L'accélération des négociations entre l'Union Européenne et les pays du MERCOSUR inquiète les agriculteurs.
La plupart des accords commerciaux bilatéraux négociés actuellement par la Commission Européenne menacent les éleveurs bovins, particulièrement en Limousin.
En Nouvelle-Aquitaine comme dans d'autres régions françaises, les manifestations d'agriculteurs se multiplient depuis plusieurs jours pour protester contre la volonté d'accélérer les négociations commerciales entre l'Union Européenne et les pays du MERCOSUR (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay, Venezuela et Bolivie) exprimée il y a quelques jours par Emmanuel Macron.
En octobre dernier, le président français avait réclamé "une pause" quand la Commission Européenne avait voulu relancer un processus de négociations entamé en 1999.
Mais le 26 janvier dernier, le Chef de l'Etat opérait un changement de cap à l'occasion de la visite en France du président argentin, expliquant qu'il souhaitait désormais "finaliser rapidement" cet accord avec les pays du marché commun d'Amérique du Sud.
Or ces pays sont tous de gros producteurs de viande bovine. Leurs contraintes de qualité et leurs coûts de production sont très éloignés de ceux que rencontrent les éleveurs français qui craignent d'être submergés.
pas les mêmes coûts de production, ni les mêmes normes de qualité
En Limousin, depuis des années, la filière bovine a tout misé sur une production qui privilégie la qualité plutôt que la quantité, à l'opposé des élevage industriels en "feed lots" qui peuvent regrouper des milliers de têtes de bétail dans des fermes usines sur tout le continent américain.
Les négociations s'accélèrent avec l'Amérique du Sud mais elles se poursuivent aussi avec d'autres pays comme le Canada.
Un quota d'importation de 70 000 tonnes de viande bovine par an en Europe est évoqué pour le MERCOSUR.
Mais il y a quelques semaines un des principaux négociateurs de la Commission Européenne nous confiait en "off" qu'un plafond de 300 000 tonnes de viande bovine pour l'ensemble des négociations en cours lu avait été fixé.
les éleveurs ont peur de servir de variable d'ajustement
Quand on sait que le Limousin produit un peu plus de 72 000 tonnes de viande bovine par an on comprend mieux l'inquiétude des éleveurs régionaux.
Ils redoutent de servir de variable d'ajustement dans des négociations qui devraient, c'est vrai, débloquer de juteux marchés pour d'autres secteurs comme l'industrie, les services, et même l'agro-alimentaire.
La Confédération Paysanne, la Coordination Rurale, la FNSEA, INTERBEV et la Fédération Nationale Bovine protestent à l'unisson et expriment leur inquiétude.
Une inquiétude désormais largement partagée par plusieurs députés européens comme le limousin Jean-Paul Denanot ou l'aquitain Eric Andrieu.
En plus de la disparition pure et simple d'une filière, les deux euro-députés redoutent la désertification de certains territoires ruraux qui pourrait en découler.
#Mercosur : les paroles d’@EmmanuelMacron sont en totale incohérence avec ses actes... Bientôt de la viande sud-américaine en masse sur le marché européen ? https://t.co/zmOorjYgRZ
— Jean-Paul Denanot (@jpdenanot) 17 février 2018
.@EmmanuelMacron: Dire oui au #Mercosur ce n'est pas dire oui au boeuf aux hormones mais c'est dire oui à une viande venant d’animaux à la traçabilité quasi inexistante, élevés en batterie dans des #feedlots, nourries aux #OGM et aux farines animales et bourrés aux antibiotiques. pic.twitter.com/Uxcx2uDuBE
— Eric Andrieu (@EricAndrieuEU) 22 février 2018
NOTRE DOSSIER EN VIDEO :
INTERVIEW : Pierre Chevalier, ancien président de la Fédération Nationale Bovine et ancien lobyiste de l'élevage bovin à Bruxelles (COPA-COGECA) :