Droits d’auteur : que risque Eric Zemmour en utilisant sans accord des images, dont celles de France 3, dans son clip de campagne

Dans un clip de campagne annonçant officiellement sa candidature à l'élection présidentielle de 2022, Eric Zemmour utilise des images diffusées sans l'accord de leur auteur. De quoi faire grincer des dents les ayants droits à l'image.

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Eric Zemmour a officiellement déclaré sa candidature à l’élection présidentielle. Une annonce mise en scène dans une vidéo d’une dizaine de minutes publiée mardi 30 novembre 2021 sur Youtube. Un clip de campagne qui fait grincer des dents les ayants droits à l’image. Le montage contient de nombreuses images d'illustration tirées de films, de personnalités publiques ou encore de reportages diffusées sans l'accord de leur auteur.  

Des images France 3 Normandie de la statue Napoléon

Parmi les images, certaines proviennent de France 3 Normandie, de notre rédaction. De 3 minutes 41 à 3 minutes 44, on y voit des images de notre reportage diffusé en juillet 2020 sur l’enlèvement de la statue Napoléon sur son cheval, située sur la place de l’Hôtel de ville depuis 1865, pour être restaurée. Le maire PS de Rouen  Nicolas Mayer-Rossignol proposait de remplacer Napoléon par une figure féminine.

Un événement local qui avait marqué le candidat à l’élection présidentielle 2022 lors de sa venue au zénith de Rouen. “C’est bien la volonté de remplacement culturel, de remplacement de notre histoire qui est à l'œuvre. On voit bien l’alliance entre l’islamisation de villes et la volonté d’une idéologie qui veut détruire l’histoire de France. Il y a une alliance entre le remplacement culturel et le remplacement démographique. On veut culpabiliser les français”

Ce mercredi, le maire et président de la Métropole Rouen Normandie Nicolas Mayer-Rossignol réagit à l’utilisation de ces images dans le clip de campagne d’Eric Zemmour : “C’est un guignol et un ringard. Cette statue fait l’objet d’une restauration qui coûte à la ville de Rouen 200.000 euros d’argent public. C’est un choix politique de la ville de la restaurer”, indique le porte-parole de la candidate Anne Hidalgo. 

Monsieur Zemmour n’est pas allé vérifier les faits, il les travestit comme à chaque fois. Il s’approprie des images qui ne sont pas les siennes et essaie de les récupérer. Ce n’est malheureusement pas la première fois qu’il fait ça.

Nicolas Mayer-Rossignol, maire de Rouen

Juste avant les images de la statue de Napoléon, des images de France 3 Picardie datant de mai 2013, sur la destruction d'une église à Abbeville, dans la Somme. Fermé depuis de nombreuses années car en très mauvais état, l'édifice devenait dangereux pour les riverains.

D'autres images, cette fois-ci de France 3 Bourgogne, ont été utilisées. Il s'agit d'images d'un reportage qui permettait à des jeunes de témoigner, à visage découvert, sur la violence dont ils sont victimes au quotidien parce qu’homosexuels et qui mettait en avant les actions réalisées pour lutter contre cette violence.

Le rédacteur en chef Jean-Philippe Tranvouez a réagi à ce sujet dans un post Facebook : 

"Je suis atterré ce soir (...) au-delà de cet usage frauduleux de nos productions journalistiques, c’est le contenu du discours porté par M. Zemmour, en voix off sur nos images, qui m’a le plus choqué. Je cite : 'nous devons cesser de livrer nos enfants aux expériences égalitaristes des pédagogistes et des docteurs folamour des théories du genre et de l’islamo-gauchisme.' Une phrase recouverte par les images d’un reportage qui s’intitulait 'Homophobie : faire changer les choses à l'école'. (...) je ne peux pas accepter que le travail des équipes de France 3 Bourgogne soit dévoyé, sali, par des propos qui vont à l’encontre de toutes les valeurs du service public que nos équipes défendent chaque jour, en donnant la parole à toutes et à tous, quelques soit leurs conviction, religion, orientation sexuelle, etc… en respectant toutes les diversités."

