Ils sont 13, treize départements français de métropole où les bovins supplantent les habitants. C'est le résultat d'une étude de l'INSEE sur le cheptel présent dans les exploitations et du travail du cartographe Jules Grandin. En Limousin : la Corrèze et la Creuse sont évidemment concernées.
Elles sont partout. Rousses, blanches, parfois rouge acajou. Limousines, charolaises, plus rarement Salers. Au bord de chaque départementale. Le long de chaque chemin de fer à regarder les rares trains qui sillonnent encore la région. Elles sont là. Parfois on le regrette. Quand on est en panne, sans téléphone, que le hameau le plus proche est désert. Et que l'être vivant le plus proche broute de l'herbe et n'a pas de téléphone portable. Parfois on s'en réjouit. Nos départements ne sont pas déserts. Où que vous soyez, il y a une vache pour poser sur vous son regard doux.
L'hégémonie des bovins par rapport aux humains est nette en Corrèze. On y compte 240 073 habitants, il y a, selon l'étude de l'INSEE, 279 100 vaches. En Creuse la différence est abyssale. 418 100 vaches pour 116 617 habitants. Trois fois plus.
En 1891, les Corréziens auraient encore pu lutter. Ils étaient alors un peu plus de 328 000 habitants. Jamais dans son histoire la Creuse n'a compté autant d'humains que de bovins. En 1851, il y avait, au mieux, 287 075 Creusois. Très insuffisant pour faire face. Ces chiffres témoignent implacablement de l'ampleur de l'exode rural qui a touché les deux départements.
Grâce aux bovins, les paysages sont ouverts et le Limousin ne se résume pas à une immense forêt. A cause d'eux, il faut se partager la ressource en eau. Pas facile les années de sécheresse. Une vache limousine consomme environ 50 litres d'eau par jour. Cela représente en Creuse 20 905 000 litres consommés à la journée. Un cheptel d'une telle ampleur est-il tenable dans la durée ?