C'est un mets d'exception qui incarne à lui seul une certaine idée du luxe : le caviar. Durant cette fin d'année, il sera peut-être présent sur votre table. L'occasion de découvrir ou de redécouvrir sa production sur notre territoire, héritier d'un savoir-faire plus que centenaire. Direction, le sud de la Charente-Maritime.
C’est ici, dans ces étangs du sud de la Charente-Maritime, à Saint-Genis de Saintonge, que débute la saga du caviar. Le jour se lève tout juste : Guillaume et ses collègues entament les opérations de pêche des esturgeons, ces poissons millénaires qui recèlent l’or noir. “Il faut les manipuler avec délicatesse. On les prend comme ça, et après, on les met dans la cuve, avec douceur, explique Guillaume Michaud, responsable adjoint du site piscicole Sturgeon. Ceux-là, ce sont des 2018, ils ont cinq ans.”
Un poisson, une échographie
Les poissons sont ainsi collectés avec précaution dans ces grosses cuves. Tous ne seront pas pêchés, car seule une partie de l’étang est concernée par l’opération du jour. “On pêche juste le nombre nécessaire dont on a besoin pour travailler la journée. Et la pêche de cet étang va durer au moins sept jours, avance Nicolas Proust, responsable de production piscicole Sturgeon.
Une fois pêchés, les esturgeons sont acheminés à quelques centaines de mètres de là sous un tivoli. Une sorte de gare de triage où chaque poisson est examiné en passant une échographie.
En moyenne, les œufs font entre 2,5 et 3 cm
“Toutes les petites billes en surbrillance là, c’est la périphérie des œufs. L'écran me sert à déterminer la taille des œufs et leurs différents stades de croissance, indique Christophe Baudon, responsable du site, tout en montrant son écran. Dont les petits gris qui seront du caviar l’année prochaine, le caviar printemps, qui sera bon au mois de mars 2024 et le caviar hiver, celui que l’on sélectionne maintenant avant affinage et transformation.” Les poissons qui ne sont pas prêts sont remis à l’eau. Ils seront pêchés de nouveau dans quelques mois.
Les autres sont abattus et leurs œufs sont prélevés dans un laboratoire à Saint-Fort-de-Gironde, avant d’être triés puis assemblés par couleur, fermeté et surtout par taille. “Là, je suis en train de mesurer la grosseur des œufs. On prend dix œufs que l’on mesure pour savoir dans quelle catégorie je peux les placer, raconte Magdalena Puaud, responsable assemblage. En moyenne, les œufs font entre 2,5 et 3 centimètres. Quand ils sont au-dessus de trois centimètres, ça passe en prestige.”
1 200 à 8 000 euros le kilo
Les œufs sont ensuite passés au tamis avant d’être lavés. Des étapes incontournables avant l’ultime opération qui transformera ces œufs d’esturgeon en caviar : le salage. Et là encore, la règle est stricte. “212. 212,42 grammes. Le sel doit vraiment être calculé au gramme près, au poids de la bassine et bien mélangé, relate Florence Semillom, agent de production. C’est seulement après que le caviar pourra être conditionné.”
“On est le chef de file du caviar français, précise Laurent Dulau, directeur général du groupe Caviar. En France, on produit une cinquantaine de tonnes et dans le monde à peu près 600 tonnes. Donc l'Hexagone représente grosso modo 8% de la production mondiale, dont 3% vient de chez nous.”
Une production prisée, qui offre pas moins de douze variétés de caviar, issues de trois espèces différentes d’esturgeons. Des saveurs d’exception dont les prix oscillent entre 1 200 à 8 000 euros le kilo. Un luxe qui fait rayonner la Charente-Maritime bien au-delà des frontières de l’Hexagone.