Des images utilisées sans autorisation

D'autres images appartiennent à Gaumont, à l'INA (l'institut national de l'Audiovisuel), ou encore des images privées. Tout a commencé par un tweet du média en ligne Les Jours, indiquant que "plusieurs extraits ont été utilisés sans l'accord des auteurs, c'est le cas du film Jeanne d'Arc (Gaumont). Ou d'images du journaliste Clément Lanot. Les deux envisagent des poursuites."

Gaumont qui n'a reçu "aucune demande" de la part des équipes de Zemmour pour l'utilisation des images des films "Un Singe en hiver" et "Jeanne d'Arc" dont la société détient les droits. "Nous allons étudier toutes les options qui s'ouvrent à nous", à ajouté un porte-parole.

Le réalisateur Luc Besson a annoncé à l’AFP avoir saisi son avocat "pour engager les poursuites nécessaires" après l'utilisation d'images de son film "Jeanne d'Arc", avec Milla Jovovich, sorti en 1999. Ces images ont été utilisées de manière "frauduleuse", a précisé le réalisateur qui "tient à faire savoir qu'il ne partage en rien les idées d'Eric Zemmour".

Le propriétaire du château d’Ussé (Centre-Val-de-Loire), également utilisé dans le clip du candidat, est furieux et indigné de voir sa propriété apparaître sans son accord dans le clip de campagne d'Éric Zemmour. "Je tombe des nues, je suis très mécontent. Je suis  indigné, le château d’Ussé n’a pas à être instrumentalisé" s'agace Casimir de Blacas, propriétaire du château d’Ussé qui n’a eu aucune demande concernant l’utilisation d’images du château.

France 24, a dit "s'opposer par principe à l'utilisation de ses images et de son logo dans tout clip de campagne politique""En conséquence, la chaîne va demander le retrait immédiat de ces images dans ce clip et étudiera les recours légaux s'il n'est pas donné suite à sa demande", a ajouté le média qui propose quatre chaînes mondiales d'information continue.

Que risque Eric Zemmour ?

Les faits reprochés font référence aux droits d’auteur (article L335-2 du code de la propriété intellectuelle) et au droit à l’image. “La contrefaçon de droit d’auteur est un délit pénal. Ce sont des images protégées par le droit d’auteur”, explique Gwendoline Flamant, directrice juridique adjointe à France Télévisions.

On ne peut pas utiliser des images sans l’autorisation des ayants droits.

Eric Andrieu, avocat spécialiste du droit des médias et de la publicité

“Sur un certain nombre de ces images il y a des personnes. On a tous le droit de s’opposer à la reproduction de notre image si on ne l’a pas autorisée. Les personnes en question et les ayants droits sur les créations peuvent attaquer son organisation pour demander la suppression des images en question et demander des dommages et intérêts”, indique Eric Andrieu, avocat spécialiste du droit des médias et de la publicité.

La “courte citation” pour se défendre

L'équipe du polémiste s'est défendue de ces critiques en citant le droit dit "de courte citation", dans un courriel adressé à l'AFP.  “On peut dans certains cas utiliser l'exception de courte citation : vous pouvez utiliser un extrait d’une œuvre protégée, à condition que ce soit un court extrait, dans le cadre d'un document à caractère critique, polémique, scientifique, pédagogique, ou d'information. Et il faut citer l'auteur.”, explique  explique Eric Andrieu, avocat spécialiste du droit des médias et de la publicité.

Or, Eric Zemmour “ne cite aucune source, aucun auteur et n'analyse pas ces images, il en fait juste de l'illustration et les utilise à des fins de promotion électorale", constate Gwendoline Flamant, directrice juridique adjointe à France Télévisions.

Le service des images de l’émission “Quotidien” estime les faits reprochés à 100.000 euros d’archives, "s’ils avaient demandé les droits, car maintenant il va falloir rajouter les procès.(...) L'argent que nous recevrons de Zemmour sera reversé aux associations qui viennent en aide aux migrants", précise Yann Barthès.

La justice devra trancher si des plaintes sont déposées à l'encontre d'Eric Zemmour. 

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