La commune de Barentin (Seine-Maritime) où sont exposées des statues de Paul Belmondo et la statue de la Liberté du film "Le Cerveau" va rendre hommage à Jean-Paul Belmondo
Situé à une quinzaine de kilomètres au nord de Rouen, le centre commercial de Barentin est fréquenté chaque jour par des milliers de personnes qui passent au pied d'une grande statue de la Liberté. Mais peu savent que cette statue est celle du film "Le Cerveau" !
La présence de cette statue n'est pas due au hasard. Elle est liée au lien particulier et ancien de Barentin avec la famille Belmondo .
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C'est pourquoi Christophe Bouillon, maire de Barentin, souhaite rendre un hommage au célèbre acteur disparu le 6 septembre 2021 en donnant le nom de Jean-Paul Belmondo à l'avenue qui mène à la statue de la liberté, l'actuelle RD 6015.
Le maire de Barentin, avant de proposer cet hommage au conseil municipal, annonce dans un communiqué avoir écrit "aux ayants droits de l'acteur afin de pouvoir obtenir l'autorisation pour dénommer cette voie qui, jusqu'à aujourd'hui, n'avait pas de nom."
Barentin et Belmondo
La présence de statues dans l'espace public de Barentin remonte à l'après-guerre, quand André Marie, le maire de l'époque, décida de transformer la vieille cité ouvrière textile en "Cité des Arts". En 1948, l'une de ses premières actions fut la création d'un musée dans la rue pour faire de Barentin "la ville au cent statues".
Il faut préciser qu'André Marie, grand avocat au barreau de Rouen et député de la Seine-Inférieure, fut plusieurs fois secrétaire d'Etat et ministre (Education nationale, Garde des Sceaux, ministre de la Justice) mais aussi président du Conseil, l'équivalent sous la IVe République de Premier ministre.
Ami du sculpteur Paul Belmondo (le père de l'acteur) André Marie le reçut à plusieurs reprises dans sa ville de Barentin. Comme l'explique Christophe Bouillon (actuel maire et auteur d'une biographie sur son illustre prédécesseur) "Cette amitié permis à la Ville de devenir propriétaire de plusieurs œuvres de l’artiste comme « La muse de Thomas Corneille », « Pomone », « La République » mais également une aquarelle intitulée « Périac-Sur-Mer ».
La statue du "Cerveau"
Tout le monde a vu la scène tournée en 1968 au Havre, dans laquelle Jean-Paul Belmondo apparait au milieu d'une pluie de billets quand s'ouvre le socle de la statue de la Liberté, suspendue au-dessus du paquebot France.
Un an plus tard, le sculpteur Paul Belmondo appelle André Marie pour l'alerter car la fameuse statue du film "Le Cerveau" fabriquée en Italie (le film de la Gaumont est coproduit avec le studio Dino De Laurentiis Cinematografica) se trouve dans un entrepôt de la banlieue parisienne et il est prévu qu'elle soit détruite prochainement. Le père de Jean-Paul Belmondo propose alors au maire de Barentin d'intervenir pour sauver cette réplique en polyester de la statue de la Liberté, la sortir de l'entrepôt et l'accueillir dans sa commune, pour compléter la collection du "musée dans la rue".
Mais il faut faire vite et la commune normande n'a pas de budget pour cette acquisition imprévue.
C'est au début des années cinquante, quand il était ministre de l'Education nationale, qu'André Marie a connu un jeune acteur qui faisait ses débuts au théâtre : Gérard Oury. Contacté, le réalisateur du film "Le Cerveau" accepte d'aider le maire de Barentin. La statue appartient à la Gaumont, qui donne un accord de principe, sous réserve qu'un coproducteur, La Paramount, ne l'envoie aux USA pour la promotion du film.
Finalement la statue reste en France et la Gaumont confirme par écrit qu'elle accepte d'en faire cadeau à la ville de Barentin, mais en acquittant immédiatement des droits de douanes d'un montant élevé (l'équivalent aujourd'hui de 19.000 euros).
Sidéré, le maire de Barentin écrit aussitôt au ministère des Finances pour plaider sa cause, ce qu'en avocat, il fit avec humour :
"La statue va se trouver brisée en mille morceaux sans aucun profit pour qui ce soit. N'y a-t-il pas, dans les cas identiques, des accommodements avec la douane ? Molière prétendait qu'il y en avait avec le ciel. Je ne désespère pas qu'il puisse en avoir avec votre administration…"
Finalement, et après d'autres péripéties, la statue de 13,5 mètres arriva à Barentin le 21 août 1969. Quelques années plus tard, lors de travaux de restauration et d'entretien, on retrouva à l'intérieur des centaines de billets de banques qui ne s'étaient pas envolés dans le ciel havrais, au-dessus du France.
La statue resta quelques années sur une place du centre-ville de Barentin. André Marie avait déjà prévu son emplacement définitif. En 1973 il ouvrait l'un des premiers centres commerciaux de Normandie sur les hauteurs, au Mesnil-Roux, qui sera raccordé un an plus tard à Rouen par une autoroute directe.
Déjà une rue du nom de Belmondo
En hommage au sculpteur, le père de l'acteur, la commune de Barentin avait inauguré en 2002 une voie du centre-ville du nom de Paul Belmondo en présence de sa fille Muriel.
Jean-Paul Belmondo était déjà venu à Barentin. Christophe Bouillon précise que c'était en 1955, pour, à ses débuts, jouer une pièce de théâtre en compagnie notamment d’Annie Girardot.