Depuis le lycée technologique et professionnel Bernard Palissy à Saintes, le président de la République a annoncé jeudi une réforme de l'enseignement professionnel. En compagnie des ministres de l'Éducation Nationale Pap N'Diaye et de l'Enseignement professionnel Carole Grandjean, il entend lutter contre le décrochage scolaire et pour une meilleure insertion des jeunes qui empruntent la voie professionnelle.
Après en avoir donné les grandes lignes sur les réseaux sociaux mercredi soir, Emmanuel Macron était à Saintes ce jeudi pour détailler sa réforme de l'enseignement professionnel. Accompagné des ministres de l'Éducation Nationale Pap N'Diaye et de l'Enseignement professionnel Carole Grandjean, il entend faire de l'enseignement professionnel "une cause nationale".
Le président de la République a déclaré que parmi les 600 000 élèves en lycée professionnel chaque année, moins de 40 % trouveront un emploi dans les six mois qui suivent leur diplôme. Face à ce constat, il affiche trois objectifs : la lutte contre le décrochage scolaire, l'amélioration de l'insertion professionnelle et la reconnaissance de l'engagement des enseignants en lycée professionnel. Pour cela, il annonce mettre chaque année un milliard d'euros en plus sur la table pour l'enseignement professionnel.
Objectif zéro décrocheur
Afin de lutter contre le décrochage scolaire, Emmanuel Macron veut gagner "la bataille de l'orientation". Il souhaite éviter que "le lycée professionnel soit un choix par défaut." Pour cela, il souhaite que les collégiens, dès la classe de 5ᵉ, bénéficient d'un temps dédié à la découverte des métiers, afin de "redonner du sens à la formation" et "de la motivation aux élèves."
Le président de la République compte donner davantage de moyens au corps enseignants pour aider les lycéens en difficulté.
Vers 100 % d'insertion professionnelle
D'après Emmanuel Macron, la moitié des diplômés de Bac pro et 75 % des détenteurs d'un CAP "ne parviennent pas à trouver un emploi un an après leur sortie du lycée."
Pour répondre à ce constat, il compte "adapter la carte des formations en fonction des besoins." L'adaptation se ferait d'une part selon les secteurs, il cite par exemple le nucléaire, la rénovation énergétique ou encore le numérique, qui devraient fournir de nombreux emplois dans les années à venir, mais aussi à l'échelle des territoires, en proposant des formations qui répondent à l'offre professionnelle locale. Pour cela, l'idée est de s'appuyer sur la carte des métiers en tensions et la carte des métiers en devenir.
Le chef de l'État entend également fermer les formations qui ne donneraient "ni accès à des diplômes, ni accès à un emploi."
Une indemnité de stage va également être mise en place et financée par l'État : pour chaque semaine de stage, les élèves de première année de CAP et de seconde bénéficieront de 50 euros, ceux de deuxième année de CAP et de première toucheront 75 euros, et ceux de terminale auront 100 euros.
Plus de reconnaissance pour le corps enseignant
Les enseignantes et enseignants de lycée professionnel sont concernés par la revalorisation salariale annoncée dans l'Éducation nationale, mais ils seront également investis de nouvelles missions en lien avec la lutte contre le décrochage et pour l'insertion, et seront rémunérés davantage en conséquence : "Chaque professeur engagé et volontaire pourra prétendre dès cette année à avoir une augmentation jusqu'à 7 500 euros bruts annuels."
Emmanuel Macron promet également davantage d'autonomie pour les chefs d'établissements.
En Nouvelle-Aquitaine, la réforme doit désormais faire ses preuves
Fier d'avoir accueilli Emmanuel Macron dans sa région, et surtout dans ce lycée qui s'engage pleinement pour les métiers du ferroviaire, Alain Rousset salue plusieurs avancées dans les mesures annoncées égrenées ce jeudi. Pour lui, l'accompagnement financier des stagiaires et la hausse de rémunération des enseignements constituent de bonnes avancées, tout comme la promesse du milliard d'euros dédiés à l'enseignement professionnel dont il attend la preuve : "Je suis comme Saint-Thomas, j'attends de voir", confie le président de la Nouvelle-Aquitaine, "j'attends de voir comment le milliard évoqué par le président de la République va ruisseler sur les lycées professionnels."
Il reste réservé sur la question de la gestion régionalisée de cette formation : "Par rapport à notre ambition, ce n'est pas totalement satisfaisant". Il avoue avoir été surpris que la carte des formations soit confiée aux sous-préfets et souhaiterait que les régions conservent cette mission.
Une réforme qui ne convainc pas les syndicats
La secrétaire de la fédération FO Enseignement en Charente-Maritime, Cécile Baduel, n'est pas convaincue par les annonces du chef de l'Etat. Elle considère le plan de lutte contre le décrochage comme un "pansement sur une jambe de bois", estimant que les mesures doivent être prises en amont, au collège, pour que les élèves n'arrivent pas au lycée en situation d'échec scolaire.
Avec la carte des métiers d'avenir, l'élue syndicale craint également le renforcement d'une forme de déterminisme : "On favorise les inégalités sociales et territoriales", déplore-t-elle.
On va former ces élèves aptes à travailler dans les entreprises du coin, mais dont les compétences et le diplôme ne seront pas forcément valables à l'échelle nationale.
Cécile BaduelSecrétaire de la fédération FO Enseignement en Charente-Maritime
L'objectif d'une meilleure reconnaissance pour le corps enseignant n'est pas non plus à la hauteur des attentes des syndicats. Pour Cécile Baduel, cela ne comble pas, il s'agit essentiellement de primes, "pas prises en compte pour les retraites."
Les retraites, un sujet toujours d'actualité : plusieurs centaines de manifestants s'étaient donné rendez-vous à proximité du lycée ce jeudi, pour montrer une fois de plus leur refus de la réforme, et l'électricité a été coupée en fin de matinée dans le secteur de l'établissement par la CGT.
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