Le chanteur du groupe français Feu! Chatterton, Arthur Teboul, et le pianiste jazz Baptiste Trotignon forment une paire piano-voix inédit. Le début de leur tournée débute cette semaine, pour la 40ᵉ édition des Francofolies de La Rochelle.
Arthur Teboul, chanteur du groupe pop-rock Feu! Chatterton, et Baptiste Trotignon, compositeur et pianiste jazz, interprètent de nombreux titres classiques de la chanson française, de Brel à Higelin, en passant par Henri Salvador et Barbara. Avec leur album intitulé "Piano voix", le duo débute sa tournée aux Francofolies de La Rochelle. Entretien.
Comment votre duo est-il né ?
Arthur Teboul : Notre rencontre est due au regretté Jean-Philippe Allard, qui nous a quittés il y a quelques semaines. Il était mon manager et un grand producteur de jazz en France. C'était une personne très importante dans la musique, une personne d'exception. Ce fut à l'occasion du Piano Day en 2022 : il nous a proposé, à nous deux, de faire un spectacle. Seulement pour un soir, sur 40 minutes. Et c'est comme cela que l'on s'est rencontré, parce que l'on ne se connaissait pas, on ne vient pas du même monde. On s'est rendu compte que l'on partageait le même amour de la chanson française avec Jacques Higelin, Charles Trenet... Et on s'est dit que c'était chouette de monter un concert de reprises de chansons françaises.
Quel regard vous portiez sur Arthur avant de le rencontrer ?
Baptiste Trotignon : Je n'avais pas de regard sur lui, parce que je ne le connaissais pas, ou très peu. Jean-Philippe Allard avait ce don de la rencontre, en mêlant des gens différents, mais des gens ouverts les uns sur les autres. Arthur vient plus du rock, de la chanson, mais il a des oreilles également sur autre chose. Moi, je viens plus de la musique européenne, jazz, voire afro-américaine. À partir de là, c'était un challenge de monter quelque chose, mais ça s'est fait très simplement entre nous.
L'idée, c'est d'inviter les gens dans quelque chose de poétique, plutôt que d'être dans un truc plus solennel.
Baptiste TrotignonCompositeur et pianiste de jazz
Arthur Teboul : On s’est rencontré dans son studio, au fond de sa petite maison. J'avais l'impression d'être un élève qui reprend des cours. Pour moi, le piano voix est une nudité totale. J'ai l'habitude d'être en groupe, avoir des musiciens très puissants, de pouvoir me protéger en quelque sorte. Cette nudité, cette fragilité, cette vulnérabilité, elle me parle et c'est ce qu'il me plaît dans la musique. Il a fallu 15 ans de métier pour oser cette nudité et reprendre ce type de chansons.
Baptiste Trotignon : On ne voulait pas que cet album devienne un hommage à la chanson française, que l'on retrouve un petit côté "tarte à la crème". Arthur a un rapport à la poésie qui est très fort, quand moi, j'ai un rapport au son qui est très important. L'idée, c'est d'inviter les gens dans quelque chose de poétique, plutôt que d'être dans un truc plus solennel. C'est pour cela que l'on retrouve sur l'album des chansons très connues, mais aussi des chansons moins connues des interprètes que sont Gainsbourg ou Barbara.
Racontez-moi pourquoi avoir choisi d'interpréter Göttingen de Barbara...
Arthur Teboul : On ne voulait pas que cet album soit trop magistral ou écolier. Faire quelque chose de plus intime et plus personnel. On essaye de s'approprier, sans rendre hommage. Plutôt devenir des passeurs et de faire découvrir aux gens des grandes chansons de mes idoles tels que Barbara, Brel, Ferret, Higelin, qui m'ont donné envie de devenir chanteur, de faire de la musique. Le meilleur moyen pour nous, c'était d'oublier le poids de ces modèles pour rappeler pourquoi leurs chansons nous touchaient et ce qu'elles racontent.
Notre concert aux Francos est symbolique, puisque c'est notre premier concert de la tournée
Arthur TeboulChanteur et membre du groupe Feu! Chatterton
On a sorti deux morceaux pour l'instant, dont Göttingen, de Barbara. Elle a une pureté intemporelle, mélodique, presque une comptine d'enfant. Elle nous touche : quand on la joue, on doit retenir nos larmes. Elle raconte, avec des mots simples, l'après de la Seconde Guerre mondiale. Elle essaye de penser à l'après, à l'avenir, de chercher la paix. Ce sont des paroles et des mots qui résonnent particulièrement fort aujourd'hui. Les grands textes restent actuels et traversent notre humanité, ils sont plus grands que ceux qui l'ont écrit.
Faire les Francos, c'est quelque chose qui vous fait plaisir, j'imagine...
Baptiste Trotignon : C'est différent entre Arthur et moi. C'est la première fois que je joue aux Francos. Tandis qu'Arthur, lui a déjà joué avec Feu! Chatterton. Mais c'est cela qui est intéressant : on a une connaissance de ce métier qui est différente, mais on s'observe l'un l'autre. Pour cet album, le fait de jouer des reprises, c'est la base du jazzman. Ici, il fallait trouver une forme noble de la simplicité. Les ramener à l'essentiel.
Arthur Teboul : Notre concert aux Francos est symbolique, puisque c'est notre premier concert de la tournée. Ce n'est pas rien ! On a une certaine pression, car il y aura du monde. Dans le public, il y a des gens qui s'y connaissent, qui ont une certaine affection, voire qui sont possessifs avec ces chansons françaises. Débuter notre duo ici, pour cette tournée, c'est beau.