Creuse : « la ferme des mille veaux » reprise par le groupe toulonnais Carnivor

La ferme des mille veaux vient d’être reprise par le groupe alimentaire Carnivor. Son activité va se poursuivre. Le groupe d’éleveurs qui est à l’origine du centre d’engraissement de bovins a joué de malchance.

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René Imbert, PDG du groupe familial Carnivor, se montre très discret sur ses intentions vis-à-vis de « la ferme des mille veaux » qu’il vient de reprendre à Saint Martial Le Vieux (23). Il n’a pas souhaité répondre à nos questions. On sait seulement que Carnivor va conserver les 3 salariés.

Ce groupe comptait 630 emplois en 2019. Le chiffre d’affaire de son pôle viande est de 300 millions d’euros. Le groupe aurait  opté pour un modèle de filière intégrée, depuis l’élevage jusqu’à la distribution. C’est dans cette optique qu’il a acquis l’abattoir de St Viance (19). La reprise d’un centre d’engraissement en Creuse semble donc cohérente.

 

Les engraisseurs italiens

Le système fonctionne ainsi depuis une quarantaine d’années : les bovins mâles sont élevés dans les fermes de la région Limousin. Ils boivent le lait de leur mère et mangent la bonne herbe de nos prés.

Passé un certain âge, Ils coûtent cher en nourriture. Généralement, un éleveur ne garde pas plus de 3 ou 4 taureaux pour la reproduction.

Quand ils atteignent l’âge de 9 à 12 mois, les jeunes mâles sont vendus à des centres d’engraissements pour la plupart situés en Italie. Ces centres sont d’immenses stabulations de 10 000 places dans lesquelles les animaux passent de 350 à 700 kilos environ. Une fois qu’ils ont bien mangé, les Italiens les exploitent pour leur viande.

Ces centres d’engraissement se situent pour la plupart entre Turin et Milan, dans la très fertile vallée du Pô. Là-bas, on trouve des céréales à foison et la nourriture coûte moins cher.

Les pays Italiens et nombre de pays de l’Europe du Sud préfèrent aussi une viande jeune, claire et très tendre. D’où le fait que les bovins mâles soit abattus rapidement.

Chaque année, la coopérative Creusoise Celmar exporte 8000 à 9000 bovins en Italie

Les vaches limousines sont quant à elle conservées bien plus longtemps dans les fermes. Elles sont rentables parce qu’elles font des veaux. Leur viande finit par être consommée surtout en France, où l’on préfère manger une viande rouge vif et foncée, qui provient d’animaux plus âgés.

 

 « Ferme des mille veaux » : genèse du projet

Lors de la crise de la fièvre catarrhale à la fin des années 2000, les éleveurs limousins se sont retrouvés dans l’impossibilité d’exporter leurs bovins vers l’Italie. Et puisque l’idée d'engraisser leurs animaux sur le territoire français leur trottait dans la tête depuis un petit moment, une vingtaine d’entre eux s’est décidée à créer « la ferme des mille veaux ». Ils ont rapidement été rejoints par 45 actionnaires. Autant d’éleveurs qui se sont mis à engraisser leurs bovins tout près de la Courtine (23).

 

Les raisons de l'échec

Un groupe d’écologistes a milité contre « la ferme des 1000 veaux ». Ils ont intenté une action en justice, bloquant pendant longtemps l’agrément à 400 bêtes au lieu de 800. C’est à ce moment que la société a commencé à perdre de l’argent.

Puis les éleveurs creusois ont par la suite commis « un certain nombre d’erreurs » selon leur propre aveu, alors qu’ils apprenaient un nouveau métier : celui d’engraisseurs. Tous les animaux ne sont en effet pas faits pour être engraissés.

Je ne connais personne qui puisse travailler longtemps à perte.

Pascal Lerousseau, président de la chambre d’agriculture de la Creuse

 

Les porteurs de « la ferme de 1000 veaux » ont aussi choisi d’implanter leur structure dans un village très excentré. Le coût de transport des céréales utilisées pour l’engraissement leur a coûté très cher.

Et puis le cours de ces céréales a explosé alors que celui de la viande s’effondrait.

Pour toutes ces raisons, les pauvres éleveurs creusois qui avaient fait construire des bâtiments très aérés dans lesquels les bovins étaient bien plus à l’aise qu’en Italie, ont échoué.

 

Soulagement

Quand ils regardent dans le rétroviseur, ils se disent à la fois amer et soulagés. Au tout début, Gilbert Mazaud était l’un des porteurs du projet : «j’espère juste que Carnivor continuera à travailler avec des animaux issus de nos exploitations ». Certains éleveurs témoignent avoir déjà été démarchés.

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