Terroir-de-Caux, une intercommunalité de Seine-Maritime, a eu la mauvaise surprise de découvrir de nouvelles marnières sur son territoire, et notamment dans le village du Catelier. La législation en termes de permis de construire a évolué, et la prospection des sols incombe désormais aux communes.
Le plateau cauchois est connu depuis des siècles pour être truffé de marnières. On dénombre aujourd'hui 60 à 80 000 manières en Seine-Maritime, avec une densité dans le pays de Caux de 13 cavités au km2.
Une marnière est le résultat de l'exploitation en souterrain de la marne, craie tendre, qui servait notamment à l'amendement des terres agricoles.
71 marnières pour 270 habitants
Pourtant les habitants de Terroir-de-Caux qui regroupe 79 communes, ne sont pas au bout de leurs surprises. Au Catelier, dans le canton de Longueville-sur-Scie, le maire a recensé 71 suspicions de marnières dans sa commune où vivent 270 personnes.
Un chiffre loin, très loin, du dernier recensement qui en dénombrait seulement 11. "Je viens d'apprendre que je suis maire d'un village qui ne devrait pas exister", commente Hervé Rolland, maire SE du Catelier.
L'étude avait été demandée à la communauté de communes par la préfecture de Seine-maritime, car ce sont les collectivités locales dorénavant qui ont à gérer la prospection des sols de leur territoire. Cet inventaire est obligatoire depuis 2003, et n'avait pas été dressé au Catelier depuis près de 30 ans.
"On ne peut pas vendre"
Le maire du Catelier a donc rendu publique cette récente étude, qui répertorie toutes les zones concernées sur sa commune. Au grand dam de certains habitants, dont les maisons sont implantées au-dessus de ces cavités souterraines supposées.
"On est situés sur la parcelle B520, on voit bien que la suspicion de marnière est bien chez nous, et nous recouvre", nous explique Mélanie Gambé en nous montrant la carte du village, sur laquelle sont signalées les suspicions de marnières.
On a emménagé en juin 2023, notre maison se retrouve au bout d'un an de vie en suspicion de marnière, donc on ne peut pas la vendre ni développer nos projets car il faut faire des forages qui coûtent très cher malgré les subventions. On se retrouve coincés.
Mélanie Gambé, habitante du Catelier en Seine-Maritime
La maison est devenue une charge financière, mais aussi un poids dans la vie de cette famille qui ne peut plus faire de projets.
La bâtisse a été construite au cœur d'une parcelle identifiée, et le principe de précaution retient un périmètre de 60 mètres autour de la cavité suspectée, située pourtant bien au-delà.
La valeur des terrains et des propriétés immobilières va nécessairement être revue à la baisse.
À la mairie, on s'inquiète aussi du nombre de maisons concernées par ces suspicions de marnière, notamment celles qui voisinent avec la Voie romaine, une route départementale sur laquelle passent quotidiennement de nombreux véhicules, camions et tracteurs.
Une situation évolutive
Une suspicion de cavité souterraine n'implique pas forcément l'existence d'une marnière. "Un recensement, c'est identifier les zones de risque, mais ça ne veut pas dire forcément qu'il y a quelque chose. Ça sous-entend, qu'à chaque fois qu'il y a une nouvelle découverte d'informations, votre carte d'exposition aux risques peut changer. Et ça, c'est très dur à accepter et même à gérer pour un maire puisque ça veut dire qu'il a pu faire en toute bonne foi un projet ou un lotissement qui n'était pas exposé, et que ce projet devienne exposé après parce qu'il y a de nouveaux éléments qui ont été retrouvés", s'inquiète le maire de la commune Hervé Rolland.
Cette carte qui recense les potentielles marnières est donc appelée à évoluer. Mais les collectivités ont l'obligation d'effectuer des études géologiques approfondies avant de construire sur des terrains susceptibles d'abriter des marnières.
Le problème étant qu'une marnière reste souvent insoupçonnable, jusqu'à ce qu'elle s'effondre.