Les agriculteurs creusois ont manifesté devant la préfecture à Guéret ce mercredi, à l'appel de la FDSEA et des Jeunes Agriculteurs. Ils étaient plusieurs dizaines à avoir fait le déplacement pour dénoncer la nouvelle carte de calamité agricole pour la sécheresse, qui ne prend en compte qu'une partie du département.
Du fumier devant les grilles de la préfecture de la Creuse, et à d’autres endroits de la ville, c’est leur façon de marquer leur colère contre la nouvelle carte de calamité agricole pour la sécheresse dévoilée le 9 décembre dernier, très sélective à leur goût.
« On manifeste, explique Fabien Perigaud, président des jeunes agriculteurs de la creuse, parce qu’on est pas du tout d’accord avec la décision prise vendredi dernier par le comité national de gestion des risques agricoles. On avait présenté deux dossiers, le premier sur la grêle, où il y avait 45% de pertes, et un deuxième dossier sécheresse qui ne comprenait pas la zone grêlée, où il y avait 35% de pertes liées à la sécheresse. Le dossier grêle a été retenu à hauteur de 35% de pertes, et simplement une toute petite partie du Nord de la Creuse a été reconnue en sécheresse. Le taux retenu est seulement de 32%, et le reste de la Creuse n’a pas été retenu. Il était en dessous des 30%, parce qu’il faut savoir qu’il faut 30% de pertes de récolte pour pouvoir prétendre à cette indemnité » détaille l’élu.
« Moi j’ai un exemple concret d’un agriculteur à qui il reste 30 bottes d’enrubannage pour finir l’hiver. Il avait 60 vaches, il en a vendu 35 déjà, et j’ai un autre collègue à qui il reste que 40 bottes de foins. Pour l’instant, il en achète du foin, mais il ne va pas pouvoir tenir », prévient Fabien Perigaud.
« On a eu un rendez-vous avec le ministre lors du sommet de l’élevage qui nous avait promis de prendre le dossier Creuse à bras le corps et qu'il allait s’en occuper particulièrement, et aujourd’hui, on se rend compte qu’il s’est bien foutu de nous, et qu’il n’a pas tenu sa parole », accuse amère le jeune agriculteur.
162 communes creusoises sont donc exclues des aides de l’Etat, une surprise pour la chambre d'agriculture qui avait pourtant réalisé plusieurs études fourragères afin d’éclairer le comité.
« J’ai bien peur que le gouvernement a fait un calcul financier, sans tenir compte de la réalité », suppose Pascal Lerousseau, président de la chambre d’agriculture. « Parce que la chambre d’agriculture avait fait remonter les bilans fourragers qui faisaient bien ressortir que toutes les exploitations du département étaient entre 38 et 45% de pertes de fourrage, donc on n’a pas bien compris pourquoi ces communes ont été écartées. Surtout que si c'est juste pour des raisons financières, ça nous ne pouvons pas l’accepter ! ».
Pour lui, « cette décision va porter un gros préjudice aux agriculteurs, puisqu’on voit aujourd’hui que beaucoup d’agriculteurs attendaient de savoir s’ils allaient être reconnus en calamités sécheresse pour pouvoir prétendre à des aides afin d'acheter du fourrage. De plus en plus aujourd'hui ont fait le choix de décapitaliser, à savoir vendre des animaux. Et j’ai peur que ça continue parce que les agriculteurs ne pourront pas se permettre d’acheter du fourrage s’il n’y a pas des fonds en face, donc ils feront le choix de vendre les animaux. Et ce qui nous inquiète encore davantage, c’est le fait qu'en 2023 nous allons changer de système. A savoir que le fond « calamité agricole » n’existera plus. Nous allons tomber sur un système assurantiel, et cela va poser problème puisque les agriculteurs ne vont pas contracter une assurance si en cas de sécheresse ils savent qu’ils ne pourront pas prétendre aux aides auxquelles ils ont droit. »
L’Etat propose aux agriculteurs de prendre des assurances sans convaincre.
« Ces assurances sont facultatives", rétorque le président de la chambre d’agriculture. « Et même s’il y a une aide de l’Etat, il y a quand même une partie à payer. Les agriculteurs ont bien compris qu’ils n’ont pas intérêt d’investir dans un contrat d’assurance dans la mesure où en cas de besoin ils ne disposeront plus des fonds calamités agricoles. Ce que l’on demande en priorité, c’est de revoir le paramétrage des cartes, adaptés aux régions de moyennes montagnes comme les nôtres, pour qu’elles fassent ressortir la pousse de l’herbe et qu’elles ne soient pas jugées avec les critères d’aujourd’hui. Ou alors on demande qu’il y ait des bilans fourragers sur le terrain, comme l’a fait la chambre d’agriculture, et que tout soit pris en considération », insiste-t-il.
Les représentants de la préfecture présents sur place expliquent quant à eux vouloir continuer à soutenir ce dossier.
« Il faudra certainement être convaincant, en amenant des éléments d’explications complémentaires, par rapport à cette zone, où il y a une discordance entre qui est mesuré, vu du ciel et ce qui constaté sur le terrain » reconnait Pierre Swartz, directeur départemental des territoires
Effectivement en plus de dossier porté par la chambre, le gouvernement utilise des cartes satellite pour mesurer les terrains à indemniser. Des cartes que les agriculteurs considèrent comme obsolètes.