Changement climatique et montée des eaux : la difficile modélisation des risques sur le littoral néo-aquitain

Selon le dernier rapport des experts du Giec, la montée des océans provoquée par le changement climatique est inéluctable. Inondations, recul du trait de côte, les conséquences seront majeures sur le littoral aquitain. Mais il est très difficile de prévoir avec certitude ce qu'il va se passer.

Le Cap Ferret aura-t-il disparu sous les effets conjoints de la hausse du niveau des océans et de l'érosion en 2100 ? À quoi ressemblera alors la pointe du Médoc, qui recule déjà d'année en année lors des tempêtes hivernales ? 

Alors que les climatologues du Giec ont une nouvelle fois lancé l'alerte sur la rapidité du réchauffement de la Terre, notre littoral aquitain est particulièrement exposé. Mais il est très difficile, sinon quasi impossible, d'en prévoir les conséquences concrètes aujourd'hui. 

Trop de facteurs entrent en jeu 

Goneri Le Cozannec, ingénieur au BRGM, Bureau de recherches géologiques et minières, a élaboré une carte qui permet de visualiser les zones exposées à la submersion marine selon le niveau de montée des eaux.

"Si cette carte s'appuie sur des données topographiques plus fines que celles réalisées jusqu'à présent, elle reste limitée" souligne-t-il, car "un seul facteur est pris en compte, celui de la montée des eaux".

Le recul du trait de côte, des éventuels changements de courant, la nature (rocheuse ou sableuse) des zones concernées ne sont pas pris en compte. "Pour l'instant, nous ne sommes pas capables de créer des modélisations intégrant tous ces facteurs", explique Goneri Le Cozannec. 

Carte : Zones exposées à l'élevation du niveau de la mer à marée haute (source BRGM - IGN - SHOM) 

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Même si c'est très complexe, les chercheurs tentent d'anticiper au maximum les phénomènes à venir, notamment pour aider à la prise de décision sur l'aménagement du territoire.

L'augmentation du niveau des océans, c'est le facteur prépondérant. La hausse est continue, et on sait que cela va augmenter.

Thomas Bulteau, ingénieur risques côtiers à l'Observatoire de la Côte Aquitaine et BRGM 

C'est le travail de Thomas Bulteau, ingénieur risques côtiers à l’Observatoire de la côte de Nouvelle-Aquitaine. Cette structure réunit différents acteurs, qui sont le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minière), l'ONF ( Office National des Forêts), l'Etat, la région, et les départements des Landes, des Pyrénées-Atlantiques et de la Gironde, bientôt rejoints par la Charente-Maritime. 

"Nous avons trois missions, qui sont l'observation et l'acquisition de données, l'accompagnement des collectivités publiques, et d'être un centre de ressources, de communication et de pédagogie sur les phénomènes qui touchent la côte aquitaine", détaille Thomas Bulteau. 

"Le phénomène de l'érosion et du recul du trait de côte préexistent au réchauffement climatique. Cela va s'accélerer avec le changement climatique, mais on ne connaît pas encore l'ampleur de l'accélération, qui devrait commencer à être visible à partir de 2050", souligne-t-il. 

La saison des tempêtes hivernales de 2013-2014 a été particulièrement forte, et a fait reculer la plage jusqu'à 40 mètres, dans le nord du Médoc. On a repris quelques mètres ensuite, mais quand le sable est parti, il ne revient plus.

Thomas Bulteau, ingénieur en risques côtiers au BRGM et Observatoire de la côte Aquitaine

"Repli stratégique": faudra-t-il déménager des villes ? 

Même s'il est impossible de prévoir précisément ce qu'il va se passer, les collectivités locales doivent se préparer aux changements dès maintenant. Le long du littoral aquitain, huit communes ou communautés de communes travaillent déjà avec l'Observatoire de la Côte Aquitaine dans cette optique. 

C'est notamment le cas de Lacanau, et son projet "Lacanau-2050", qui envisage deux scénarios : la construction d'ouvrages de protection, ou carrément la relocalisation, c'est-à-dire le déménagement d'une partie de la commune, dont 1.200 logements et 120 commerces. "C'est ce qu'on appelle le repli stratégique", détaille Thomas Bulteau. 

Ce n'est pas parce que nous ne comprenons pas encore tout qu'il ne faut pas prendre des décisions dès aujourd'hui. On peut aussi mettre en place des mesures peu coûteuses, que l'on appelle "sans regret". C'est par exemple le fait de ne plus construire de parking juste derrière les dunes. En allant un peu plus loin, on permet à la dune d'évoluer plus naturellement. 

Thomas Bulteau, ingénieur risques côtiers

6.000 logements menacés à l'horizon 2050

Selon l'Observatoire de la Côte Aquitaine, selon des chiffres établis en 2017, 3.000 logements seront menacés à l'horizon 2050 sur la côte sableuse (Gironde et Landes) si aucun ouvrage de protection n'est construit, et 2.800 logements sur la côte rocheuse basque "en tenant compte de la probabilité de survenance de mouvements de falaise". 

À plus court terme, les scientifiques de l'Observatoire estiment que "160 logements seraient menacés sur le très court terme dans les prochains hivers sur la côte aquitaine en cas d'évènements majeurs de tempête ou de mouvements de falaise". 

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