Xynthia : une condamnation "tout à fait injuste" selon les élus du littoral aquitain

Après la condamnation du maire de la Faute-sur-Mer et de son adjointe à 4 ans et 2 ans de prison ferme, les élus des communes balnéaires s'inquiètent. Ils ont le sentiment d'être livrés à eux-même dans la gestion de risques "bien trop lourds". Pour eux, l'Etat doit aussi prendre ses responsabilités.

L'Association des maires ruraux de France qualifie le jugement du tribunal correctionnel des Sables-d'Olonne d'"extrêmement sévère".
René Marratier, le maire de La Faute sur Mer, est condamné pour homicide involontaire à quatre ans de prison ferme. Son adjointe Françoise Babin écope elle deux ans ferme. Des peines suspendues aujourd'hui puisque les prévenus ont fait appel.

La justice leur reproche d'avoir approuvé la construction de maisons de plain-pied, sans un premier étage, malgré le risque important de submersion et malgré les alertes des services administratifs.

L'AMRF s'est étonnée que seuls les élus locaux paient. Pourquoi "toute la chaîne de responsabilité" (du demandeur de permis de construire aux différents acteurs du dossier) "n'est pas pas concernée par ce jugement" ?

Elle a appelé l'Etat à "revoir d'urgence" sa politique de prévention et à "aider les collectivités à mieux gérer l'espace avec des moyens humains et matériels". D'autant que les catastrophes naturelles semblent se multiplier.

"Ecoeuré et outré!"


Le maire UMP de Port-Vendres dans les Pyrénées-Orientales, Jean-Pierre Romero, résume le sentiment d'un grand nombre d'élus de petites communes, parfois victimes des situations héritées de leurs prédécesseurs.

A Port-Vendres, par exemple, "des maisons ont été construites en zones inondables", explique le maire, tout en soulignant qu'il n'est pas "celui qui a délivré ces permis de construire".

Sa commune de 4.000 habitants attend son classement en état de catastrophe naturelle depuis les inondations de fin novembre qui ont fait un mort dans la région. Instruit par cette douloureuse expérience, il dit avoir "fait annuler la construction d'un restaurant en zone inondable", car "il faut être strict".

Mais à la Faute-sur-mer comme ailleurs, Jean-Pierre Romero pointe aussi du doigt la responsabilité des propriétaires : "les gens ont bien acheté les maisons, non?"

"L'Etat n'a pas fait son boulot!"


Albert Larrousset, maire UMP de Guéthary au pays-basque, et par ailleurs président des élus du littoral de la Côte Basque, dénonce un certain immobilisme des services de l'Etat.

Pour lui c'est une condamnation "tout à fait injuste" de ses collègues vendéens. "Les services de l'Etat ont laissé passer le contrôle de légalité, ils ont tout laissé faire, au lieu d'arrêter ces constructions".

"Si nous prenions en compte toutes les responsabilités qui nous incombent, nous ne serions jamais maires", ajoute l'élu basque. "Nous sommes toujours confrontés au même dilemme: respecter le principe de précaution tout en développant l'économie du village".


La "jurisprudence" des Sables-d'Olonne "ne résout rien", renchérit Lionel Quillet, maire de Loix, sur l'Ile de Ré, où les digues ont considérablement souffert lors du passage de Xynthia en 2010.

"Le vrai problème, selon cet élu, c'est qu'entre le littoral fluvial et maritime, il y a aujourd'hui 18 millions de Français logés en zones inondables".

Or, à l'inverse de beaucoup d'autres pays confrontés aux mêmes caprices climatiques, la France "décentralise la prise en charge d'un risque bien souvent beaucoup trop lourde pour la seule commune", juge Lionel Quillet.
"On peut dans ces conditions tout à fait imaginer une commune de 300 habitants se voir contrainte d'assumer l'entretien d'une digue estimé à 1 million d'euros", explique-t-il.

"Un élu seul, fut-il très connecté ou passionné sur ces questions, a besoin d'un certain nombre d'informations, et besoin aussi d'avoir la solidarité départementale, régionale et nationale qui s'applique", insiste Renaud Lagrave, conseiller municipal PS à Mont-de-Marsan mais surtout président du groupement d'intérêt public (GIP) Littoral Aquitaine.


"Je pense qu'on est aujourd'hui en train de montrer par A + B les limites de l'engagement d'un certain nombre de collectivités et d'élus face à des problématiques administratives, législatives et financières", estime Renaud Lagrave, qui demande un "choc de simplification administratif sur ces questions de littoral".




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