À Esse, en Charente-Limousine, près de Confolens, Sophie Latapie et Pierre-Antoine Raimbourg ont créé la ferme écologique de Gorce.
Le monde de l'agriculture est en pleine révolution et doit relever des défis importants pour les années à venir. Agriculture biologique ou raisonnée, bien-être animal, circuits-courts et vente directe autant de choix à faire par celles et ceux qui décident d'embrasser ces métiers. L'écologie et le respect de la planète s'invitent de plus en plus dans les débats. S'installer, reprendre une ferme, poursuivre l'activité familiale sont des questions qui entrainent parfois des mois de réflexion avant de franchir le pas, de faire Le premier pas.
Avant de présenter le film, il faut avant tout parler de deux choses, essentielles :
La première, le décor : un paysage de campagne qui semble valonné. Un sous-bois et un chemin. Le soleil qui joue à cache cache avec les feuillages des arbres. Nous sommes à Esse. Ici ce n'est plus tout à fait la Charente mais ce n'est pas encore le Limousin, c'est un peu des deux, à égalité. On parle de Charente Limousine. Les paysages sont doux et le climat peut être rude. Ce sont les premières images du film documentaire.
La seconde, les personnages du film : sur ce chemin qui vient d'on ne sait où et part vers l'inconnu, le regard se pose sur un large sourire qui éclot d'une barbe épaisse, c'est le visage de Pierre-Antoine Raimbourg . Plus loin, une jeune femme marche vers nous, elle sourit aussi, épanouie. Il s'agit de Sophie Latapie. Les deux apparaissent heureux. Ils donnent envie de les connaître, d'en savoir plus sur eux.
Ca tombe bien le film Le premier pas réalisé par Nicolas Fay raconte leur histoire, leur parcours. Certains disent même leur aventure et leurs engagements.
Après un tour du monde de 7.000 kilomètres qui les a menés de la France à la Bolivie en passant pas la Nouvelle-Zélande, ils ont pris un autre point de vue sur l’agro-écologie en créant La Ferme Écologique de Gorce.
Nous avons profité de ce périple et des rencontres que nous avons faites en chemin pour discuter, bouquiner et réfléchir notamment à la place et au rôle de l’agriculture dans la société. Nous rêvons d’une agriculture paysanne de proximité, qui intègre la notion de territoire, de paysage, qui approvisionne en produits de qualité les circuits locaux en priorité, qui offre aux animaux un mode de vie équilibré en plein air au plus proche des conditions de vie naturelle, et qui développe des liens entre les citoyens. Au retour du voyage, nous étions prêts avec Sophie à franchir le pas.
La ferme fait partie désormais du collectif Marché de Chassagne. Sophie et Pierre-Antoine défendent un écosystème naturel. L'objectif est de le rendre résilient aux aléas climatiques et de fournir de la nourriture pour les humains.
Laisser le temps au temps. Tout est question de temps, nous l’avons appris lors de notre longue marche. Rien ne sert de courir… Les choix que nous faisons aujourd’hui auront un impact dans 30 ans, 50 ans, voire plus. Planter une haie redessine le paysage, développe de nouveaux écosystèmes et modifie profondément les pratiques agricoles.
Une web série : Les Résistants
Le premier pas est le premier long-métrage documentaire de la web série Les Résistants.
La série, d'abord intitulée Le Dorat solidaire est devenue Les Résistants . Elle compte une trentaine de portraits : du paysan à l’infirmier, en passant par le professeur et le prêtre. Elle tire son nom d'un territoire qui a été terre de résistance et de maquis.
Le regard porté sur ces métiers incarnés par des habitants qui vivent dans un rayon d'une trentaine de kilomètres autour de la commune Haut-Viennoise du Dorat est celui de Nicolas Fay.
Depuis le confinement, je filme mon village du Limousin , Le Dorat– 1700 habitants. Avec mon seul IPhone je poste des portraits de celles et ceux qui se battent au quotidien.
Quand on interroge Nicolas Fay sur ce qu'il a tiré de ces rencontres, voici ce qu'il répond :
En suivant ces personnages j’ai compris que la richesse c’était l’humain. Dans ces zones moins peuplées que les grandes villes, se dessine un nouveau monde, un réseau invisible qui relie ces personnes entre elles autour du retour à l’essentiel.
Les Résistants ne sont pas une succession de biographies. Chacun des films de la web série montre des hommes et des femmes engagés sur un territoire parfois méprisé, souvent méconnu mais toujours surprenant de richesses humaines. Ils sont ancrés, tous à leur manière, dans une réalité rurale, c'est cela qui a intéressé Nicolas Fay.
