C'est une première pour Soyaux : quatre listes se présentent pour le second tour des élections municipales alors que depuis 1989, le maire sortant François Nebout était régulièrement réélu dès le premier tour. Dimanche 28 juin, il affrontera son premier adjoint arrivé deuxième au premier tour.
Avec ses 9.400 habitants, Soyaux est la troisième plus grande ville de Charente. Située à proximité immédiate d'Angoulême, elle fait partie du Grand Angoulême et fait face aux problématiques urbaines d'une ville de banlieue.
La quadrangulaire, un scénario inédit à Soyaux
Ces élections municipales sont inédites dans une ville qui depuis 1971 n'a connu que deux maires. François Nebout, le maire sortant divers droite, a été régulièrement réélu depuis 1989.
Cette année, il fait face à trois autres listes dont celle menée par son premier adjoint Frédéric Cros (liste "Unis pour Soyaux"). François Nebout, médecin à la retraite, est âgé de 72 ans. Il avait annoncé qu’il ne se représenterait plus à l'issue du mandat qui s'achève et avait désigné Frédéric Cros, son premier adjoint, comme dauphin. Mais le scénario a changé et les deux hommes se retrouvent face à face pour conserver ou conquérir le poste de maire.
Toutes les listes présentes au premier tour ont obtenu plus de 10% des suffrages et pouvaient donc se maintenir. C'est ce qu'elles ont fait, malgré des tentatives de rapprochement ou de fusion de part et d'autre à l'exception de celle de François Nebout. Les électeurs auront donc à nouveau le choix entre quatre listes, le dimanche 28 juin 2020.
Ce qu'il faut retenir du débat entre les quatre candidats
Le débat diffusé sur France 3 Poitou-Charentes et animé par Laïd Berritane a réuni les quatre candidats : François Nebout, Divers droite (liste "Soyaux passionnément"), Frédéric Cros, divers droite (liste "Unis pour Soyaux"), Cédric Jegou, Divers centre (liste De.ci.de.s) et William Jacquillard, union de la gauche et écologistes (liste "Soyaux, pour et par vous").
Le débat s'est ouvert sur la question de la nouvelle candidature de François Nebout qui a déjà accompli cinq mandats de maire et qui avait annoncé son intention de s'arrêter au mandat commencé en 2014.
François Nebout explique qu'il a été conduit à faire ce choix à la suite de dissensions au sein de son équipe municipale.
"J'avais essayé de passer la main mais, suite à des dissensions dans mon équipe, je réfléchissais depuis septembre 2018 et j'ai décidé de continuer".
Il y avait deux personnes qui voulaient se présenter à ma place donc ça a créé des divergences au sein de l'équipe et dans le fonctionnement municipal. Donc j'ai dit que j'envisageais de me représenter et c'est ce que j'ai fait le 1er septembre en annonçant ma candidature.
Pour Frédéric Cros qui est à la fois son premier adjoint et son adversaire pour cette élection, il s'agit pour lui d'une promesse qui n'a pas été tenue.
C'est une volte face du maire. Il avait dit en 2014 que c'était son dernier mandat, je me suis préparé pour cela, et en septembre, il a annoncé qu'il partait pour les élections. Je considérais pour ma part que c'était une promesse.
Cédric Jegou et William Jacquillard partagent la même analyse et jugent que l'heure du renouvellement politique est venue, après "cinq mandats pendant lesquels François Nebout et Frédéric Cros ont tenu la gestion de la commune" fait remarquer William Jacquillard, qui est par ailleurs conseiller régional de gauche. Cédric Jegou explique que la liste citoyenne qu'il conduit est représentative de la population de la ville, dont la moitié vit dans le quartier populaire du Champ de Manœuvre. Il souhaite "que les habitants de ce quartier se sentent concernés et aillent voter".
Quelle structure pour le centre de santé ?
Un centre de santé fonctionnant avec des médecins salariés, payés par la ville, a été ouvert en janvier dernier. Les opposants au maire sortant estiment tous qu'il aurait fallu intégrer dans cette structure d'autres professionnels du secteur paramédical.
Le centre de santé aurait pu être installé depuis longtemps avec un dispositif pluridisciplinaire. C'était une solution de dernier moment, on aurait pu avoir un projet plus abouti et faire appel à d'autres collectivités comme la région.
Frédéric Cros estime que face au manque de médecin, "la seule solution, c'était de passer par ce centre médical financé par la municipalité" mais il émet des réserves sur le bâtiment et le lieu choisi.
C'est un vieux dossier à la mairie, on en parle depuis deux ans mais le lieu ne s'y prête pas. On attend debout et il n'y a pas assez de confidentialité, nous disent les habitants.
On a un centre de santé financé par les administrés de la commune. Nous ce qu'on propose c'est une maison de santé pluridisciplinaire. La plupart des kinés sont en demande de ce genre de centre.
François Nebout explique que le choix de fonctionner avec des médecins salariés s'est imposé face au manque de candidatures de la part de médecins libéraux.
Le groupe Elsan a mis des annonces dans les internats, il n'y a eu aucune réponse. Les médecins libéraux n'ont pas répondu à notre demande. On a essayé de faire venir de jeunes médecins libéraux mais aucun n'a voulu s'installer.
