Coronavirus : des dispositifs d’urgence en aide aux toxicomanes

456 usagers de drogue sont suivis régulièrement à la Boussole, à Rouen. Quelques-uns viennent encore dans les locaux pour y trouver des soins et surtout, de l’écoute auprès des  soignants.
 

A quelques pas de la Cathédrale de Rouen, La Boussole est le seul centre d’accompagnement encore ouvert depuis le 17 mars, premier jour du confinement décrété par le gouvernement pour faire face à la crise sanitaire de l’épidémie du Covid-19 qui touche de plein fouet les plus précaires, les SDF, marginaux, toxicomanes.
 

Tous les services de soins et d’accompagnement centralisés

Habituellement  quatre centres du CSAPA (Centres de Soins d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie) sont en activité dans l’agglomération de Rouen. Celui de la CAARUD-La Boutik, situé rue Amboise Paré, dans le quartier Pasteur est fermé.

Le centre d’aide aux usagers de drogue en prison, situé à la maison d’arrêt Bonne Nouvelle, lui, reste ouvert.


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Les gestes barrières scrupuleusement respectés

A l’entrée les usagers pénètrent dans les locaux un par un, respectant la distance de sécurité, avec application de gel hydro-alcoolique et prise de température systématique. Ils sont ensuite isolés dans une pièce à part avant d’être ausculté par un médecin.

A l’heure actuelle les équipes de la Boussole, 2 personnes accueillantes, 2 infirmières et 1 médecin généraliste spécialisé en addictologie, sont mobilisés et à pied d’œuvre pour gérer la situation, qui pourrait s’annoncer très critique dans les prochains jours, comme nous le confie le Docteur Véronique Michel :

Nous sommes à flux tendus, nous ne disposons que de très peu de masques, nous attendons prochainement  une  livraison prévue par l’ARS de Normandie, mais nous ne savons pas quand …Et puis il ne faudrait pas qu’un de nos infirmiers tombe malade, sans quoi nous serions vraiment en grande difficulté … 

Pour circuler pendant cette période de confinement, un certificat médical est délivré ainsi qu’une attestation autorisant la possession de leur traitement de substitution (méthadone, subutex…). La délivrance des  médicaments a été prolongée à 28 jours au lieu de 15 jours en temps normal. Ceci afin que les personnes en sevrage poursuivent leur traitement malgré les conditions extrêmement difficiles qu’ils traversent  pendant cette période de confinement.

Le CAARUD, quant à lui fait porte close mais une maraude d’urgence s’est mise en place.

Ce centre d’accueil de jour a une mission de prévention et de réductions des risques auprès des consommateurs de produits licites et illicites (cocaine, héroine, crack, cannabis, alcool, médicaments)… Habituellement 70 personnes consommatrices y viennent chaque jour pour récupérer un kit d’injection stérile afin d’éviter  la transmission du VIH, prendre une douche, laver son linge, boire un café et discuter avec les éducateurs de leurs difficultés.

Pénurie des drogues au marché noir

Et à la crise du Covid 19 s’ajoute la pénurie des drogues disponible au marché noir, les trafics étant ralentis par la fermeture des frontières, notamment celle du Maroc.

Les prix de vente des stupéfiants s’envolent et les dealers n’hésitent pas à doubler le prix de vente de des produits  faisant jouer l’offre et la demande. De plus les dealers qui d’habitude se déplaçaientt auprès des consommateurs, ne bougent plus et seul quelques fours (lieu de deal dans une cité au pied d’un immeuble) sont encore en activité, ce qui oblige les usagers à sortir malgré le confinement. Et sur place les gens font la queue sans aucune distanciation sociale, ni protection.

Une maraude d’urgence

Pour pallier au plus vite le suivi de ces toxicomanes livrés à eux-mêmes, vivant dans des conditions extrêmement précaires (à la rue, dans des squats, sous des tente), une maraude s’est organisée en urgence pour aller au plus près des usagers confinés. Un camion de l’association de la Boussole, avec deux éducateurs, sillonne chaque jour l’agglomération de Rouen depuis jeudi dernier.
 

Gabriel Auzou, directeur du CAARUD joint par téléphone, nous explique  la situation critique à laquelle ils doivent faire face :

Nous faisons face à l’addiction de guerre ! Les usagers sont inquiets, ils ont peur de contracter le virus du Covid-19 et de le transmettre.  Avec nos maraudes on essaie d’être au plus près d’eux, de passer du temps avec eux afin de soulager  au mieux le manque et leurs angoisses.

Il ne cache pas non plus son inquiétude quant à la suite, si le confinement devait durer plus longtemps. :

Nous redoutons des dépressions et des décompensations psychiatriques dans les semaines à venir, la situation est tendu, nous faisons face au jour le jour mais  les stocks de nourriture que nous distribuons également s’épuisent à vue d’œil par manque de ravitaillement des associations de dons alimentaires. 

"Ce qui est formidable dans cette situation, c'est l'entraide"

Gérard Oudergues, Président de la Boussole, est sur le pied de guerre tout comme toute son équipe, sur place et en télétravail. Il veut rester quant à lui optimiste et souligne la grande solidarité des différents acteurs médico- sociaux  sur le terrain :

"Vous savez  ce qui est formidable dans cette situation d’urgence c’est la  solidarité et l’entraide des acteurs médico-sociaux sur le terrain, du public et du privé pour faire face ensemble à cette crise d’une ampleur sanitaire inédite. Par exemple un de nos employés chargé habituellement de l’entretien techniques des appartements thérapeutiques, sans activité depuis le confinement, a décidé de venir en renfort  des équipes de Médecins du Monde et conduit actuellement une de leurs ambulances !"

 
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