Les députés ont adopté vendredi dernier la pénalisation des clients, la disposition la plus controversée du texte du projet de loi sur la prostitution. Cette mesure punit l'achat d'actes sexuels d'une contravention de 1 500 euros. Le texte dans son ensemble sera voté le 4 décembre.
Le débat en cours à l'Assemblée Nationale
La proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel prévoit de sanctionner les clients et d'abroger le délit de racolage, mais contient aussi des dispositions pour accompagner les personnes souhaitant sortir de la prostitution.Ce qu’en pensent les prostituées
Denise est en colère. Elle se prostitue à Bordeaux depuis 47 ans et revendique le droit de travailler dans la mesure où elle est déclarée. Avec d’autres, elle s’est battue dans les années 80 pour défendre sa liberté et dénonce aujourd’hui le projet de loi. Selon elle, le gouvernement fait l’amalgame entre les réseaux de prostitution qui s’apparentent à la traite d’êtres humain, et le travail des prostituées établies comme elle.Regardez ce reportage de Marie Neuville et Pascal Lecuyer
Ce que prévoit la proposition de loi
Responsabiliser le client- Création d'une contravention de 5e catégorie (amende de 1.500 euros) pour les clients ayant recours à la prostitution d'une personne majeure. La récidive sera un délit puni de 3.750 euros d'amende (Le recours à une prostituée mineure, enceinte ou handicapée est déjà sanctionnée de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende).
- Création d'un "stage de sensibilisation à la lutte contre l'achat d'actes sexuels" qui peut être une peine alternative aux poursuites ou complémentaire, sur le modèle des stages de sensibilisation à la sécurité routière. A la charge du client, ce stage se déroulera auprès d'associations agréées.
- Le délit de racolage public, qui sanctionne "le fait par tout moyen, y compris par une attitude même passive, de procéder publiquement au racolage d'autrui en vue de l'inciter à des relations sexuelles en échange d'une rémunération", est abrogé. Créé en 2003, ce délit était passible de deux mois d'emprisonnement et de 3.750 euros d'amende.
- Mise en place au niveau départemental d'une instance de coordination de l'action en faveur des victimes de la prostitution réunissant parquet, services de police et de gendarmerie, services préfectoraux, élus locaux et associations.
- Instauration d'un système de protection et d'assistance pour les victimes de proxénétisme, et création d'un "parcours de sortie de la prostitution" pour celles qui en font la demande, via une association agréée. Elles pourront bénéficier d'une aide financière à l'insertion sociale et professionnelle.
- Création d'un fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées, abondé par des crédits de l'Etat, la confiscation des biens issus du proxénétisme et un prélèvement du produit des amendes pour recours à la prostitution. Le gouvernement s'est engagé à doter ce fonds de 20 millions d'euros.
- Autorisation provisoire de séjour de six mois (et droit au travail) pour les prostituées étrangères victimes de proxénétisme et engagées dans un parcours de sortie de la prostitution sans qu'elles soient obligées de dénoncer leur réseaux.
- Renouvellement, jusqu'à la fin de la procédure judiciaire, du titre de séjour délivré pour les personnes prostituées qui témoignent ou portent plainte contre leur réseau de proxénétisme.
- Octroi de places en centres d'hébergement pour les victimes de proxénétisme et de traite.
- Les prostituées sont ajoutées à la liste des personnes vulnérables entraînant une aggravation des sanctions en cas de violences, d'agressions sexuelles ou de viols.