« Travailleur modèle » selon son employeur, en CDI depuis plus de deux ans, père de famille avec des enfants nés et scolarisés en France… Le rouennais Liridon Mussolli est pourtant sommé de quitter le territoire le 1er septembre prochain. Une situation jugée absurde par les associations qui le soutiennent.
Liridon Mussolli est kosovare. Il a dû quitter son pays une première fois lors de la guerre de Yougoslavie puis une deuxième fois, à cause de menaces personnelles contre lui et sa famille. Une fois arrivé en France en 2016, la chance semble enfin lui sourire. Il apprend rapidement le français, s’engage comme bénévole dans différentes associations et finit par trouver du travail. Il décroche même un CDI en 2020 dans une petite entreprise du bâtiment à Sotteville-lès-Rouen.
Sa famille suit le même modèle d'intégration : sa compagne, diplômée de physique-chimie, se reconvertit dans l'aide à la personne et les trois enfants (dont les deux derniers sont nés en France) ont bénéficié d’un parrainage républicain à la Mairie de Rouen par des conseillers municipaux.
« C’est ce genre de modèle dont on a besoin en France ! »
Malgré sa situation, « jugée modèle » par son employeur, Liridon reçoit une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) au début de l’été. Celle-ci prend effet le 1er septembre prochain. « Je ne sais pas si c’est fait exprès mais je souligne la coïncidence car c’est difficile de se mobiliser pendant l’été » affirme l’abbé René Gobbé, membre de la Pastorale des migrants.
Un référé est alors lancé pour repousser la date fatidique. « Mais elle a été refusée, cela veut dire que son dossier sera étudié le 28 novembre alors que l’avion est affrété pour le 1er septembre. C’est absurde. » explique René Gobbé.
« J’ai un an et demi de commandes signées, comment je vais faire si je le perd ? »
Il n’est pas le seul à dénoncer l’absurdité de ce cas. Son employeur s’inquiète de perdre un « salarié indispensable » dans un secteur en manque de main d’œuvre.
C’est un chef d’équipe et s’il part je vais avoir du mal à trouver quelqu’un d’aussi bien, personne n’est capable de le remplacer pour le moment. C’est difficile de recruter dans le secteur, il faut à la fois des compétences techniques et physiques mais aussi relationnelles car on travaille chez des particuliers. J’ai un an et demi de commandes signées, comment je vais faire si je le perd ?
Mickael Demir, son employeur
Mickael Demir n’en revient pas, « il a le profil parfait de la personne bien intégrée, qui travaille bien, qui paye ses impôts, il ne profite pas du système… c’est ce genre de modèle dont on a besoin en France ! »
Pour moi c’est incompréhensible, je paye des charges sociales pour travailler avec lui, ils sont bien d’accord de recevoir ce que je paye mais malgré cela on le renvoie. Alors ca sert à quoi ?
Mickael Demir, son employeur
René Gobbé ne le cache pas, il est très inquiet pour la suite. Pourtant, les outils administratifs pour régulariser la situation de la famille Mussolli existent : « Son cas tombe sous le coup de la circulaire Valls, mais le problème d’une circulaire c’est qu’elle s’applique seulement au bon vouloir des préfets. En l’occurrence, il pourrait tout à fait correspondre car il est en CDI depuis près de 2 ans, son aînée est scolarisée en France depuis 3 ans… Je ne comprends pas cet acharnement à vouloir le renvoyer ». Contactée, la préfecture n’a pas encore répondu à notre demande.
Malgré leur détermination, les soutiens de la famille ont mené toutes les démarches administratives possibles pour le moment. Ils comptent sur la mobilisation sociale pour faire changer favorablement la situation de Liridon et ont lancé une pétition. « Des situations moins évidentes ont déjà été résolues ainsi » explique René Gobbé. Une manifestation, en cours de préparation, devrait avoir lieu dans les prochains jours.