prostitution ; il postaient les annonces en ligne, géraient les rendez-vous avec les clients, véhiculaient les femmes dans les appartements et ils faisaient même leurs courses.
La procureure décrit également « une grille tarifaire homogène » appliquée dans les quatre villes. Ainsi, la passe était facturée 150 euros l’heure, 100 la demi-heure et 80 euros la minute. Le tarif pouvait changer si le client semblait plus aisé et qu’il portait une cravate par exemple.
On notera également que Joachim et Paulo ont effectué une étude de marché » pour choisir le meilleur emplacement pour l’appartement de Cherbourg afin qu’il ne soit pas trop près d’autres prostituées. Dans une conversation téléphonique interceptée par la police, Fernanda explique «qu’à Lisieux ça marche très bien auprès d’une clientèle âgée » , une de ses « fille s’est [même] fait 10 000 euros en une semaine ».
Le dernier prévenu, rebaptisé Chico, était cantonné à un rôle « d’agent de sécurité » et de protecteur des prostituées. Il est d’ailleurs le petit-ami de l’une des jeunes femmes.
Le Tribunal de Caen s’est donc prononcé ce jeudi soir et a condamné à 4 ans de prison Fernanda et Paulo (le fils), 3 ans d’emprisonnement pour Joachim (le père) et 10 mois de prison ferme contre Chico.
Tous les quatre ont également été condamnés à une interdiction du territoire français pendant 5 ans. Ils ont 10 jours pour faire appel.