Royan : un centre de tri "parallèle" découvert par les facteurs grévistes

A Royan (Charente-Maritime), La Poste avait ouvert un "centre de continuité de service" pour assurer une partie de la distribution du courrier, interrompue par la grève des facteurs. 

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Prise la main dans le sac. A Royan, La Poste a décidé la mise en place d'un centre de tri parallèle - un "centre de continuité de service", préfère la direction - pour contourner la grève des facteurs. Mais il n'a pas fallu longtemps pour que son manège soit démasqué.

Ce lundi, en début d’après-midi, un gréviste repère les étranges mouvements d’un camion jaune. Interloqué, il s’approche et tombe devant un local « A LOUER ». Le postier s'approche encore et découvre, sidéré, une vingtaine de cadres supérieurs de La Poste triant et préparant la distribution du courrier. Il prévient aussitôt les syndicats qui mettent à jour un système en place depuis des années.

A l’approche d’un conflit social, La Poste se démène parfois pour trouver un local et mobilise ses cadres pour assurer la distribution d’une partie du courrier. Sur les 42 tournées quotidiennes, seule une dizaine aurait ainsi été effectuée d’après les syndicats. "Nous sommes tenus d'assurer nos missions de service public", tient à souligner le directeur adjoint régional, Jérôme Moreau. "Du travail ni fait ni à faire", juge Denis Chiron, secrétaire général de la CGT FAPT. "Nous avons remarqué de nombreuses erreurs dans la distribution du courrier". "J’ai moi-même reçu une lettre qui ne m’était pas destinée", témoigne Wilfrid Guillot, délégué CGT à La Poste de Royan.

"Pas aux normes"

L’histoire tourne à la farce quand le CHSCT rend une petite visite à la vingtaine de cadres : les délégués syndicaux rédigent illico une "fiche de signalant un danger grave et imminent" et exigent la fermeture du local. La Poste obtempère :"nous n’avons pas voulu contester ces éléments en signe d’apaisement", raconte Jean-Paul Dessioux, directeur du cabinet de la direction régionale à Poitiers. "Il y avait tout de même certains points qui n’étaient pas aux normes : les extincteurs étaient périmés", admet Jérôme Moreau, qui "se réserve le droit" de se retourner contre le loueur des locaux. On attend avec impatience les rebondissements judiciaires de cette sombre affaire.

Point sur lequel La Poste ne souhaite en revanche pas communiquer : le prix de la location de ces locaux. "Ce n’est pas parce que nous réalisons une mission de service public que nous avons à rendre compte de ce genre d’éléments", s’agace Jérôme Moreau. "Devrions-nous également passer en revue tout notre équipement et communiquer le prix de chacun de nos véhicules ?".

De l'huile sur le feu

Une chose est sure : cet épisode ne va pas apaiser les tensions entre La Poste et ses employés. Ils exigent trois postes supplémentaires et protestent contre le déménagement d’un site de Saujon vers Royan. "La découverte de ce procédé ne nous donne pas confiance en la direction", confirme Wilfrid Guillot, qui rejette le compromis proposé ce mercredi durant la négociation. Le directeur adjoint, Jérôme Moreau, voulait bien concéder un poste supplémentaire et un renfort temporaire jusqu’au 30 septembre.

Niet pour la CGT. La Poste fait pourtant face à un effondrement du nombre de lettres distribuées chaque année : une baisse de 35 millions de plis depuis 2010, selon la direction régionale. Son objectif consiste alors à réduire ses effectifs et concentrer son activité dans de grands centres de tris.

"Les précédents journées de grève ont été suivies par 85% des facteurs et le mouvement va s’étendre à Saujon et La Tremblade", annonce le secrétaire général de la CGT FAPT, Denis Chiron. En attendant la résolution de ce conflit, la vingtaine de cadres assure la distribution du courrier depuis le centre de tri de Royan. "Quand on les voit partir en voiture à deux, un plan sur les genoux, je vous assure que cela nous fait sourire", souligne, moqueur, Wilfrid Guillot. Royannais, si votre courrier est mal distribué, ce sera la faute aux chefs !
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