Le maire sortant ajoute que cette initiative intéresse désormais d'autres communes du département comme Gond-Pontouvre ou Cognac.
La rénovation du quartier du Champ de manœuvre en question
Le quartier populaire du Champ de Manœuvre, classé en Quartier de Reconquête Républicaine, est en rénovation depuis 2008. Plus de 4.500 personnes y habitent, c'est presque la moitié de la population totale de la ville.
Les opposants au maire sortant s'accordent pour dire qu'il ne suffit pas de s'occuper des bâtiments mais qu'il faut aussi s'occuper des habitants.
Pour sa part, Frédéric Cros estime que la municipalité est en train d'y créer un ghetto.
On est en train de créer un ghetto en apportant tous les services sur place à la population... Il faut qu'on accompagne les gens pour sortir de ce quartier. J'étais pour qu'on démolisse plus. 330 logements ont été détruits, on pouvait aller plus loin.
Le candidat et adjoint au maire sortant propose la création d'une salle de sports de combat permettant d'accueillir les jeunes.
Cédric Jegou estime également que le phénomène de ghetto est en train de s'y accentuer.
Quand on concentre la précarité, il est plus difficile d'y apporter une réponse. Pour pouvoir accompagner les jeunes, la salle de boxe n'est pas une réponse. Il faut quelque chose de global comme la création de chantiers éducatifs dans le maraîchage ou l'entretien de la voirie.
William Jacquillard estime "qu'il faut permettre une meilleure circulation entre tous les quartiers avec la mise en place d'une navette et qu'une prise en charge globale est nécessaire dans un quartier où 29% de la population est en dessous du taux de pauvreté".
Quelle politique de sécurité pour la ville ?
Le maire sortant estime qu'après les incidents de 2017, la tension s'est apaisée.
Cinq policiers municipaux sont implantés dans le quatier. Il y a des traits d'union qui sont en train de se faire, il ne faut pas tout casser. Il faut continuer le travail avec les policiers, les caméras de vidéosécurité et les partenaires travaillant sur la sécurité.
Cédric Jegou se montre critique envers les choix faits par la municipalité sortante, notamment sur les caméras de surveillance.
La vidéosurveillance est une gabegie financière. On investit beaucoup pour peu de retour. Il faut plutôt une vraie proximité avec les élus et rendre les habitants acteurs.
Frédéric Cros défend un tout autre point de vue et souhaite au contraire multiplier les caméras dans la ville.
On a proposé de maintenir et même d'accentuer la vidéosurveillance. C'est un bon moyen pour voir ce qu'il se passe. Beaucoup d'interventions de la police ont eu lieu grâce à ce système. Il faut ausi renforcer le rôle de proximité de la police.
William Jacquillard estime pour sa part que la "question de la sécurité ne peut pas être détachée de la question urbaine".
Il faut en priorité se préoccuper du désœuvrement des jeunes. Il faut mettre en place un dispositif et des personnes pour accompagner les jeunes.
François Nebout a viré en tête au premier tour
La liste de François Nebout, le maire sortant, est arrivée assez largement en tête avec 38,59 % des suffrages, avec 10 points d'avance sur celle menée par son premier adjoint sortant, Frédéric Cros qui a totalisé 27,55 % des voix. La liste citoyenne, et misant sur la jeunesse, de Cédric Jégou a obtenu 20,87 % des voix. William Jacquillard, conseiller régional de gauche, n’a récolté que 12,99 %. des votes. Aucun rapprochement ou fusion de listes n'a eu lieu entre les deux tours et de possible, la quadrangulaire est devenue réalité pour le second tour.
En 2014, François Nebout avait obtenu 66% des voix dès le premier tour. Comme partout ailleurs, le taux de participation a été faible lors du premier tour du 15 mars dernier alors que la France entrait en confinement en raison de la pandémie de coronavirus. Il était de 41,10 % en 2020 alors qu'il était de 56,46% en 2014.
Les résultats du premier tour à Soyaux :
Le programme des débats sur France 3 Poitou-Charentes, par date
Jeudi 18 juin : RoyanAvec : Patrick Marengo (DVD), Jacques Guiard (UG), Thomas Lafarie (UC), Thierry Rogister (RN)
Présentation : Jérôme Vilain
Vendredi 19 juin : Thouars
Avec : Bernard Paineau (DVG), Alain Ligné (DVC), Patrice Pineau (DVG)
Présentation : Laïd Berritane
Lundi 22 juin : Saintes
Avec : Jean-Philippe Machon (DVD), Bruno Drapron (UDI), Rémy Catrou (Union de Gauche), Pierre Dietz (DVG)
Présentation : Laïd Berritane
Mardi 23 juin : Poitiers
Avec : Alain Claeys (SOC), Léonore Moncond’huy (DVG), Anthony Brottier (LREM)
Présentation : Jérôme Vilain
Mercredi 24 juin : Rochefort
Avec : Hervé Blanché (LR), Rémi Letrou (DVG)
Présentation : Laïd Berritane
Jeudi 25 juin : La Rochelle
Avec : Olivier Falorni (DVG), Jean-François Fountaine (DVG), Jean-Marc Soubeste (EELV)
Présentation : Jérôme Vilain