Témoignages. Lâcher son téléphone, c'est possible : la Creuse comme remède à l'hyperconnexion, pour "venir se recharger"

Publié le Écrit par France Lemaire

Nous vivons dans un monde hyperconnecté, dans lequel nos ordinateurs ou nos téléphones portables ont pris une place prépondérante, parfois jusqu'à l'envahissement. Or couper le téléphone portable et ses notifications constantes est bénéfique pour notre bien-être. Et pour cette déconnexion digitale, la campagne limousine a une vraie carte à jouer.

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Qui pourrait encore aujourd'hui se passer de son téléphone portable ? D'un ordinateur, d'une télévision ? Les écrans occupent notre vie. Pour nos loisirs, notre travail. 

Et les chiffres sont parlants. 

Quatorze ans et 310 jours devant les écrans

Chaque jour, les Français consultent leur mobile en moyenne 3 heures et 33 minutes. De plus, 95,1 % des Français âgés de 16 à 64 ans utilisent un portable et 79,5 % possèdent un ordinateur.

En 2022, les Français ont passé en moyenne 4,6 heures par jour devant un écran, d’après le dernier Baromètre du numérique, sorti en janvier 2023.

Les petits ne sont pas épargnés. Les enfants de deux ans passent en moyenne 56 minutes par jour devant les écrans, tandis que les adolescents peuvent atteindre six à sept heures les jours sans école.

En moyenne, les Français passeraient donc 14 ans et 310 jours devant les écrans au cours de leur vie.

On a même inventé un mot : la nomophobie, pour parler de l’angoisse à l’idée d’être séparé de son téléphone portable… Ou de ne plus avoir de batterie.

Et ce temps passé devant les écrans peut avoir des conséquences sur la santé physique et mentale. 

Regardez notre enquête sur les atouts de la Creuse pour se déconnecter :

durée de la vidéo : 00h10mn55s
L'hyperconnexion numérique peut avoir des conséquences sur la santé, physique et mentale. Pour apprendre à se déconnecter, la Creuse a de nombreux atouts. Intervenants dans le reportage : Anneke Bruurs et Bart Gysens, propriétaires du gîte "Les Filloux" - Pascal Néquier, infirmier en addictologie au CH Esquirol - Eric Moreau, éleveur et propriétaire de gîte de Montignat - Florence Parot, sophrologue Reportage : France Lemaire, Margaux Blanloeil, Frédérique Bordes, Aurélien Lazeirat, Sébastien Passelergue ©France Télévisions

Les douleurs physiques 

Être assis devant un ordinateur plusieurs heures par jour, ou penché sur un smartphone peut provoquer des douleurs dorsales, ce que l'on appelle les troubles musculosquelettiques. 

La surconsommation d'écrans peut également entraîner de la fatigue oculaire, des troubles de la vue ou des maux de tête.

Elle a aussi des conséquences sur le sommeil. Non seulement parce qu'il est parfois difficile d'arrêter de scroller sur les réseaux sociaux ou de stopper une partie de jeu vidéo pour aller se coucher, mais aussi parce que la lumière bleue des écrans perturbe la production de mélatonine, l’hormone qui régule nos cycles d’endormissement. 

Le risque du burn-out

L'hyperconnexion numérique a aussi des conséquences sur la santé mentale. Florence Parot est sophrologue. À  Aubusson, elle a créé la Bulle de repos, et au fil des demandes de ses clients, elle est devenue une spécialiste du burn-out.

"À partir du moment où on a tous eu des smartphones, les chiffres du burn-out ont augmenté de façon exponentielle, parce que d'un seul coup, on était tous connectés", constate la professionnelle, qui ajoute "être connecté 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, c'est très fatigant pour le cerveau, et si on n'a pas une certaine discipline personnelle, comme éteindre son portable à une certaine heure, l'utiliser pour certaines choses, on va faire surtravailler le cerveau, et ça va vraiment l'épuiser."

On est dans un état d'urgence

Florence Parot, sophrologue, au sujet du burn-out

Bien sûr, la cause du burn-out n'est pas uniquement l'hyperconnexion, mais elle y participe grandement. Quand Florence Parot travaille avec une personne en burn-out, elle aborde cette question. "La plupart me disent que le téléphone portable est allumé 24h/24, parfois sous l'oreiller la nuit, (...) ils me disent recevoir des messages en pleine nuit. Pour bien récupérer, il ne faut pas qu'il y ait de bruit la nuit. Le téléphone doit être éteint."

Avec ses conseils, Florence Parot apprend à ses patients l'emploi de leur outil digital pour qu'il leur soit utile, alors qu'il les envahit. 

Mettre des limites

Mais il n’est pas si simple de se déconnecter. "Si c’était facile, on le ferait tous plus souvent !", sourit Florence Parot. "C’est vraiment une rééducation, ajoute-t-elle. Ça commence par une prise de conscience. De se dire, tiens ! Comment est-ce que réellement, j'utilise mon téléphone, ma tablette, mon ordinateur, ma télévision et du coup se dire de quoi j’ai vraiment besoin dans mon travail, dans mes relations avec les autres, dans ma vie sociale, avec ma famille, et à partir de là émettre un cadre pour soi-même."

