Mercredi 9 février, les 5 jurés de la sélection Eco-Fauve Raja, qui récompense un album dédié aux enjeux écologiques, ont choisi de se retirer du festival pour protester contre son partenariat avec l'entreprise RAJA, spécialiste de l'emballage. Une décision que la direction du FIBD déplore.
Ils étaient cinq jurés : l'auteur de BD François Olislaeger, la journaliste et autrice Inès Léraud, les scientifiques Roland Lehoucq et Sophie Szopa, et l'activiste pour le climat Camille Étienne. Tous devaient décerner le prix Eco-Fauve-Raja, pour une bande dessinée traitant des enjeux environnementaux parmi sept albums, mais ils ont choisi de démissionner, à quelques semaines du festival.
La raison : ils reprochent à l'événement son partenariat avec l'entreprise Raja, leader européen de la distribution d'emballages. Inès Léraud a expliqué cette décision dans une série de tweets le 9 février dernier :
En quelques messages, la journaliste indique que le jury n'a découvert le nom du prix, "Eco-Fauve" était associé à la marque Raja, qu'après avoir été invité : "Il nous a paru inapproprié qu’une marque industrielle soit associée à un prix récompensant la bande dessinée écologiste, à des fins de communication et de promotion de son image", détaille Inès Léraud. Elle raconte que les jurés ont proposé à la direction du FIBD de retirer la marque du nom de la sélection, et dans la mesure où ils n'ont pas trouvé de terrain d'entente, elle annonce qu'ils ne seront pas présents lors de l'événement.
L'histoire ne s'arrête pas là : l'un des sept auteurs sélectionnés pour ce prix a lui aussi décidé de se retirer. Etienne Davodeau, sélectionné pour son album Le droit du Sol, il reproche à son tour au festival de faire preuve de greenwashing (ou écoblanchiment).
La direction du FIBD répond
Pour Franck Bondoux, le délégué général du festival, "les membres du jury auraient dû dire dès l'origine que ça leur posait problème d'avoir le parrainage d'une marque", et d'après lui, ce partenariat était clairement exprimé, tant dans la communication de l'événement, sur son site internet, ou encore dans des échanges de mails avec les jurés. Il regrette que "personne n'ait cherché à en savoir plus sur l'entreprise RAJA et ses engagements" parmi lesquels il cite l'égalité salariale ou la responsabilité environnementale.
Pour Franck Bondoux, il faut s'interroger sur la place qu'on souhaite donner aux entreprises dans le secteur de la culture, et notamment de la bande dessinée, et il craint que ces controverses ne leur envoient un mauvais message alors qu'elles contribuent financièrement à l'organisation de festivals comme le FIBD.
En 2014 déjà, une polémique avait éclaté quant au partenariat du festival avec la firme Sodastream. Cette dernière avait alors une usine en Cisjordanie (qu'elle a fermé quelques mois plus tard), et les associations pro-palestiniennes étaient montées au créneau. Sodastream a fini par se retirer du festival en 2016. Aujourd'hui, Franck Bondoux se demande si ces débats ne sont pas finalement la rançon de la gloire :
"Je pense qu'il faut regarder la réalité en face, le festival est devenu un événement majeur, ça devient une caisse de résonnance", conclut-il.
Après l'annulation de l'édition 2021, le festival revient en 2022, du 17 au 20 mars prochains.