Les salariés de Verallia sont en grève illimitée depuis le 22 novembre pour protester contre la fermeture du four et les suppressions d'emplois annoncées dans l'usine de Châteaubernard en Charente. Nous avons rencontrée deux salariés qui nous font part de leur désarroi.
Le 21 novembre, Christophe, un salarié de Verallia trouve une lettre à son domicile, lui annonçant son possible licenciement.
Pour cet ouvrier, déjà fragilisé par le décès de son épouse deux ans auparavant, c'est le coup de massue ; il tente, le jour même, de mettre fin à ses jours en se coupant les veines.
La nouvelle se répand au sein du personnel comme une onde de choc. Les salariés se prononcent dès le 22 novembre pour une grève illimitée.
Romuald, 24 ans, a fait grève suite à la tentative de suicide d'un collègue
"On s'attendait à ce genre de drame", soupire Romuald Paquet qui déplore que rien n'ait été mis en place pour soutenir psychologiquement le personnel dans le cadre des suppressions d'emplois du groupe. Romuald est l'un des 60 salariés du site de Châteaubernard à avoir reçu ce courrier dont le contenu ne peut être plus explicite.
Les critères d'ordre ne vous protègent pas et votre licenciement pour motif économique est donc envisagé.
Après avoir travaillé quatre ans dans l'entreprise dont une année en intérim, ce Cognaçais de 24 ans est anéanti.
"J'ai reçu la lettre juste avant mon anniversaire. On ne pensait pas qu'il y aurait des licenciements secs. Pour une entreprise qui dégage des bénéfices et qui gagne de l'argent, c'est compliqué de se dire que l'on va être mis à la porte juste parce que la direction veut dégager des fonds pour des actionnaires", s'insurge ce titulaire d'un BTS dessinateur industriel qui risque de se retrouver au chômage dès le 1er mars.
J'ai fait construire une maison à Cognac et j'ai fait un emprunt sur 23 ans. Me faire licencier et perdre mon CDI dans cette période, c'est compliqué.
Ce conducteur mécanicien fait aussi office de contrôleur régleur, comme la plupart des employés, il travaille en trois week-end sur cinq avec des horaires décalés, de jour comme de nuit.
"C'était vraiment une mauvaise surprise, juste avant les fêtes, pour moi mais aussi pour ma famille parce que travailler chez Verallia, c'est une fierté à Cognac, c'est l'une des grandes entreprises du secteur", constate le Cognaçais.
Romuald n'est pas syndiqué mais il a choisi de se battre et de faire grève. Un mouvement aussi long, est inédit chez Verallia.
C'est compliqué, mes revenus sont divisés par deux mais on continuera, il y a une grande solidarité dans l'entreprise, c'est la famille des verriers. On est très soudés
David Bossu, 38 ans en grève pour dénoncer le manque de considération
C'est cet esprit de solidarité qui fait tenir David Bossu, 38 ans, recruté en intérim en mai 2010 et embauché en CDI en 2016. Lui n'a pas reçu la lettre annonciatrice de licenciement mais il est gréviste depuis le début du mouvement, une décision prise suite à la tentative de suicide de son collègue.
"Nous sommes comme une famille, on travaille en équipe", renchérit ce contrôleur de qualité.
"On s'est mis en grève après la tentative de suicide pour dénoncer le manque d'information et de considération. On se bat pour les collègues, ceux qui ont reçu le courrier ont complètement changé, ils sont en plein désarroi. On voudrait des explications. On sait que le four va fermer mais on se bat pour qu'ils modifient les critères de licenciement", détaille David.
Les grévistes veulent rencontrer Emmanuel Macron qui sera en Charente le 8 janvier
Comme la plupart des grévistes, David est déterminé à faire grève jusqu'à la venue du président en Charente annoncée le 8 janvier. La CGT a demandé à rencontré le représentant de l'Etat lors de son déplacement.
On veut des explications de la part d'Emmanuel Macron. En tant que président de la République, il est responsable de la BPI, la banque publique d'investissements qui est actionnaire chez nous, ce qui veut dire que le président a voté pour qu'il y ait une fermeture de four.
Le mouvement de grève initié par le syndicat CGT, sera soumis à un vote dès ce mercredi (06/01) à l'occasion d'une nouvelle assemblée générale.
Reportage de Bruno Pillet et Cécile Landais