Manifestation de professionnels de la culture, enseignes de cinéma allumées, et même projections de films sans spectateurs… Partout en Aquitaine, le monde de la culture, privé de salles et d'événements, se mobilise pour faire part de son incompréhension face aux décisions gouvernementales.
Le rendez-vous est donné à midi, devant la préfecture de Bordeaux pour une grande manifestation réunissant des professionnels et des amoureux de la culture, pour protester contre les décisions gouvernementales.
Alors que le confinement est levé ce 15 décembre, avec toutefois un couvre-feu entre 20 heures et 6 heures du matin, les salles de spectacles doivent rester fermées jusqu'au 7 janvier au moins.
La culture à l'arrêt
Impossible également de se rendre au cinéma, au musée, ou de participer à un quelconque événement culturel. Un coup dur pour le secteur, alors que la période des fêtes est traditionnellement propice aux recettes. Et des décisions incompréhensibles pour les professionnels, qui assurent mettre en place des mesures sanitaires restrictives.
"Nous sommes ici pour manifester notre droit à exister, explique la cheffe d'orchestre Maria Luisa Marcellaro La Franca. Les prises de position du gouvernement ne sont pas cohérentes. Pourquoi peut-on s'entasser dans un centre commercial et on ne peut pas rester assis, dans le respect de la distanciation sociale dans une salle de spectacle ?"
Nous avons déjà adopté un protocole sanitaire strict avec un siège sur deux ou sur trois, qui impliquait des pertes économiques importantes. On a fait l'effort et là on se sent dépité, on ne nous donne même pas la possibilité d'être déficitaire dans nos concerts.
La musicienne réclame notamment la réouverture des cours de musique et des salles pour permettre aux musiciens de répéter.
Ecoutez Maria Luisa Macellaro la Franca, invitée du 12/13
Une demande de soutien financier
"Depuis le mois de mars, une partie importante de nos secteurs sont totalement à l’arrêt. Les spectacles « debout » comme les grandes jauges sont interdites. Les grands festivals n’ont pas eu lieu, annulés les uns après les autres. Les prestataires techniques pourvoyeurs d’emploi de technicien.ne.s ne peuvent plus travailler.
L’autre partie, les salles de théâtre, les scènes publiques, ont souffert d’une activité dégradée par les périodes de confinement, mesures de couvre-feu et les jauges réduites imposées dans la période", écrivent sur Facebook les organisateurs du rassemblement bordelais.
Les participants au rassemblement réclament eux un soutien financier de l'Etat, une garantie des droits sociaux et un protocole sanitaire adapté aux métiers de la culture.
Regardez le reportage de Gladys Cuadrat et Pascal Lécuyer
Au cinéma, des projections sans spectateurs
A Bordeaux, le cinéma Utopia a choisi de maintenir les diffusions de fils programmées pour ce jour. Et ce, sans aucun spectateur dans la salle. "Mardi 15, Mercredi 16, Samedi 19 et Dimanche 20 décembre, le cinéma Utopia de Bordeaux assurera symboliquement les séances initialement prévues dans son programme de réouverture.
Les projecteurs seront allumés, les salles seront dans le noir et les images défileront sur nos écrans, sans spectateurs pour les voir", écrit la direction dans un texte diffusé sur leur page Facebook.
"Un phénomène nous inquiète : le silence de nos salles"
"Un phénomène nous inquiète : le silence de nos salles, poursuit l'équipe en charge du cinéma. (…)
A l’heure où la plupart des commerces dispensables ou indispensables ont rouvert, il est plus que jamais temps de redonner vie – dans le respect de conditions sanitaires consciencieuses et équitables – à tous les lieux qui donnent la possibilité d’envisager le monde autrement qu'à travers des discours inféodés à l’argent, aux chiffres et aux experts"
L'équipe de l'Utopia accueillera le public en journée entre 14 heures et 19 heures afin d'échanger avec lui et "briser avec lui le silence".
A Sarlat, un "crève-coeur"
A Sarlat en Périgord, un rassemblement est prévu à 17 heures ce mardi, devant le cinéma le Rex, enseigne allumée. Son directeur Arnaud Vialle assure ne pas comprendre la décision de non réouverture. "On est complètement méprisés. On nous avait garanti qu'on allait pouvoir réouvrir. C'est un crève-coeur", déplore-t-il. En 2020, son établissement a perdu 650 000 euros de son chiffre d'affaire.
Je n'en dors plus la nuit. Ne plus pouvoir travailler, ne plus pouvoir accueillir les gens, ce n'est pas normal.
Regardez le reportage de France 3 Périgords
Une pétition nationale, à l'attention d 'Emmanuel Macron et réclamant des mesures d'urgence pour la culture a recueilli plus de 40 000 signatures.
La ville de Bordeaux se mobilise aussi en demandant au Premier ministre la réouverture des lieux culturels. Elle s’associe à la procédure commune de référé liberté lancée par les directrices et directeurs de compagnies, de théâtres et de structures culturelles.
Dans un communiqué, elle précise ses motivations : "La Ville de Bordeaux demande la prise en considération les efforts effectués, en responsabilité, par l’ensemble des salles, des musées et de tous les acteurs culturels pour assurer la sécurité de leurs publics. Et, en conséquence, d’autoriser leur réouverture au 15 décembre."
« Il en va, nous le croyons, de notre humanité commune », indique Pierre Hurmic dans un courrier adressé au Premier ministre.