La justice espagnole a rendu son verdict ce mercredi dans le procès de la plus grave marée noire de l'histoire de l'Espagne, elle a acquitté mercredi les trois accusés du naufrage du Prestige pour la marée noire, mais a condamné le commandant grec, Apostolos Mangouras, à neuf mois de prison.
La justice espagnole a acquitté mercredi les trois accusés du naufrage du Prestige pour la marée noire, mais a condamné le commandant grec, Apostolos Mangouras, à neuf mois de prison pour avoir refusé de faire remorquer le navire, avant son naufrage en novembre 2002.
Le parquet avait requis entre cinq et 12 ans de prison pour le commandant, Apostolos Mangouras, âgé de 78 ans, le chef mécanicien du Prestige, Nikolaos Argyropoulos, grec lui aussi, et le directeur de la Marine marchande espagnole de l'époque, José Luis Lopez-Sors, ainsi que 4,328 milliards d'euros de dommages et intérêts. Un quatrième accusé, l'officier en second philippin Ireneo Maloto, est en fuite.
Le procès, après une instruction longue et complexe, s'était ouvert le 16 octobre 2002 devant le tribunal supérieur de justice de Galice, à La Corogne, dans le nord-ouest de l'Espagne. Il s'était achevé le 10 juillet après huit mois d'auditions.
Le premier SOS avait été lancé le 13 novembre 2002, lorsque le Prestige, un pétrolier libérien à coque simple battant pavillon des Bahamas, construit en
1976 et chargé de 77.000 tonnes de fuel, subissait une voie d'eau en pleine tempête, dans l'Atlantique au large de la Galice.
Pendant six jours, le navire, sa coque déchirée, avait dérivé en pleine tempête, les pouvoirs publics ayant pris la décision controversée de l'éloigner des côtes au lieu de le faire rentrer dans un port pour y contenir la fuite. Le pétrolier s'était finalement brisé en deux et avait coulé à 8 heures du matin.
le 19 novembre, à 250 kilomètres des côtes par près de 4.000 mètres de fond, crachant un fuel épais et visqueux qui avait pollué plus de 1.700 kilomètres de littoral, en Espagne, mais aussi au Portugal et en France.
Pendant le procès, durant lequel le tribunal a entendu plus de 200 témoins et experts, le commandant et l'armateur du Prestige ont accusé le gouvernement espagnol d'avoir provoqué le naufrage en ordonnant au navire de prendre le large. 1.500 plaignants au total s'étaient rassemblés en 55 parties civiles.
Parmi les plaignants, il y a des collectivités locales françaises dont plusieurs communes des Landes, qui n'ont pas oublié cette catastrophe. Le Conseil général des Landes et 17 communes du littoral se sont portées parties civiles dans le procès "Nous savons bien que nous ne récupèrerons pas notre argent, mais c'est plus une question éthique. Nous ne pouvons pas ne rien faire après ce que nous avons vécu", explique Hervé Bouerye, président du Syndicat mixte landais qui réclame 800.000 euros de dommages et intérêts.
Les autorités "nous ont donné le cap 320", c'est-à-dire vers le nord-ouest. "C'était un cap peu sûr. Le navire a une voie d'eau et ils l'envoient au large, dans l'océan", avait raconté à la barre du tribunal Apostolos Mangouras, poursuivi pour atteinte à l'environnement.
"C'était la pire option. Ils nous transformaient en un cercueil flottant et ils nous envoyaient à la noyade", avait-il ajouté, s'interrompant un moment en larmes. "Nous attendions une tempête pour le 15 novembre. Où allions-nous?", avait-il poursuivi, rappelant que huit marins restaient alors à bord après l'évacuation d'une partie de l'équipage. "C'était une simple fuite en avant", avait déclaré l'avocate de l'armateur Mare Shipping, propriétaire du Prestige, pour qui ce choix était un "cap suicidaire".
Seul représentant des autorités parmi les accusés, José Luis Lopez-Sors avait lui défendu cette décision. "Il me semblait mieux que le bateau coule loin de la côte pour minimiser les dégâts environnementaux", avait-il expliqué.
Onze ans plus tard, il ne reste aucune trace de la catastrophe sur les plages et les rochers de Galice. Mais les écologistes estiment que les leçons de la marée noire n'ont jamais été tirées et avaient dénoncé, à l'ouverture du procès, l'absence sur le banc des accusés des responsables politiques de l'époque. Parmi eux, l'actuel chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, qui en était alors le numéro deux et avait tenu des propos minimisant l'impact de la catastrophe: il s'était refusé à parler de "marée noire" mais seulement de "filaments, comme de la pâte à modeler" pour désigner les amas de fioul noir qui, pendant plusieurs semaines, s'étaient déversés sur les côtes.