Pour tous les amoureux de voile, Bernard Moitessier et Joshua font partie de la légende. Le fameux ketch vient d'être remis à l'eau à La Rochelle après une restauration exemplaire. Un rendez-vous important pour toutes celles et ceux qui ont œuvré à cette résurrection.
Jojo, c'est un monument. Son retour sur les flots après quatre ans au sec est comme une fête.
Compagnon d'âme
Bernard Moitessier l'avait imaginé en bois, il sera finalement en acier. Construit au gré des rencontres, de la débrouille et d'un petit budget, c'est en 1961 le troisième ou quatrième bateau du marin vagabond qui sillonne déjà les mers du globe depuis vingt ans.
"Il suffit d'avoir lu le livre, et on comprend que l'objectif, c'était pas d'avoir un bateau de série, mais de bricoler pour pouvoir naviguer plus qu'autre chose" commente François Lesineau, du chantier nautique du Vieux port.
Porté par les vies aventureuses et littéraires de Baudelaire, Rimbaud, Henry de Monfreid ou Joseph Kessel, Moitessier baptisera cette coque d'acier Joshua, en l'honneur du grand marin Joshua Slocum, premier à effectuer un tour du monde en solitaire à la voile entre avril 1895 et juin 1898.
Joshua sera pendant vingt ans le compagnon de route de Bernard Moitessier, et de son épouse Françoise parfois. C'est avec Joshua que le navigateur écrivain tracera, et écrira sa fameuse longue route, un tour du globe et demi en solitaire sans escale où il se soustrait au retour vainqueur du Golden Globe : "Je continue sans escale vers les îles du Pacifique, parce que je suis heureux en mer, et peut-être aussi pour sauver mon âme".
Monument historique
Cabossée par un ultime ouragan à Cabo San Lucas au Mexique en 1982, Moitessier avait vendu sa vieille coque pour 20 dollars. Il ne se doutait pas que 40 ans plus tard, son bon vieux ketch ferait partie du patrimoine maritime français.
Et 40 ans plus loin, la coque de Joshua n'était plus seulement cabossée, mais usée, grignotée, il était temps de s'en occuper : "La tôle ayant pris de la rouille, surtout en dessous de la ligne de flottaison, il y a une fragilité de la coque par rapport à son épaisseur d'origine qui était de 5 cm, il y a des endroits où c'était du papier à cigarettes" décrit Jean-Alain Berlaud, membre de l'association des Amis du Musée Maritime.
Comme neuf
Après huit mois de travaux, Joshua est comme neuf, rutilant, avec quand même encore quelques bosses, quelques traces de ses aventures. "Il fallait le remettre en état tel qu'il était. Ne pas le transformer, pour qu'il garde son âme, et l'âme de Moitessier" précise le responsable technique du Musée Maritime, Jean-Marc Duboc.
C'est le chantier nautique du vieux port de La Rochelle et l'entreprise Camus de La Pallice qui ont œuvré pour offrir une nouvelle vie à Joshua. À bord, 80 % du bateau d'origine a été sauvegardé.