Et bien sûr, la sophrologue applique ses propres conseils. Ainsi, lorsqu’on lui envoie un mail, on reçoit cette réponse automatique en retour. "Je réponds à mes mails trois fois par semaine. Je gère mon temps de connexion au mieux pour être pleinement disponible quand vous en avez besoin, et être en accord avec mes principes."

Aujourd’hui, à Saint-Dizier-Masbaraud, Bart Gysens et Anneke Bruurs ont mis ces limites.

 Changer de vie

Il y a quelques années, le couple originaire de Belgique séjournait en Corrèze, quand sur un coup de cœur, en une semaine, ils ont changé leur vie, tombés amoureux d’une maison, dans la Creuse. Au milieu des champs et des bois. Au calme.

Ils en ont fait un gîte, et surtout leur havre de paix.

Anneke était comptable, Bart directeur d’un lycée professionnel, il avait aussi créé sa société de communication digitale. Jusqu’au jour, où il s'est effondré. "J’ai fait deux burn-out, le 2ᵉ était pire. C’est comme un élastique qui ne marche plus." 

J’ai ressenti mon corps me dire : arrête avec la vie que tu as maintenant.

Bart Gysens

 

Bart s’est lancé dans la poterie. Une thérapie. Une reconnexion avec le travail manuel, dans lequel l’esprit doit être concentré sur l’action présente. Aujourd’hui, c’est son nouveau métier.

Il en a oublié les réseaux sociaux, et compte sur le bouche-à-oreille pour vendre ses créations, plutôt que sur des photos postées.

Ce qui l’a aidé à s’en sortir, c’est aussi le contact avec la nature.

La reconnexion à la nature

En cette période printanière, Anneke et Bart passent beaucoup de temps au jardin. "La connexion avec la nature fait que nous nous sommes reconnectés avec nous-mêmes, admet Anneke, c’est ce qu’on avait perdu". Aujourd’hui, ils vivent au rythme des saisons.

À partir du mois d'avril, dans leur gîte des Filloux, les hôtes sont réveillés au bruit des animaux dans le champ voisin, plutôt qu'au son des notifications sur leur téléphone portable !, plaisante Anneke.

Une pause déconnectée, c'est aussi ce que propose Eric Moreau. Il est éleveur de charolaises à Saint-Frion, dans le sud de la Creuse. Il y a 20 ans, pour diversifier son activité, il a construit un gîte.

"Si vous voulez passer une semaine sans voir personne, il faut venir au gîte de Montignat", dit de lui le guide du routard. Le chalet est isolé, au bord d’un étang. Le paradis des pêcheurs, et de tous ceux qui cherchent à se déconnecter.

Car ici, pas d’internet.

"Ce que l’on croyait être un inconvénient est devenu un atout. Certains locataires choisissent notre gîte car il n'y a pas de connexion", s’étonne encore Eric Moreau.

Ici, en sevrage numérique, les vacanciers changent leurs habitudes, de longues promenades sur les sentiers, et les enfants retrouvent le goût des cabanes. Sans connexion, ils récupèrent, se libèrent, car l’usage des écrans peut aller jusqu’à l’addiction.

C’est ce que constate Pascal Néquier, infirmier addictologue au Centre expert du jeu pathologique du CH Esquirol à Limoges. "Si je prends l’exemple de quelqu’un qui serait très présent dans son entreprise, à travers son travail, mais aussi avec l’usage des écrans, quand il sort de son boulot, pour lui, c’est impossible de couper le portable professionnel, c’est impossible de ne pas anticiper le travail qu’il restera à faire pour le lendemain, c’est une préoccupation de tous les instants, alors que le moment n’est pas le plus adéquat, que c’est un moment de repos, ou de partage familial, ou social, ou d’une pratique sportive."

Et pour nettoyer son cerveau de cette addiction, la campagne a du bon. 

Les atouts de la zone blanche

Florence Parot est une sophrologue reconnue. Auteure de plusieurs ouvrages sur le sujet, elle a exercé en Angleterre et dans la région parisienne, avant de renouer avec ses racines creusoises à la Serre-Bussière-Vieille.

Un retour lié au bien-être. Car depuis toujours, quand elle passait du temps dans la maison familiale, elle ressentait une sérénité, liée à la plénitude de l'environnement.

"Le fait d'être dans la nature, et d'être dans le silence, puisque ici, à part les oiseaux, on n'entend pas grand-chose ! Ça va vraiment aider le corps, la tête à mieux fonctionner."

D'autant qu'ici, le téléphone portable n'est pas une tentation : c'est une zone blanche !

On va pouvoir venir se recharger soi, et pas son téléphone !

Florence Parot, sophrologue

Florence Parot a même pour projet de transformer sa grange en centre pour aider les personnes stressées victimes de burn-out à se ressourcer. Loin de l'agitation et de l'hyperconnexion. 

Un nouveau départ auquel ont goûté Anneke et Bart, dans leur gîte de Saint-Dizier-Masbaraud. Et qu'ils ne regrettent pas ! 

 

 

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