Un rouennais franco-rwandais est renvoyé aux Assises pour "complicité" de génocide et de crimes contre l'humanité. Il est soupçonné d'avoir transporté des miliciens extrémistes sur les lieux de massacre de Tutsi.
Claude Muhayimana, employé à Rouen et réfugié rwandais, est accusé d'avoir transporté des miliciens sur les lieux de massacres des Tutsi en 1994. Il a été renvoyé le 9 novembre, par le juge d'instruction, devant les assises pour "complicité" de génocide et de crimes contre l'humanité par "aide et assistance."
Certains chefs d'accusation non retenus
Le magistrat accuse Claude Muhayimana de complicité dans l'attaque, de l'école de Nyamishaba au Rwanda, en avril 1994, ainsi que dans les massacrescommis sur les civils tutsi réfugiés dans les collines avoisinantes de Karongi. Cet ancien chauffeur d'hôtel est soupçonné d'avoir transporté les Interahamwe, miliciens extrémistes hutu, sur les lieux des attaques perprétrées à l'encontre des Tutsi.
Cependant, le magistrat n'a pas retenu les poursuites à l'encontre de Claude Muhayimana concernant les tueries de masses qui ont fait des milliers de morts le 17 avril dans l'église et l'hôtel Home Saint-Jean de Kibuye, puis à nouveau le lendemain dans le stade Gatwaro.
"Il est un peu paradoxal que mon client soit lavé des accusations les plus graves, mais qui étaient les plus précises, et qu'on continue de lui imputer les autres qui se basent sur des témoignages beaucoup plus vagues", a déclaré l'avocat Philippe Meilhac à l'Agence France-Presse.
Les parties civiles ne sont pas satisfaites de ces non-lieux partiels. "Nous avons la conviction que M. Muhayimana était bien sur les lieux de ces grands massacres", a réagi auprès de l'AFP Alain Gauthier, président du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR).
Génocide au Rwanda : plus de 800 000 morts
Claude Muhayimana a obtenu la nationalité française en 2010. Employé municipal depuis, il a été arrêté en 2014 à Rouen et mis en examen dans cette enquête, ouverte en 2013 après une plainte du CPCR. En 2015, il a été libéré de sa détention provisoire, contre l'avis du parquet.25 enquêtes sur le génocide en cours en France
Il s'agira du troisième procès en France en lien avec le génocide perpétré au Rwanda, qui a fait plus de 800 000 morts, très majoritairement dans la communauté Tutsi.Quelque 25 dossiers liés aux massacres de 1994 sont instruits au pôle d'enquêteurs et de magistrats spécialisés dans les crimes contre l'humanité. Ce pôle a été créé
en 2012 à Paris face à l'accumulation des plaintes concernant ce génocide, dont plusieurs auteurs présumés s'étaient réfugiés en France.
À ce jour, leur travail a débouché sur deux grands procès en France: celui du Rwandais Pascal Simbikangwa, dont la peine à 25 ans de prison pour génocide a été
confirmée en appel, et celui de deux anciens maires rwandais, condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité et dont le procès en appel débutera fin avril.