Affaire Bettencourt : un avis décisif attentu ce matin à Bordeaux

La cour d'appel de Bordeaux doit rendre mardi un arrêt crucial dans l'affaire Bettencourt, en validant ou non l'expertise au coeur du dossier, non sans conséquences pour Nicolas Sarkozy.

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De cette expertise dépend la validité de la plupart des douze mises en examen dans ce dossier, puisque si la vulnérabilité de Mme Bettencourt n'est pas établie, les abus à son égard ne peuvent l'être.

Ainsi, si l'expertise était annulée, les juges seraient contraints de revoir une bonne partie de leur copie, au point de retarder de nombreux mois encore l'enquête, voire d'annuler des mises en examen, comme celle de l'ancien président, soupçonné d'avoir bénéficié de largesses de la milliardaire pour sa campagne en 2007.

Selon les avocats des douze mis en examen dans ce volet de l'enquête Bettencourt, l'expertise est entachée de nullité pour divers motifs. Premièrement, elle a été réalisée sous la direction de la légiste Sophie Gromb, dont la proximité est jugée trop importante avec Jean-Michel Gentil - un des trois juges en charge du dossier - puisqu'elle figure parmi les témoins de son mariage.
Ensuite selon eux, le juge a notamment choisi pour l'accompagner lors de l'examen de Mme Bettencourt un matin de juin 2011 au saut du lit, deux neurologues ne figurant pas sur la liste des experts de la Cour d'appel de Bordeaux alors qu'une experte de ce ressort était disponible, ce qu'il a omis de préciser.

Enfin, selon la défense, le juge a commis une erreur de droit pour justifier la mise en examen de Nicolas Sarkozy en lui appliquant une disposition pénale postérieure aux faits et plus sévère que la précédente.

Lors de l'audience, sur cette question et sur d'autres nullités soulevées par la défense, l'avocat général Pierre Nalbert avait, lui, conclu à la validité de l'expertise, ne requérant que des annulations d'actes mineures.

La plupart des observateurs du dossier doutent cependant que les magistrats désavouent les trois juges d'instruction au point de ruiner trois ans de travail. L'un d'entre eux souligne aussi que la culpabilité de certains des protagonistes pourrait être établie sans qu'il soit besoin de s'appuyer sur l'expertise.

Reste une dernière menace sur cette instruction délicate, en la forme d'une demande de récusation des juges, déposée par deux des mis en examen, François-Marie Banier, l'artiste ami de Mme Bettencourt, et Patrice de Maistre, ancien gestionnaire de fortune de la nonagénaire.

La demande devra être tranchée prochainement par la première présidente de la Cour d'appel, Chantal Bussière, et porte également en grande partie sur les liens entre le juge et l'experte médicale. Là encore, les conséquences d'une récusation seraient un délai très long avant la conclusion du dossier par de nouveaux juges.

Dans l'hypothèse où il n'y aurait ni annulation de l'expertise ni récusation de juges, ces derniers pourraient rendre enfin, dans les prochaines semaines, l'ordonnance par laquelle ils diront qui, des douze mis en examen, doit être jugé par le tribunal correctionnel, et qui doit en définitive bénéficier d'un non-lieu.

Le 28 juin, le parquet de Bordeaux a requis six non-lieux. Il a notamment considéré "qu'aucune charge" ne pèse contre Nicolas Sarkozy et son ancien trésorier de campagne, l'ex-ministre Eric Woerth. Il a requis le renvoi de l'autre moitié des protagonistes, dont MM. Banier et De Maistre. Or, selon le Canard enchaîné de mercredi, le juge Gentil s'apprêterait à accorder un non-lieu à l'ex-président de la République. On observe qu'à quelques jours de cette ordonnance M. Sarkozy et son conseil Me Thierry Herzog, en pointe dans la dénonciation des méthodes du juge, ne se sont pas associés à la requête en récusation des juges.

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