Procès Bettencourt: Woerth et De Maistre reviennent à Bordeaux, jugés pour "trafic d'influence"

Un emploi en échange d'une Légion d'honneur? Un mois après les centaines de millions d'euros du procès pour abus de faiblesse au détriment de Liliane Bettencourt, Eric Woerth et Patrice de Maistre, reviennent lundi au tribunal correctionnel de Bordeaux, jugés cette fois pour "trafic d'influence".

Y a-t-il eu ou non, entente entre les deux hommes au printemps-été 2007 (M. Woerth était alors trésorier de l'UMP, avant de devenir en mai ministre du Budget), pour obtenir la Légion d'honneur à M. de Maistre, en contrepartie d'un emploi pour l'épouse de l'élu UMP chez Clymène, la société gérant les dividendes tirés par les Bettencourt du groupe L'Oréal, et dont M. de Maistre était directeur-général ?
Loin des cinq semaines d'audience consacrées à dix prévenus, achevées fin février, trois à quatre jours seulement sont programmés pour le procès des deux hommes, pour lesquels le parquet avait initialement requis le non-lieu, en mai 2013.

Simple proximité, ou cause à effet ? 

Le parquet avait alors estimé que la preuve du "lien de cause de à effet" entre la décoration attribuée à M. de Maistre et le recrutement de Florence Woerth "n'a pu être formellement rapportée". Les juges d'instruction, autour du juge Jean-Michel Gentil, ont pourtant décidé de renvoyer les deux hommes: M. de Maistre, 66 ans, pour trafic d'influence actif, et Eric Woerth, 59 ans, pour trafic d'influence passif.
Au procès de février, M. de Maistre était jugé pour abus de faiblesse à l'encontre de la milliardaire, et blanchiment. M. Woerth pour recel d'abus de faiblesse (une somme en liquide qu'il était soupçonné d'avoir reçue de lui). A l'audience, le ministère public a requis un non-lieu pour l'ex-ministre,
qui n'a guère été inquiété à la barre. Contre M. de Maistre, davantage malmené, il a requis trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis, et 375.000 euros d'amende. Le jugement sera rendu le 28 mai.

L'avocat de M. Woerth, Jean-Yves le Borgne, dénonce dans le procès à venir "le même processus mental abusif" qu'en février, qui lierait
"concomitance et causalité", et voudrait "que la proximité de la Légion d'honneur à M. de Maistre et du recrutement à Mme Woerth implique
qu'il y ait eu lien de causalité, combine à la clef". D'autant plus, estime-t-il qu'il n'y a "rien d'extraordinaire", dans l'un et l'autre faits: la Légion d'honneur pour quelqu'un du profil de M. de Maistre, ou le recrutement de Mme Woerth, précédemment employée dans une banque spécialisée dans la gestion de patrimoines.

D'autres procès à venir 

L'enquête avait démarré dans le sillage des enregistrements clandestins réalisés en 2009-10 par l'ex-majordome de Mme Bettencourt, Pascal Bonnefoy. Dans l'un d'eux, M. de Maistre évoque le recrutement de Mme Woerth. Le dossier s'appuie aussi sur des échanges de correspondance entre les deux hommes, et d'apparentes contradictions dans leurs déclarations.
Comme en février, la nature des relations entre MM. Woerth et de Maistre, ainsi que les affinités et l'implication politiques ce dernier, devraient être examinées par le tribunal. Au procès de janvier, l'ex-gestionnaire de la 1e fortune de France avait expliqué appartenir au "premier cercle" de donateurs UMP, et qu'il avait contribué à titre personnel, en toute légalité et transparence, aux campagnes de MM. Sarkozy et Woerth.
Les prévenus encourent dix ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende, éventuellement assorties d'interdiction des droits civiques ou d'exercer une fonction publique.

La même équipe de magistrats qui a présidé au procès pour abus de faiblesse officiera: le président Denis Roucou, salué alors par toutes les parties pour sa gestion des débats, à la fois ferme et à l'écoute, ainsi que le vice-procureur Gérard Aldigé.

A l'issue de ce deuxième procès, Bordeaux n'en aura pas fini avec le tentaculaire dossier Bettencourt. Les 8 et 9 juin, le tribunal évoquera le volet "violation du secret professionnel", en lien avec la révélation dans Le Monde en 2010, d'une perquisition menée chez Liliane Bettencourt. La juge d'instruction de Nanterre, Isabelle Prévost-Desprez, est soupçonnée d'avoir donné cette information à des journalistes.
Enfin, dans le volet "atteinte à l'intimité de la vie privée", six personnes doivent être jugées, à une date qui n'a pas encore été arrêtée: l'ex-majordome, Pascal Bonnefoy, auteur des enregistrements clandestins qui ont précipité l'affaire, et cinq journalistes du Point et de Mediapart, qui en avaient publié des extraits.
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