Des rencontres à Rouen pour briser le tabou des abus sexuels dans l’Eglise 

La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase) continue de rencontrer des victimes dans toute la France. Mardi 15 septembre, une réunion publique se tiendra à Rouen. Lancée en novembre 2018, la Ciase a déjà reçu près de 6000 témoignages. 

« Pendant bien trop longtemps, il y a eu un silence poli sur les abus sexuels dans l’Eglise catholique, notre objectif c’est maintenant d’écouter et de rencontrer le plus de victimes possible »,  s’exclame Alain Cordier, un des membres de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (Ciase).
Lille, Bordeaux, Rennes, la Ciase s’est déjà rendue dans plusieurs métropoles. Prochaine étape : mardi 15 septembre à Rouen. Une réunion publique au Panorama XXL à 18h30 et des rencontres individuelles seront organisées. Face à l’épidémie de COVID-19, les participants pourront également suivre cette assemblée en direct par Internet sur zoom. Si vous ne pouvez pas assister à cette réunion, vous pouvez témoigner par mail à victimes@ciase.fr, par téléphone au 0180523355 ou par courrier à Service CIASE - BP 30132 - 75525 Paris cedex 11. 

Mandatée en novembre 2018 par la Conférence des évêques de France (CEF) et la Conférence des religieux et religieuses de France (CORREF), suite à plusieurs scandales, la Ciase est chargée en premier lieu d’établir un état des lieux des abus sexuels commis par des clercs contre des mineurs et des personnes vulnérables depuis les années 50. Elle est composée d’une vingtaine de professionnels croyants ou non aux compétences variées dans les domaines du droit, de la psychiatrie, de la médecine, de la sociologie etc 


Près de 6000 témoignages recueillis pour l’instant 

Via des rencontres, des appels téléphoniques réalisés avec la fédération France Victimes, des mails, des lettres etc, la Commission indépendante a déjà recueilli près de 6000 témoignages.
 

"On reçoit un flux continu d’appels, il s’agit en grande majorité de personnes abusées pendant leur enfance ou adolescence. 80% ont plus de 50 ans. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de cas récents mais cela montre que les victimes mettent du temps avant de témoigner. Certains souvenirs peuvent ressurgir des années après un traumatisme. La mémoire amnésique, c’est une réalité"

Alain Cordier, membre de la Ciase


Président de l’association La parole libérée, créée par des victimes du prêtre Bernard Preynat, François Devaux était assez dubitatif lors du lancement de cette commission. Mais il reconnaît aujourd’hui son utilité.

"Il fallait qu’il y ait une autorité indépendante qui travaille sérieusement sur ces abus sexuels. Nous, on a encore du mal à se faire entendre par l’Eglise. Je rencontre peu d’évêques et de prêtres compréhensifs et sincères. Alors si cette commission peut permettre de faire bouger les choses, c’est positif"

François Devaux, président de l'association La parole libérée

 

Un nombre de victimes très sous-estimé pour l’association La parole libérée 


Néanmoins, François Devaux ne se satisfait pas du nombre de témoignages reçus. Il pense qu’il y a des dizaines de milliers de victimes d’abus sexuels dans l’Eglise en France. Un chiffre à mettre en lumière selon lui avec le nombre de Français ayant reçu une éducation catholique. Environ 35 à 40 millions de personnes. 
 

"Les victimes peuvent avoir peur de se confronter de nouveau à leur passé, de remettre en cause l’équilibre précaire sur lesquelles elles se sont construites, de blesser leurs parents etc Mais pour être réparé, il faut accepter l’origine de ses souffrances, en parler à votre encourage proche qui ne comprend pas toujours votre colère et votre violence. Et c’est également important de témoigner afin que des enfants ne vivent pas ce que vous avez vécu" 

François Devaux

 

Avoir un accès aux archives de l’Eglise 


En parallèle de cet appel à témoignages, le président de la Ciase, Jean-Marc Sauvé a demandé aux supérieurs majeurs des congrégations religieuses et aux évêques, de préciser, décennie par décennie, les abus commis dont les archives portent trace : nombre de prêtres abuseurs, nombre de victimes, manière dont les affaires ont été traitées etc 
 

« La grande majorité des diocèses a répondu et a collaboré. Peut-être que dans certains cas des documents avaient disparu, mais sinon ils nous ont transmis toutes les archives qu’ils possédaient. On essaye aussi de croiser ces sources avec des archives de presse et de la justice. Pour l’instant, ce travail d’enquête est encore en cours »

Alain Cordier



En attendant de remettre son bilan et ses préconisations fin septembre 2021 avec les autres membres de la Ciase, Alain Cordier continue d’être marqué par ses entretiens.
« On perçoit de très grandes souffrances, la vie de ces victimes est brisée, il y a un réel empêchement d’être » 

Afin d'obtenir une réparation psychique et également financière, le président de l’association La parole libérée estime qu'il faut arrêter de percevoir la justice uniquement sous l'angle pénal. Si les faits sont prescrits, c'est-à-dire que l'auteur des faits ne peut plus être poursuivi et condamné, les victimes peuvent néanmoins se constituer partie civile et demander une réparation du dommage subi. 

L'appel à témoignages effectué par la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise se poursuit jusqu'au 31 octobre minimum. 
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