Coronavirus : trop longs, trop compliqués ou trop contraignants... le casse-tête des devoirs à la maison

Par manque de temps, de matériel ou de connaissances, nombreux sont les parents qui s'avouent incapables d'assurer la "continuité pédagogique" demandée par l'Education nationale. Un numéro vert a été mis en place pour toute question : le 0 800 208 820. 
 

Sur son téléphone, la notification Pronote est devenue sa hantise. "J'en reçois une toute les trente minutes en moyenne", souffle Isabelle*, habitante de Saint-Médard en Jalles en Gironde. 
Mère de deux collégiens, elle utilise la plateforme en ligne afin de maintenir un lien entre les collégiens, les parents, et les équipes enseignantes.
 

"C'est pire que d'être au boulot"

En ces temps de confinement, chaque professeur utilise donc Pronote pour prévenir les élèves des devoirs à faire, rappeler, des consignes, et recueillir des exercices. 
"En plus de ça, les parents d'élèves s'y mettent et envoient des messages pour se plaindre ou au contraire remercier les profs…", poursuit Isabelle. Ca n'arrête jamais"

La jeune femme, en recherche d'emploi, consacre désormais "deux heures le matin, près de trois l'après-midi", à assurer le suivi pédagogique de ses enfants. 

Même son de cloche à Talence, au sud de Bordeaux chez Sandrine, mère d'une fille en classe de 5e et d'un garçon en CM1. "C'est pire que d'être au boulot, reconnaît la quadragénaire. "Gérer la maison, assurer l'école et l'intendance en plus du télétravail, c'est vraiment très compliqué à conjuguer".
 

Plus de trois heures par jour

La mère de famille déplore la quantité de travail demandé par chaque enseignant, et l'absence de ressources. "Mon mari est aussi en télétravail. Pour bien faire, il nous faudrait quatre ordinateurs !"

Elle aussi chiffre à "trois heures trente – quatre heures, le temps consacré à encadrer les enfants dans leurs devoirs, et la rédaction des comptes rendus détaillés demandés par les professeurs." 
 

Un accès inégal aux cours

Les méthodes de communication entre enseignants et élèves varient en fonction des établissements, et même parfois des professeurs. Mails, courriers, plateforme numérique de type Pronote ou ENT… Tous ne peuvent pas forcément suivre. 

Certains parents sont contraints de travailler et ne peuvent surveiller leurs enfants, d'autres n'ont pas d'ordinateur ou de connexion Interne. Ou ne disposent pas des connaissances suffisantes pour aider leurs enfants dans certaines matières.

Pour Mathilde*, professeure de Français au collège Jacques Prévert de Bourg sur Gironde, ces déséquilibres ne font que se confirmer. 
"On avait déjà des inégalités en classe. Certains enfants n'ont pas de connexion ou d'imprimante… C'est sûr que la situation ne fait qu'agrandir le fossé. Mais c'est pareil pour certains professeurs, tous n'ont pas la maîtrise des outils numériques", rappelle l'enseignante.
 

Un recensement des familles en difficulté

Contéctée, Solène Berrivin, directrice académique adjointe des services de l'éducation nationale de la Gironde assure que les établissements ont fait leur maximum pour réduire ces écarts. "Après l'annonce d'Emmanuel Macron jeudi soir, nous avons eu 24 heures pour nous retourner. 

Chaque établissement a fait un recensement des difficultés que les familles pouvaient rencontrer, afin de mieux pouvoir les accompagner. Certains ont eu des polycopiés, pour d'autres ce sont les psychologues scolaires, les enseignants spécialisés, ou encore les Accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) qui sont mobilisés pendant cette période".
 

Dans le second degré, les professeurs principaux doivent rester en contact avec chaque famille, et si besoin proposer un accompagnement au cas par cas
Solène Berrivin, DAASEN

Le rectorat assure que les familles seront contactées directement une fois par semaine par les établissements, voire plus en cas de besoin. Il conseille aussi de se connecter sur le site ma classe à la maison du CNED surlequel près d'un millier d'enseignants sont mobilisés. Un numéro vert a été mis en place pour toutes questions : le 0 800 208 820.

Concernant le travail des élèves du collège, l'accent sera mis sur l'aide à l'organisation la semaine prochaine. Car la rectrice le reconnaît, "presque trop de devoirs et de leçons ont été fournis cette semaine".


Des professeurs trop investis ?

Une fois ce dispositif établi, faut-il suivre à la lettre chaque instruction, quitte à se retrouver rapidement submergé ? Qu'attendent les enseignants ? Solène Berrivin reconnaît que des ajustements sont à prévoir.
"Nous avons effectivement des échos de parents qui se plaignent de la charge de travail. Il y a eu un engouement à tous les niveaux. L'idée n'est surtout pas que les parents fassent cours à la place des enseignants. Il s'agit plus d'entretenir les apprentissages". 

Depuis son domicile, Mathilde, qui prépare les cours à ses élèves tout en assurant le suivi de ses trois enfants abonde. "Les chefs d'établissements nous font confiance. Peut-être que certains professeurs sont trop investis et ont des exigences trop importantes… Nous n'en sommes qu'au début, je pense que ça va se tasser d'ici quelque temps".
 

Cette période peut-être aussi l'occasion de favoriser d'autres façon d'apprendre. Quand on habite à la campagne, on peut très bien aller jardiner par exemple ! 
Mathilde, enseignante à Bourg-sur-Gironde

 

Changement de regard

L'expérience fait prendre conscience de la difficulté d'enseigner. A Talence, Sandrine assure avoir entendu plusieurs fois le même reproche. "Mes enfants me disent, maman, tu ne sais pas expliquer ! Et c'est normal, chacun son métier, je ne suis pas enseignante, je n'ai pas forcément la bonne pédagogie!"

De quoi faire sourire Mathilde. "Nos mercredis, nos 'congés', nous les enseignants, nous les passons comme ça, à préparer des cours et corriger nos copies, tout en nous occupant de nos enfants. 
Peut-être qu'enfin, après avoir si longtemps sous-estimé notre métier, les gens vont prendre en compte notre réalité ! "



*Le prénom a été modifié

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