A Brive, la Maison de Soie accueille les personnes victimes de violences physiques ou psychologiques. Hommes, femmes, enfants, sont reçus par une équipe pluridisciplinaire pour une assistance médicale, sociale et juridique. Rencontre avec Chloé et Jules qui tentent de se reconstruire. 

Installée au sein de l'hôpital de Brive, la Maison de Soie est l'une des huit seules structures du genre en France. Franchir sa porte, c'est déjà une première étape dans le long processus de reconstruction pour les victimes de violences tant physiques que psychologiques. Ici, tout le monde est écouté dans la bienveillance. 

Parmi les bénéficiaires de cet accompagnement, Chloé. Elle vient de passer les cinq dernières années coupée des siens, sous l'emprise d'un conjoint alcoolique et violent. Une lente descente aux enfers...


►Retrouvez le témoignage de Chloé dans cet entretien de Pierre Gauthier et de Matthieu Degremont pour France 3 Limousin

D’abord il y a eu les coups, "à des endroits où ça ne laisse pas de trace", mais pour Chloé, c’est surtout la violence mentale qui la fait souffrir : "Je pense qu’on guéri plus facilement d’un bleu que d’une insulte. On culpabilise parce qu’il vous fait comprendre que c’est vous qui ne refléchissez pas bien, vous n’êtes pas dans la bonne démarche. Au fur et à mesure, on n'est plus libre de donner son avis. Je n’était plus libre de dire ce que je voulais. Dans un couple, on ne peut pas toujours être d’accord. Mais là, il fallait toujours que j’aille dans son sens, que je dise amen à tout ce qu’il voulait, sinon il se mettait en colère. Pendant trop de temps il a contrôlé mes gestes, ma façon de penser." 

Le compagnon de Chloé l’oblige à mettre le haut-parleur lorsqu’elle reçoit un appel mais surtout, surveille ses factures de téléphone. "C’est l’un des éléments importants de ma prise de conscience. Lorsque je me suis aperçue qu’il me surveillait à ce point, je me suis rendu compte que je ne pouvais pas appeler à l’aide sans qu’il le sache, que je n'étais plus libre. Heureusement, j’ai pu créer une adresse mail qu’il ne connaissait pas et contacter des gens extérieurs auxquels je pouvais me confier". 

Les spots de prévention à la télé, les émissions, les documentaires sur les violences conjugales, commencent à l’alerter : "On se dit, tiens, je vis un peu la même situation. Mais même encore aujourd’hui j’ai dû mal à  me convaincre que je suis une victime"

Ouvrir les yeux, faire prendre conscience, pour permettre la (longue) reconstruction

Après une hospitalisation, Chloé tente de reprendre confiance en elle, grâce à l'écoute des thérapeutes de la Maison de Soie. Ses interlocuteurs l’aident dans son cheminement. "Ils m’ont tendu la main, sans me juger alors que j’étais certaine que tout était de ma faute."

Elle trouve ici, en un lieu unique, tout l'accompagnement médical, social et juridique nécessaire à chaque étape de sa reconstruction, qui commence par accepter et mettre des mots sur sa situation. 

"Non, je ne suis pas sortie d’affaire. Il faut que je réapprenne à vivre libre. Je ne pouvais plus penser par moi-même. On en perd sa personnalité, on ne sait plus ce dont on a envie." Chloé sait qu'elle ne retrouvera pas une vie normale du jour au lendemain.

Le reportage de Pierre Gauthier et Matthieu Dégremont à la Maison de Soie à Brive.

Le schéma malheureusement classique, se répète quel que soit le profil des victimes."Systématiquement, il y a d'abord le déni", explique Sophie Aimard, psychothérapeute bénévole à la Maison de Soie,"le mot victime est associé à de la faiblesse, de la fragilité alors que ce n'est pas du tout le processus de la violence." 

Parmi les 82 dossiers traités depuis novembre 2020 par la maison de Soie, 78 femmes et 4 hommes, dont Jules. Malgré son excellente situation professionnelle, il a lui aussi sombré, petit à petit, au fil d'une relation délétère qui a duré 6 ans. "On ne prend pas conscience de ce que l'on vit. On pense qu'on est la personne malade, défaillante. Et quand on prend conscience que le pervers nous enferme dans des situations, nous tire vers le bas pour qu'on devienne sa chose, on est complètement déprogrammé et reprogrammé à notre insue"

La situation empire jusqu'au burn-out de Jules qui "réapprend à marcher", selon ses termes, grâce aux membres de l'association. "Je n'arrivais plus à avancer. Et grâce à la Maison de Soie, je retrouve mes ailes". 

 

 

 

 

 

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