La militante basque française Aurore Martin, a été remise en liberté contre une caution de 15.000 euros, un épilogue salué par les soutiens de la jeune femme comme un "apaisement" dans le processus de paix basque.
Trois juges de l'Audience nationale, plus haute instance pénale en Espagne, ont accordé cette libération sous contrôle judiciaire à Aurore Martin, 33 ans, recherchée pour avoir participé en Espagne à des réunions de Batasuna, mouvement interdit dans ce pays mais autorisé en France. Les magistrats ont estimé qu'il n'y avait pas de "risque de fuite". Elle devra se présenter entre le 1er et le 5 de chaque mois "au tribunal de son lieu de domiciliation en Espagne".
Selon son avocate Amaia Recarte, elle revient chez elle en France, et se rendra à ces rendez-vous, elle disposera en outre d'une adresse postale officielle, chez un avocat par exemple, pour que la procédure la visant en Espagne puisse se poursuivre. Batasuna, l'organisation nationaliste à laquelle Aurore Martin appartient, a lancé dès vendredi en France un appel à contributions en liquide, et a tenu aujourd'hui samedi des points de collecte, dans deux bars de Bayonne et Saint-Jean-Pied-de-Port.
La militante avait été arrêtée le 1er novembre à Mauléon (Pyrénées-Atlantiques) lors d'un contrôle routier de gendarmerie, puis remise à Madrid dans la foulée, en vertu d'un mandat d'arrêt européen (MAE) datant de 2010. Madrid la poursuivait pour des faits -présence lors de meetings, conférences de presse- liés à son appartenance à Batasuna, considéré en Espagne comme le bras politique de l'ETA. L'exécution du mandat d'arrêt avait suscité un émoi considérable au Pays basque français, mobilisant des élus de toutes tendances politiques, et avait généré un malaise dans la gauche française.
Le président François Hollande lui-même avait affirmé qu'"à aucun moment" l'exécutif n'avait donné "la moindre consigne" sur ce cas.
Le 10 novembre, l'arrestation d'Aurore Martin et son extradtion avaient donné lieu à une manifestation de 15.000 personnes à Bayonne, plus vaste rassemblement des dernières années en faveur des prisonniers basques. Vendredi, la députée européenne EELV Catherine Grèze, qui a rendu visite à Aurore Martin à la prison Soto del Real (nord de Madrid), a estimé que sa libération prochaine constitue "un pas de plus dans le processus de paix au Pays basque, qu'il faut désormais poursuivre", un an après l'annonce par l'ETA de son renoncement à la lutte armée, en octobre 2011.
Frédérique Espagnac, sénatrice PS des Pyrénées-Atlantiques, a salué un "signe d'apaisement important pour les fêtes de Noël au Pays basque". Depuis l'annonce de ETA, le mouvement nationaliste a dénoncé un "blocage" du processus de paix, Paris et Madrid exigeant la dissolution pure et simple de l'organisation séparatiste.
Dans ce contexte, l'arrestation d'Aurore Martin, un profil mineur à qui aucun fait grave n'est reproché, avait pris un relief disproprotionné, s'apparentant à "un marteau pour écraser une mouche", selon Henri Labayle, spécialiste de droit pénal à l'Université de Pau. Pour lui, la remise en liberté est donc "un désaveu qui ne dit pas son nom" de la procédure utilisée pour une affaire aussi mineure; mais aussi "la confirmation qu'on peut avoir confiance en la justice espagnole".