Coronavirus : en Charente-Maritime, les professionnels du tourisme de plein air réclament des mesures fortes

Indétrônable de son podium de destination favorite des Français, la Charente-Maritime et ses campings proposent chaque année 150.000 lits aux vacanciers. Une économie fondamentale désormais ébranlée par la crise du coronavirus. Pourtant la filière reste confiante, sous conditions.

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"La situation n’est pas catastrophique, pour le moment, en revanche, elle est préoccupante."Nicolas Staffelbach, le directeur du camping 5 étoiles Sandaya Séquoia Parc à Saint-Just-Luzac en Charente-Maritime ne se cache pas derrière son petit doigt.

L’annonce par le président de la République d’une prolongation du confinement jusqu’au 11 mai prochain a déjà des répercussions sur le site dont il a la charge. Ici, ce sont 120 salariés qui travaillent au plus fort de la saison en juillet-août, sur les 45 hectares du domaine. La saison débute en mai et cette année, elle débute très mal.

Les mois de mars, avril et mai sont perdus.

"Nous avons dû stopper les recrutements, nous devions ouvrir le 20 mai avec près de quatre vingt salariés", explique le directeur du camping qui a dû placer une partie de ses quinze collaborateurs permanents en chômage partiel. "Depuis le début de la crise sanitaire, nous ne déclenchons plus de ventes et à ce titre les mois de mars, avril et mai sont perdus." 
Jean-Baptiste Dagréou confirme. Ce propriétaire de deux campings à Chatelaillon-Plage à côté de La Rochelle est aussi le président de la fédération de l’hôtellerie de plein air de Nouvelle-Aquitaine. "J’ai perdu énormément. A Pâques, je suis normalement complet avec le festival du cerf volant [qui aurait dû se tenir le week-end de Pâques, ndlr], idem pour le premier et le huit mai. Et tout cela est perdu", déplore t-il.

Peu de réservations en vue

L’autre difficulté pour ces professionnels du tourisme de plein air, ce sont les annulations de certains clients. "Les réservations représentent 25% du montant d’un séjour et ce flux de liquidité est indispensable pour beaucoup d’entre nous car il permet de payer nos salariés qui préparent la saison", explique Jean-Baptiste Dagréou. "Et si nous devons rembourser ces sommes, beaucoup d’entre nous n’en n’auront pas les moyens." 
Pour l’heure, la majorité des établissements indépendants ou appartenant à un groupe proposent des avoirs à leur clients afin qu’ils reportent leur séjour à une date ultérieur. Mais là encore, bon nombre de questions taraudent ces chefs d’entreprises. 

La crise sanitaire nous pousse à innover 
 - Nicolas Staffelbach

"Nous attendons les arrêtés ministériels et le détail des mesures annoncées par le président de la République", indique le directeur du camping Sandaya de Saint-Just-Luzac. "Il s’agit pour nous de savoir dans quelles conditions nous pourrons accueillir de nouveau du public, car en pleine saison nous comptons jusqu’à 4000 personnes par jour. C’est l’équivalent d’une petite ville !" souligne-t-il. "Du coup, cela nous pousse à anticiper et à innover afin de sécuriser nos clients. Car il ne faut pas rêver, même si le virus disparaît, il sera toujours dans la tête des gens. En conséquence, nous réfléchissons par exemple à des animations, comme les cours de gymnastique, que nous pourrions proposer en visioconférence dans les lodges, ou encore un service de vente à emporter avec possibilité de se faire livrer comme pour les courses de notre supérette."

Car l’un des enjeux se trouve là : comment faire revenir les clients ? D’autant "qu’une bonne partie d’entre eux vont se retrouver avec des salaires amputés", souligne Jean-Baptiste Dagréou. "Lorsqu’un salarié ne perçoit, dans le meilleur des cas, que 84% de son salaire, aura-t-il encore les moyens de venir ?" s’interroge le patron de la fédération de l’hôtellerie de plein air de Nouvelle-Aquitaine. "C’est pour cette raison que nous serons particulièrement vigilants sur les mesures d’accompagnement annoncées par Emmanuel Macron." Une préoccupation partagée par Nicolas Staffelbach : "nous attendons de voir ce qui va nous être proposé, notamment sur les charges sociales qui pourraient ne plus être reportées mais carrément annulées."

Le tourisme en Charente-Maritime : une économie d’un milliard huit cent millions d’euros 

"Ce que nous demandons au gouvernement, ce n’est pas de nous donner de l’argent, c’est de ne pas nous en faire perdre", précise Jean-Baptiste Dagréou et de souligner que la fédération nationale de l’hôtellerie de plein air est actuellement en pleine négociation afin d’obtenir une année blanche sur les emprunts, les charges sociales et la TVA. "Cette fois, il n’est plus question de 6 mois de report mais d’une année complète. Il s’agit de sauver nos entreprises", souligne avec vigueur le représentant de la filière, qui compte plus de 350 campings en Charente-Maritime.

Stéphane Villain promet de veiller au grain. Il faut dire que le président de Charentes Tourisme et vice-président du Conseil départemental prend toute la mesure de la situation. "La Charente-Maritime vit essentiellement grâce au tourisme. Cela représente un milliard huit cent millions d’euros alors on ne peut pas laisser la situation sans rien faire, ce serait une catastrophe", indique-t-il en précisant que le département a demandé à rejoindre le tour de table du Conseil régional, car c’est lui qui est compétent en matière d’aide aux entreprises.

Nous avons été capable de repartir après Xynthia, nous devrions y parvenir de nouveau.
 - Stéphane Villain

"Nous travaillons avec le président du département, Dominique Bussereau, sur le plan de reprise de l’activité et nous comptons aussi beaucoup sur le passage du Tour de France en Charente-Maritime. J’ai eu Christian Prudhomme, le patron du Tour hier [lundi 13 avril, ndlr] au téléphone. L’idée serait de décaler la Grande boucle vers fin août, début septembre. Cette opportunité d’adresser une carte postale de notre département à plus de 90 pays à travers le monde est idéale. En matière de com’, on ne pas faire mieux !" s’enthousiasme Stéphane Villain.

Même avec un genou à terre, la filière de l’hôtellerie de plein air de Charente-Maritime reste confiante et veut faire preuve d’optimisme. "Si nous pouvons ouvrir en juin et pousser jusqu’en octobre, on peut s’en sortir", estime Jean-Baptiste Dagréou "À la condition, encore une fois, que nous soyons aidés" précise-t-il.

Et le vice-président de Conseil départemental, Stéphane Villain, de conclure : "Nous avons été capable de nous organiser et de repartir après le passage de la tempête Xynthia en aidant beaucoup de ces entreprises qui avaient été frappées par la catastrophe. Nous devrions donc pouvoir y parvenir de nouveau."

 
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