Ci dessous découvrez la Bande-Annonce de la série : Les Résistants :
Le réalisateur : Nicolas Fay
Ancien réalisateur de pub parisien, Nicolas Fay a décidé de s’installer en Haute-Vienne il y a un peu plus d'un an. Vivre le premier confinement au Dorat était plus simple, comme une évidence pour lui.
La pub c'est faire du vrai avec du faux, là je fais du vrai avec du vrai.
La crise n'a pas épargné son métier, elle l'a ruiné. L'homme de pub, connu dans le nord de ce département du Limousin comme "le parisien" n'est pas du genre à baisser les bras.
Il commence à filmer des femmes et des hommes autour de chez lui. La parole se libère devant la caméra du réalisateur qui devient témoin, confident, passeur de vérités. A ce propos, celui de la vérité, il ne s'agit pas d'une caméra mais d'un smartphone. La légèreté du matériel qui sait se faire oublier a facilité les rencontres, l'immersion dans des quotidiens parfois fantasmés, souvent ignorés.
Pour autant, il ne faut pas parler d'histoire d'amour avec cette région qu’il n’aimait pas vraiment. Cette région, c'est celle de son épouse et de sa famille, pas la sienne. Il finit cependant par tomber sous son charme au point de tout plaquer et de s'y installer. Il sait filmer, il sait aller à la rencontre des autres alors avec son iphone il filme tous les jours au début de la crise sanitaire. Il les filme pour en dresser le portrait et comprend très rapidement que ces gens-là n’ont pas envie de changer le monde. Ils sont dans l'action et ils le changent et depuis très longtemps.
Repérée par Edouard Bergeon et Guillaume Canet, la série Les Résistants a été diffusée sur Cultivons-nous puis sur et .3 NoA.
Désormais, pour moi, tout transitera par Le Dorat.
Ces 34 portraits ont changé la vie du réalisateur. L'histoire devient encore plus belle quand, installé dans la petite ville du Dorat, il ouvre sa maison de production pour faire des films en circuit court. Le nom est tout trouvé, sa société de production se nomme naturellement : Court Circuit.
Le premier pas
Pierre-Antoine Chambourg et Sophie Latapie font paître 35 vaches de race anglaise sur 150 hectares de prairies naturelles, bio il va sans dire, entourées de haies nouvellement plantées. La ferme écologique de Gorce est un choix de vie.
Sophie est vétérinaire rurale dans le Confolentais. Un rêve d'enfant devenu realité.
Pierre-Antoine a ce métier dans le sang, comme sa famille avant lui. BTS agricole, licence en productions végétales puis diplôme d’ingénieur agronome, la voie était tracée : devenir éleveur.
Diplômes en poche, le couple souhaite s'installer mais avant tout penser autrement et inventer l’agriculture de demain. L’équilibre naturel des écosystèmes et le développement de la biodiversité sont des priorités pour préserver la santé des citoyens et des consommateurs. Il n'en fallait pas moins pour attirer l'oreille attentive et le regard bienveillant de Nicolas Fay. Le premier pas n'est pas le plus simple mais il est celui qui engage, celui qui montre un chemin, celui des possibles. C'est ce que racontent les jeunes éco-agriculteurs dans ce film.
"Pedro" et Sophie ont participé en 2021, à l'émission présentée par Stéphane Bern et diffusée sur France 3 : La ferme préférée des français. A cette occasion une équipe de France 3 Poitou-Charentes était allée à leur rencontre :
Si notre société est mondialisée, il n'en demeure pas moins que lorsque que l'un des intervenants du film dit : "Je suis paysan, je préserve les paysages ; un exploitant, ça exploite", nous sommes dans l'obligation de réfléchir à la fois à notre consommation et à notre responsabilité de citoyen consommateur. Pedro et Sophie, au fil du film, font comprendre que le chemin qui ouvre le documentaire n'est pas que le leur. Il est aussi le nôtre, rien ne nous interdit de l'emprunter, peut-être juste pour comprendre dans un premier temps, comme un premier pas, là aussi.
Ci-dessous, la bande annonce du film documentaire Le premier pas : réalisé par Nicolas Fay
La dernière image du film est une citation d'Antoine de Saint-Exupéry :
Nous n'héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l'empruntons à nos enfants.
Entre les images du début du film et celles qui clôt le documentaire, passent 52 minutes d'un film sensible qui pose des problématiques actuelles et à venir sur notre lien avec la terre. Puisque le mot fut à la mode il y a quelques mois, utilisons-le : Le premier pas est un film "essentiel".