Maurice Agnelet, condamné à 20 ans de réclusion criminelle dans l'affaire de l'assassinat de l'héritière d'un casino niçois mystérieusement disparue en 1977, a été libéré à 12h aujourd'hui, en attendant un troisième procès que lui a désormais promis la Cour de cassation.
Dans l'énième rebondissement d'une procédure étalée sur près de 35 ans, M. Agnelet, 74 ans, doit être remis en liberté "vers midi", selon son avocat Me François Saint-Pierre, qui l'attendra à la sortie du centre de détention de Mauzac-et-Grand-Castang (Dordogne), où il était incarcéré depuis cinq ans, après sa condamnation à 20 ans de réclusion en 2007.
M. Agnelet est libéré en attendant son nouveau procès, qui se tiendra dans plusieurs mois à Rennes, devant la cour d'assises de l'Ille-et-Vilaine.
Pas de procès équitable pour la CDEH
La remise en liberté de M. Agnelet, qui reste sous contrôle judiciaire, a été décidée jeudi par la commission de réexamen de la Cour de cassation. L'arrêt faisait suite à une décision de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH), qui, le 10 janvier, a estimé qu'il n'avait pas bénéficié d'un procès équitable.La CEDH a aussi noté que "le meurtre n'était pas formellement établi et que, partant, le lieu, le moment et les modalités du crime supposé restaient inconnus".
Le corps d'Agnès Le Roux n'a jamais été retrouvé, ni le véhicule avec lequel l'héritière du Palais de la Méditerranée à Nice s'était volatilisée, le week-end de la Toussaint 1977.
Maurice Agnelet, un ancien avocat niçois, a toujours clamé son innocence concernant le meurtre de la disparue, son ancienne maîtresse âgée alors de 29 ans.
35 ans d'une affaire rocambolesque
Dans une saga judiciaire étalée sur près de 35 ans, il avait été placé en garde à vue en 1978 puis libéré, finalement inculpé et écroué en 1983, avant de bénéficier d'un non-lieu en 1985. Mais il avait été finalement renvoyé devant les assises. Acquitté en 2006, il a été condamné en 2007 en appel. Son pourvoi en cassation avait été rejeté.Son avocat Me Saint-Pierre a dit jeudi aborder le futur procès "avec une détermination totale d'obtenir de la justice qu'elle acquitte définitivement Maurice Agnelet de ce crime qu'il n'a pas commis".
Pour Me Hervé Temime, l'avocat de la famille Le Roux, Agnelet a gagné le droit à un nouveau procès, mais pour autant "n'a pas du tout été innocenté".
Me Temime a souligné "à quel point ce troisième procès pourrait être douloureux pour toute la famille Le Roux, y compris pour Mme (Renée, la mère d'Agnès, NDLR) Le Roux qui est aujourd'hui à 91 ans dans un état tel qu'elle n'est même pas informée de l'évolution de la procédure".
"Nous ferons face" au procès, a-t-il néanmoins assuré.
"Ce n'est pas la liberté de M. Agnelet qui nous importe, c'est la vérité que nous recherchons. La vérité, il la détient", a-t-il ajouté.
Agnelet sous contrôle judiciaire
D'ici son troisième procès, l'exécution de la précédente condamnation de Maurice Agnelet fait l'objet d'une "suspension", et il sera soumis au contrôle d'un juge d'application des peines de Chambéry, (Savoie), où il va résider, a indiqué la commission de révision de la Cour de cassation.Selon son avocat, c'est "un homme déjà âgé, bien usé. Mais c'est un philosophe parce qu'il a sa conscience pour lui".
Il quitte en tout cas à Mauzac, sur les bords bucoliques d'un canal latéral à la Dordogne, une prison hors normes reconstruite en 1985-86 sur un modèle pavillonnaire. Le centre de détention est aussi une structure pilote en termes de réinsertion des détenus, souvent hors des murs. D'où peut-être son surnom de "Club Med", tiré aussi de l'architecte conseil des lieux Christian Demonchy, qui avait jadis travaillé pour ce groupe de loisirs.