A Saint-Pierre-de-Varengeville (Seine-Maritime), près de Rouen, les Jardins de Simone proposent toute l’année des légumes, des herbes aromatiques et des fleurs comestibles. A la tête de cette ferme maraîchère bio : Nathalie Aiken. Dans sa vie d'avant, elle était cheffe d’entreprise dans la métallurgie. Aujourd'hui, elle renoue avec son amour de la terre.

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Sous un ciel bleu d’avril, Nathalie Aiken cueille une petite fleur bleue en forme d’étoile qu’elle nous propose de goûter. En bouche, des saveurs iodées. « C’est une fleur de bourrache. Elle est appréciée pour son goût d’huître » nous explique la maraîchère.

La fleur de bourrache est l’une des dizaines de variétés cultivées ici depuis l’an dernier. Capucine, fenouil, camomille, mais aussi fleur de chou ou de radis. « Dans le chou, tout se mange » détaille l’agricultrice, « il suffit de laisser monter à graine pour obtenir ces petites fleurs jaunes ». Des produits très appréciés des restaurateurs avec lesquels les Jardins de Simone travaillent en circuit court.  

Une production éclectique pour une clientèle 100% locale  

Outre les fleurs comestibles, Nathalie Aiken propose plus de 250 types de légumes de saison ainsi que des herbes aromatiques et des fruits. Des carottes, des tomates, des radis, des aubergines, des artichauts mais aussi plus rare en Normandie, des melons et des pastèques. Le matin de notre visite, Victor, s’affaire sous l’une des quatre serres pour mettre en terre les plants de melons : « irrigués au goutte à goutte, enrichis par l’apport de fumier de cheval, ils arriveront à maturité d’ici à la fin juillet », précise l’un des trois salariés non-permanents de la structure.

Depuis quelques jours, et le retour de la belle saison, la vente directe à la ferme a repris les mercredis après-midis.   

Toute l’année, la maraîchère livre également sa récolte dans des magasins de producteurs locaux et commercialise chaque semaine via la plateforme Les Fermes d’ici des produits frais et de saison aux habitants de la métropole de Rouen.

« Notre très grande variété dans nos cultures nous prend beaucoup de temps. Mais cela nous permet de diversifier nos marchés et de minorer les aléas liés à la météo par exemple » explique la gérante des Jardins de Simone.

Maraîchère autodidacte

Il n’y a pas si longtemps encore, Nathalie Aiken évoluait dans le monde de l’industrie. Des études d’histoire géographie et son diplôme de  Sciences Po en poche, elle commence sa carrière professionnelle dans la métallurgie, où elle dirige plusieurs entreprises.

Mais à cinquante ans passés, elle a envie de changement. « J’ai toujours souhaité être dans le secteur agricole. » Un héritage inconscient peut-être : « après le décès de ma mère, j’ai découvert que la plupart de mes ascendants étaient normands, agriculteurs ou vétérinaires ». Si elle peut compter sur son sens de la gestion et sa capacité d’entreprendre, il lui manque les connaissances techniques. Alors pendant près de deux ans, la cheffe d’entreprise se forme « en autodidacte, en lisant beaucoup et en picorant des sessions de formation ».

Dans l’incapacité de trouver une entreprise agricole à reprendre, Nathalie Aiken décide de s’installer à Saint-Pierre-de-Varengeville. Là, où elle possède une maison et sept hectares de terre, exploités à l’époque par un agriculteur qui y cultive du maïs. « J’ai d’abord hésité à lancer une ferme horticole » se souvient-elle, « car je connaissais davantage les fleurs ».

Finalement, en 2020, elle s’oriente vers le maraîchage. « Toute petite déjà, je passais beaucoup de temps dans le potager de mon grand-père. Par la suite, j’ai eu le mien auquel j’ai consacré de nombreuses années avec bonheur. » Dès le début, elle s’oriente vers des pratiques culturales respectant le cahier des charges de l’agriculture bio. Une haie mellifère a par exemple été plantée tout autour de l’exploitation pour favoriser la biodiversité : « avec ces arbres, nous essayons de reconstituer un écosystème tel qu’il existait dans le passé pour que les différents éléments : insectes, oiseaux… s’entraident en vue d’une production la plus préservée possible ».

Troisième saison

A 61 ans, l’agricultrice entame son troisième printemps à Saint-Pierre-de-Varengeville. Pour l'heure, elle ne se verse pas de revenu mais elle ne regrette pas son choix. « Depuis 2020, je n’ai fait que ça. Pas de vacances, pas de week-end. Je ne pensais pas que ce serait si lourd » avoue-t-elle. « Mais dans les moments de doute, il me suffit d’aller sur le terrain pour me sentir mieux ».

Il a aussi fallu apprendre à travailler avec le vivant : « dans l’industrie, si nous produisions des pièces en trop, nous pouvions toujours les stocker en attendant de trouver un client. Mais quand un légume est arrivé à maturité, il doit partir tout de suite. Quitte parfois à devoir le vendre à petit prix. »

Installée durant le premier confinement lié à la pandémie de Covid 19, la maraîchère a sans doute bénéficié d’un attrait des consommateurs pour les producteurs locaux. Mais, dans son secteur, la clientèle peut s’avérer très volatile : « depuis septembre, nous sommes nombreux à constater un recul des ventes. Les acheteurs font sans doute d’autres arbitrages en raison notamment du prix de l’essence » confie l’agricultrice. « Bien sûr que nos légumes sont vendus plus chers qu’ailleurs » reconnaît-elle « mais en moyenne, nous perdons 30% de notre production comparée à l’agriculture conventionnelle ».

Fraîchement certifiée bio

En janvier dernier, la certification en agriculture biologique est venue saluer le travail mené depuis deux ans par Nathalie Aiken et son équipe. De sa carrière précédente, elle a sûrement gardé la capacité à bien s’entourer. Six salariés dont trois permanents œuvrent à ses côtés.

Chacun apporte ses compétences et permet de développer de nouveaux projets. Culture de champignons l’hiver, mise en place de poules pondeuses dont les fientes serviraient d’engrais, cultures horticoles pour le marché de la fleur coupée… les idées ne manquent pas. « Expérimenter de nouvelles productions a toujours été un moteur » confie la maraîchère. En juin, une conserverie verra le jour. Reste à développer les recettes. « Notre objectif est de pouvoir mieux gérer les volumes très importants l’été et d’être présent auprès de nos clients dans le courant de l’hiver », conclut Nathalie Aiken.

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