L'ex-ministre UMP Éric Woerth a catégoriquement nié lundi avoir "négocié" l'embauche de son épouse en 2007 en contrepartie d'une Légion d'honneur pour Patrice de Maistre, faits pour lesquels les deux hommes sont jugés à Bordeaux dans le deuxième volet de "l'affaire Bettencourt".
"Je n'ai pas négocié cette Légion d'honneur, je n'ai pas négocié l'embauche de mon épouse", a martelé M. Woerth devant le tribunal correctionnel de Bordeaux.
Il comparaît jusqu'à mercredi pour trafic d'influence, au côté de Patrice de Maistre, ancien gestionnaire de la femme la plus riche de France, qui embaucha Florence Woerth en 2007 dans la société gérant cette fortune.
La Légion d'honneur et cette embauche, "ce sont deux droites parallèles, deux bons dossiers, qui ne se rejoignent pas", n'ont "strictement rien à voir", a insisté M. Woerth, qui était à l'époque trésorier de l'UMP, puis de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. En mai 2007, il deviendra ministre du Budget.
Pour M. Woerth, longuement questionné par le président du tribunal, Denis Roucou, la décoration qu'obtint M. de Maistre, et qu'il assume avoir soutenue par une lettre adressée à M. Sarkozy, "est une histoire assez banale de Légion d'honneur", "d'intervention de personnes", en l'occurrence la proposition d'un conseiller de son cabinet, qui connaît M. de Maistre.
"J'identifie le potentiel de M. de Maistre dans le cadre de cette campagne" 2007, a-t-il dit. Déjà décoré depuis 2007 de l'Ordre national du Mérite, celui-ci est membre du "premier cercle" de donateurs de l'UMP, n'est "pas un gros financeur personnellement", mais est "quelqu'un qui nous aide, nous présente un certain nombre de gens" et a "un très bon profil".
Aiguillonné par le président, M. Woerth a tenu à pourfendre l'idée d'automaticité entre l'aide apportée à une campagne électorale et Légion d'honneur. "Je ne dis pas: c'est parce qu'on fait la campagne qu'on a la Légion d'honneur. C'est parce qu'à ce moment-là (la campagne), on est identifié, et si on a le profil", qu'on peut avoir la prestigieuse décoration, s'est-il vivement défendu.
Dans ce deuxième volet de la nébuleuse d'affaires Bettencourt, les deux hommes encourent jusqu'à 10 ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende, éventuellement assortis d'interdiction des droits civiques ou de fonction publique.
Dans le volet "abus de faiblesse" jugé en février, le ministère public avait requis un non-lieu pour M. Woerth, et trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis, et 375.000 euros d'amende à l'encontre de M. de Maistre. Jugement le 28 mai.
Personnes interviewées dans le reportage : Jean-Yves Le Borgne (avocat d'Eric Woerth), Jacqueline Laffont (avocat de Patrice De Maistre).